Réforme canada dry : Macron 2 ou l’arme fatale de Hollande contre Manuel Valls <!-- --> | Atlantico.fr
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Emmanuel Macron tenterait d'écarter Manuel Valls du jeu politique.
Emmanuel Macron tenterait d'écarter Manuel Valls du jeu politique.
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L'Edito de Jean-Marc Sylvestre

Vous avez aimé Macron 1 ? Alors vous aimerez Macron 2. Un discours très libéral qui ne peut que plaire aux chefs d’entreprise, des mesures qui ne dérangeront pas la gauche mais qui agaceront seulement des corporatismes. Et surtout, un processus de plus pour écarter Manuel Valls du créneau politique qui est le sien.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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François Hollande a prouvé qu'il était un piètre gestionnaire de la machine gouvernementale, mais personne ne doute de sa capacité à manipuler des positions politiques, c’est Machiavel.

Ce qui se passe aujourd’hui est caricatural de son talent. Politiquement, sa position dans l’opinion française est catastrophique, il est très bas dans les sondages. Les élections régionales vont être un naufrage pour sa propre famille politique. En théorie, il n’a donc aucune chance de gagner la prochaine présidentielle. Et, dans cette famille de gauche, le seul qui pourrait le challenger sur l’élection présidentielle, c’est évidement Manuel Valls.

Cette situation explique que les rapports entre les deux hommes soient devenus exécrables. Le Président va essayer de faire porter à Manuel Valls le chapeau de la défaite électorale. Tout se passe comme si le Président voulait se débarrasser de son Premier ministre après les régionales, si la situation est véritablement catastrophique.

Manuel Valls sait tout cela, il ne se prive plus pour reprocher au Président de l’empêcher de faire toutes les réformes qu'il faudrait faire pour que la machine économique se remette à fonctionner. François Hollande a organisé toute une série de reculades depuis deux semaines. Le Premier ministre a du mal à les accepter.

La dernière opération en date initiée par François Hollande et  Jean-Pierre Jouyet, le secrétaire général de l’Elysée qui est à la manœuvre pour sauver Hollande, c’est le lancement de la loi Macron 2. Du nom du petit protégé de Jean-Pierre Jouyet justement. 

Après beaucoup d’hésitations du coté de Matignon, qui était contre, Emmanuel Macron a donc présenté le deuxième étage de la fusée de libéralisation de l’économie. Si vous avez aimé Macron 1, vous aimerez forcement Macron 2 . C’est  dans la même veine, Macron 2 a été intitulé "Noé", comme l’arche du même nom qui a sauvé l’humanité et la vie dans sa diversité lors du déluge au moment de jugement dernier.

Noé, à Bercy, c’est  l’acronyme de "nouvelles opportunités économiques". Avec No", Emmanuel Macron veut repousser les frontières du développement économique et susciter le maximum  d’opportunités pour créer de l'activité, de l’emploi et de la croissance.

Le ministre n’est pas rentré dans le détail, mais il veut réformer très rapidement le statut de l’entrepreneur pour lui donner plus de liberté.  En fait, il veut sortir un statut encore plus simplifié que celui de l’auto entrepreneur, il veut presque  légaliser le travail au noir. Il veut accélérer l’impact du numérique dans tous les secteurs à commencer par celui de la santé et la formation.

Mais le cœur de son propos, c'est de poursuivre l’évangélisation des foules françaises pour les convertir à l’entreprise, la liberté d’entreprendre, la possibilité de devenir riche. Il ne veut pas travailler à l’égalité de tous devant la richesse - ce dont rêvent tous  les socialistes - mais à l’égalité de tous, aux accès et aux opportunités économiques.

En clair, Emmanuel Macron prêche pour une mondialisation régulée, une économie de marché assainie et un progrès technologique toujours plus ambitieux. A part le Front de Gauche et Cécile Duflot, tout le monde est à peu près d’accord pour un tel programme.

Ce discours va donc plaire, comme pour Macron 1, de la droite libérale à la gauche social-démocrate. Il va plaire aux milieux d’entreprise, aux dirigeants. Enfin un ministre sérieux qui a compris les contraintes du marché, va-t-on de nouveau entendre dans les salles des conseils d'administration. En plus, il ne peut pas déplaire à la gauche modérée puisqu'il explique que la gauche se doit d’être efficace et pragmatique. Donc, ce qui peut être efficace est forcement de gauche.

Le seul problème de Macron 2, c’est qu’elle ne débouchera pas sur les réformes dont l’économie a besoin pour s’affranchir de ses contraintes et de ses freins. Le droit du travail trop stressant, et surtout les dépenses publiques et sociales trop lourdes. Pour les socialistes, ce n’est pas un problème.

En fait, le seul intérêt de l’exercice Macron 2 est strictement politique. Ce discours a été voulu par Hollande et Jouyet pour éliminer Manuel Valls qui avait jusqu’alors le monopole de l’ouverture libérale et le privilège d’occuper le créneau d’une gauche pragmatique et libérale. Et Valls tenait bien ce créneau avec l’ambition de mettre en œuvre les réformes nécessaires. En plus il y croit. François Hollande ne l’a jamais laissé faire.

Aujourd’hui, il pousse Macron avec la même partition mais sans vouloir le laisser jouer les réformes jusqu’au bout. Emmanuel Macron tient un discours libéral, mais ne passe pas à l’acte ou alors à la marge.

Politiquement, François Hollande fait donc tout pour gêner Manuel Valls. Il pourrait même aller jusqu’à le sortir du gouvernement si les régionales sont désastreuses et le remplacer par... Emmanuel Macron. C’est l’homme que Jouyet garde en réserve. Et pourquoi pas ? 

Il tiendrait un acteur qui connait son texte sans vouloir tenir dans l’immédiat le premier rôle. Il est le plus jeune, comme Giscard autrefois.

Pendant ce temps-là, Manuel Valls n’aurait plus qu'à ronger son frein et prendre un coup de vieux. Pour les experts en "Hollandie", le seul qui pourrait concurrencer Macron dans l’hypothèse d’un remaniement en janvier serait le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve. Place Beauvau, on ne dit rien, mais on y croit. Macron 2 ou pas, les grandes manouvres sont bien lancées, il va falloir compter les points.

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