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Qui sont ces rebelles "modérés" soutenus par les USA qui décapitent un enfant près d'Alep ?
©Reuters

THE DAILY BEAST

Ce genre d'horreur est associé à l'Etat islamique. Mais, cette fois, ce sont des rebelles armés par les Etats-Unis qui coupent la tête d'un garçonnet.

Katie Zavadski

Katie Zavadski

Katie Zavadski est reporter pour The Daily Beast.

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Copyright The Daily Beast - auteur Katie Zavadski (traduction Gilles Klein)

En Syrie, des membres d'un groupe rebelle soutenu par les Américains publient la décapitation d'un  jeune enfant dans une vidéo macabre. La séquence, mise en ligne mardi, montre des membres du Harakat Nour al-Din al-Zenki, et un enfant capturé à Handarat, près d'Alep. Le jeune garçon qui semble être pré-adolescent est exécuté à l'arrière d'une camionnette.

Cette vidéo horible a provoqué une indignation générale sur les réseaux sociaux, tandis que les chefs de ce groupe qui a été financé et équipé par les Etats-Unis promettent de faire une enquête. Mais, il faut noter ce groupe ne reçoit plus ce genre de soutien des USA.

"Même s'ils ne reçoivent plus l'aide américaine, cela montre le genre d'impasse morale dans laquelle nous pouvons nous retrouver quand nous essayons d'intervenir en Syrie" explique au Daily Beast, Daveed Gartenstein, expert en terrorisme, auprès de la Foundation for Defense of Democracies (Fondation pour la Défense des Démocraties).

Il y a deux séquences montrant cet événement. La première montre cinq militants entourant l'enfant. Puis dans la seconde, l'un d'eux se tient au dessus de lui dans le camion, et coupe sa tête avec un couteau ébréché, puis la brandit en l'air.

Les informations concernant quel groupe, exactement, fait partie des "modérés" soutenus par la coalition animée par les USA, sont contradictoires. Et certains critiques ont prévenu : la situation évolue au grè des alliances sur le terrain, et il est donc très difficille de dire quels groupes sont vraiment d'accord avec les orientations américaines.

Le groupe Zenki était encore sur la liste blanche en décembre 2014. Une enquête du groupe de presse McClatchy évoque la décision américaine de suspendre les paiements et les livraisons d'armes à certaines factions rebelles. Ce rapport estime que cette décision ne concerne pas le groupe Zenki et le Harakat d'Alep. Près de 1 000 combattants Zenki sont payés par la CIA selon cet article.

Un commandant d'une des factions rebelles qui se battent sur le terrain a précisé que les combattants étaient payés 150 dollars par mois, et que la suspension de l'aide était, en fait, une réponse à l'avancée du Front al-Nosra, affilié à al-Quaeda en Syrye. Car les extrémistes islamistes d'al-Nosra ont pris des armes américaines à des groupes soutenus par les USA.

Thomas Joscelyn, un autre consultant de la Foundation for Defense of Democracies a expliqué au Daily Beast, que le groupe Zenki n'était pas vraiment un ennemi d'al-Qaeda. Zenki aurait une longue histoire de relations vec le Front al-Nosra, un aspect qui a été mis de côté par les partisans d'un soutien aux groupes modérés.

"Idélogiquement, c'est vraiment, au minimum, un groupe islamiste pur et dur" a ajouté Joscelyn.

Il a recensé les nombreuses relations entre al-Nosra et le mouvement Zenki, y compris une critique de al-Nosra sur Twitter après un face à face à un check-point. Mais al-Nosra a répondu en demandant un jugement conforme à la Charia.

Le mouvement Zenki a accepté toutes les conditions et publié une déclaration éclairant sa collaboration avec al-Nosra.

A une autre occasion, le leader de Zenki, Toufic Shehab al-Dine a félicité al-Nosra qui avait décimé un autre groupe soutenu par les Américains. al-Dine a déclaré, à propos de ce groupe "ils sont corrompus, il faut les détruire" selon Joscelyn.

Pourtant le mouvement Zenki utilisait encore des missiles américains TOW courant 2015, qui étaient fournis par un centre d'approvisionnement géré par des officiels de la CIA.

Ce n'est qu'en septembre 2015, qu'un commandant de groupe a déclaré à Voice of America qu'ils manquaient d'armes. Et le magazine Foreign Policy a indiqué que ce groupe recevait aussi des fonds de l'Arabie Saoudite.

Un rapport d'Amnesty International explique que Zenki était responsable d'interrogatoires accompagnés de tortures et de confessions forcées, à Alep où il est basé. Un militant qui informe Amnesty International sur les abus a dit qu'il pouvait entendre les cris de personnes torturées quand elles étaient détenues par ce groupe, même s'il ne pouvait pas voir ce qui se passait ayant les yeux bandés. D'autres ont témoigné avoir été menacés pour avoir critiqué ce groupe sur Facebook.

Encore plus troublant, le rapport indique que le mouvement Zenki est accusé d'avoir kidnappé des évéques orthodoxes syriens en mission humanitaire, et de les avoir livrés au front al-Nosra. Et enfin des militants disent avoir été torturés et obligés de signer de fausses confessions.

Le rapport indique, lui aussi, que Zenki a été l'un des bénéficiaires de l'aide du MOM, le commandement mis en place par les USA et leurs alliés. Zenki "aurait cessé de recevoir de l'argent en septembre 2015 quand il a joint ses forces avec le Bataillon de la ville d'Alep et le mouvement al-Zaher Bibers, accusés d'avoir enlevé deux travailleurs humanitaires italiens" ajoute Amnesty.

Quoiqu'il en soit, les responsables de Zenki, ont publié un communiqué condamnant cette décapitation. Ils précisent avoir formé un comité chargé d'enquêter sur les circonstances qui ont permis qu'un tel crime soit commis. Ce genre d'éxécution publique faite par des groupes rebelles sert naturellement les intérêts du président syrien al-Assad, qui souhaite que tous les groupes rebelles soient vus comme des extrémistes assoiffés de sang.

Malgré tout, les groupes djihadistes dépendent de leur réputation dans les zones qu'ils contrôlent, et de telles actions vont au delà des limites acceptables.

"Que peuvent-ils faire ? Dire nous sommes tous favorables à la décapitation des enfants ? Non ! Seul Daech peut se permettre de le dire" conclut Joscelyn

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