Que financent vraiment les augmentations du prix du timbre ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Un document interne de La Poste, révélé par Le Parisien, indique que le prix du timbre devrait augmenter de manière importante dans les cinq prochaines années.
Un document interne de La Poste, révélé par Le Parisien, indique que le prix du timbre devrait augmenter de manière importante dans les cinq prochaines années.
©Reuters

Philatéliste

D'après un document interne publié par le journal Le Parisien, la Poste prévoit d'augmenter fortement ses tarifs dans le secteur du courrier au cours des cinq prochaines années. Une stratégie qui peut paraitre surprenante voire paradoxale en pleine crise de l'envoi postal.

Erwan Le Noan

Erwan Le Noan

Erwan Le Noan est consultant en stratégie et président d’une association qui prépare les lycéens de ZEP aux concours des grandes écoles et à l’entrée dans l’enseignement supérieur.

Avocat de formation, spécialisé en droit de la concurrence, il a été rapporteur de groupes de travail économiques et collabore à plusieurs think tanks. Il enseigne le droit et la macro-économie à Sciences Po (IEP Paris).

Il écrit sur www.toujourspluslibre.com

Twitter : @erwanlenoan

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Atlantico : Un document interne de La Poste, révélé par Le Parisien, indique que le prix du timbre devrait augmenter de manière importante dans les cinq prochaines années. Que finance réellement la hausse du prix du timbre ?

Erwan Le Noan : Le plus étonnant dans les informations révélées par la presse, c’est que cette augmentation du prix du timbre n’est pas justifiée par un meilleur service, mais par des pertes liées à la baisse des flux de courriers, en raison notamment du développement des e-mails. En fait, La Poste va faire payer plus cher parce qu’elle perd des clients ! On se demande pourquoi elle ne cherche pas plutôt à réduire ses coûts…

L’autre argument avancé, semble-t-il, par La Poste, c’est qu’il lui faut financer le « service universel » qui correspond à l’obligation qui pèse sur elle de délivrer le courrier même dans un petit village reculé. C’est une garantie du service public. On est obligé de la croire… mais on ne voit pas bien pourquoi une autre entreprise ne pourrait pas accomplir cette mission (en étant elle aussi éventuellement compensée).

Cela veut-il dire que La Poste préfère augmenter les tarifs payés par les consommateurs plutôt que de s'adapter en interne pour faire face au recul de l'activité courrier ? Cela serait-il possible dans le cadre d'une entreprise privée soumise à la concurrence ?

Le problème dans cette histoire, c’est en effet qu’il n’y a aucune concurrence. Le client est captif : il n’a pas d’autre choix que de passer par La Poste pour envoyer son courrier… Dans une situation de concurrence, on peut très bien imaginer qu’une (ou plusieurs) entreprise(s), publique(s) ou privée(s) soi(en)t soumise(s) à l’obligation de service universel et reçoive(nt) pour cela des compensations, et que ces entreprises soient en compétition pour le reste du courrier. Au moins le consommateur aurait le choix et pourrait comparer.

En étant imaginatif et optimiste, on serait peut-être même surpris de voir des postes locales se mettre en place dans certaines régions, ou zones isolées, soit totalement privées, soit collaboratives animées par des citoyens. Il ne faut jamais désespérer de l’inventivité humaine mais pour cela, il faut lui permettre de s’exprimer.

La hausse des tarifs des timbres pour s'adapter à la baisse du trafic postal reflète t-elle le besoin de privatisation de certaines entreprises publiques ? Est-il cependant possible de privatiser La Poste en ce sens où une entreprise privée pourrait refuser de desservir certaines villes isolées ? A défaut d'une privatisation, peut-on aligner les méthodes de gouvernance des entreprises publiques sur celles du secteur privé ?

La question n’est pas vraiment celle de la privatisation. Une entreprise privée qui serait protégée par une rente pourrait très bien être sous performante et bien pire que La Poste. Qu’elle soit publique ou privée, une entreprise en monopole n’a pas (ou peu) d’incitation être à être stimulée, à être plus performante. Dans le cas de La Poste, il faut rappeler qu’elle a changé, profitant même de son statut pour proposer des services commerciaux qui n’ont rien à voir avec ses missions de services publics (et renforçant peut être même par là sa position hégémonique…). La vraie question, c’est celle de la mise en concurrence, qui seule permet la stimulation, la baisse des prix (soit parce qu’on choisit d’être plus efficace, soit parce que certaines entreprises s’engagent dans la voie du low cost) et la course à la qualité (parce que certaines entreprises choisiront la voie du luxe, du service "supérieur" pour vos colis).

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