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Récidive sexuelle : la médecine 
au secours de la justice
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Affaire de la joggeuse

Le procès de Manuel Ribeiro Alves Da Cruz, violeur récidiviste accusé d'avoir enlevé, violé et assassiné une joggeuse de 42 ans en septembre 2009, s'est ouvert mercredi devant la cour d'assises de l'Essonne. Ce fait divers relance le débat sur la récidive sexuelle. Comment faire ?

Alexandre Baratta

Alexandre Baratta

Psychiatre, praticien hospitalier, Alexandre Baratta est expert auprès de la Cour d'appel de Metz, et expert associé à l'Institut pour la Justice. Il est également correspondant national de la Société médico-psychologique

 

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En France, la loi du 17 juin 1998 a créé la mesure d’injonction de soins. Cette loi permet de punir (peine de prison) et de soigner (sous contrainte) des auteurs de violences sexuelles. L’objectif des soins psychiatriques étant bien entendu de diminuer la récidive.

La récidive est donc l’une des préoccupations majeures de notre société. La plupart des études internationales de référence (portant sur plusieurs milliers de délinquants) estiment la récidive sexuelle à 13% à 5 ans et à près de 24% à 15 ans. De telles études n’ont jamais été réalisées en France et c’est bien dommage.

De nombreux délinquants sexuels présentent des déviances sexuelles : pédophilie, sadisme sexuel, exhibition par exemple. Déviances justifiant pleinement le recours aux soins psychiatriques. Une peine de prison n’est pas susceptible d’influer sur de tels troubles. L’une des questions les plus importantes est de savoir dans quelle mesure ces soins peuvent réduire la récidive des délinquants et criminels sexuels. De nombreuses études ont été réalisées pour tenter d’y répondre et ceci depuis les années 1970. Nous avons donc un recul de plus de 40 ans pour ébaucher un début de réponse.

Les psychothérapies dites « non spécifiques » ne sont pas associés statistiquement à une réduction de la récidive : ce résultat (ou plutôt absence de résultats) a été répliqué par différentes équipes indépendantes. Les seuls traitements ayant démontré une efficacité (limitée) sont les thérapies cognitivo-comportementales et les traitements anti-hormonaux. En fonction des études, ils permettent une réduction de la récidive sexuelle comprise entre 10 et 20%. Résultats peu élevés, mais significatifs et suffisamment importants pour être mis en pratique.

Hélas, la plupart des délinquants en injonction de soins en France bénéficient de psychothérapies simples (non spécifiques) : en attendre une efficacité en termes de réduction de récidive est donc illusoire. Par manque de formation, et par idéologie, de nombreux psychiatres se refusent à prescrire les traitements anti-hormonaux, traitements pourtant recommandés par la Haute Autorité de Santé dans certaines indications. Une récente étude publiée dans les Annales Médico Psychologiques révèle que 15% seulement des psychiatres interrogés connaissaient ces dernières recommandations publiées en 2009.

En conclusion, nous rejoignons les recommandations de l’Académie de Médecine publiées en juin 2010. Elles préconisent de définir une politique basée avant tout sur la sanction pénale : « Les traitements à visée hormonale ou psychologique ayant une efficacité très partielle et quelquefois des effets secondaires marquants ne peuvent être le seul outil d’une politique de prévention de la récidive». 

Article d'Alexandre Baratta concernant l'évaluation et la prise en charge des délinquants et criminels sexuels. (Institut Pour la Justice,  janvier 2011)

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