Pourquoi tant de haine à l’égard de Jacques Toubon ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Jacques Toubon.
Jacques Toubon.
©Reuters

Opération de charme

Jacques Toubon devrait succéder à Dominique Baudis au poste de Défenseur des droits. Une nomination d'un ancien ministre de droite par la gauche qui fait grincer les dents au parlement.

Gilles Gaetner

Gilles Gaetner

Journaliste à l’Express pendant 25 ans, après être passé par Les Echos et Le Point, Gilles Gaetner est un spécialiste des affaires politico-financières. Il a consacré un ouvrage remarqué au président de la République, Les 100 jours de Macron (Fauves –Editions). Il est également l’auteur d’une quinzaine de livres parmi lesquels L’Argent facile, dictionnaire de la corruption en France (Stock), Le roman d’un séducteur, les secrets de Roland Dumas (Jean-Claude Lattès), La République des imposteurs (L’Archipel), Pilleurs d’Afrique (Editions du Cerf).

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François Hollande a pressenti l’ancien Garde des Sceaux pour devenir Défenseur des droits. Une intention qui ne plait pas du tout au PS. Toubon peut-il être victime du veto des parlementaires socialistes ?  Devant  cette campagne pourrait-il jeter l’éponge comme le lui suggère le président de la Commission des Lois, Jean-Jacques Urvoas ?

En  choisissant Jacques Toubon comme Défenseur des droits, François Hollande a-t- il voulu créer un équilibre avec la nomination de la socialiste Adeline Hazan comme Contrôleuse des prisons ? C’est bien possible. Tant le  goût du chef de l’Etat pour le consensus est connu. Ainsi, comme son prédécesseur Nicolas Sarkozy, il  serait un adepte de l’ouverture, quitte à mécontenter fortement son camp. Quoi ? Toubon, l’ancien Garde des Sceaux, qui avait dépêché en 1995, un hélicoptère dans l’ Himalaya pour retrouver le procureur Davenas en train de faire de l’alpinisme et le convaincre de ne pas enquêter sur Jean Tiberi ! Quoi, Toubon, l’ancien garde des Sceaux qui a pris des positions contestées sur l’homosexualité ! Même si Toubon s’est déclaré favorable à l’abolition de la peine de mort en 1981, le choix du président de la République suscite une franche hostilité chez de nombreux socialistes. " Ca ne passe pas " dit le député du Cher, Yann Galut, qui n’hésite pas à parler de " cauchemar ", tandis qu’Alexis Bachelay, député des  Hauts-de-Seine demande à ses collègues de la Commission des Lois des deux assemblées parlementaires d’opposer un veto aux desiderata de François Hollande. Après tout, c’est de bonne guerre. Sauf qu’une pétition, prise à l’initiative d’un socialiste quasi-inconnu, qui circule depuis quelques jours, signée par 90 000 personnes – dont Cécile Duflot, Roselyne Bachelot, Marie-Noëlle Lienemann- revient à la charge. Avec un mot d’ordre clair : Toubon ne doit  pas succéder au journaliste de télévision Dominique Baudis – décédé en avril dernier  comme Défenseur des droits. Un procédé détestable, cette pétition, tant elle s’apparente à un lynchage médiatique. Heureusement, la Ministre de la Culture, Aurélie Filipetti est montée au front pour défendre l’ancien garde des Sceaux : " Je respecte le choix du Président de la République. Jacques Toubon, que je vois depuis deux ans  en tant que président  de la Cité nationale de l’histoire de l’immigration et président du conseil culturel franco-allemand, s’est extrêmement investi à la défense de la culture à l’échelle européenne et il le fait sans aucun sectarisme. " Elle aurait pu ajouter que Toubon est un excellent juriste, qualité précieuse pour le poste de Défenseur des droits… Malgré cette campagne aux relents peu ragoutants, l’ancien député de Paris peut-il être recalé par le Parlement ? Tout est possible dans ce climat qui se détériore de jour en jour entre le PS et l’exécutif. Encore faut-il que les 3/5 ème de chaque commission des lois du Parlement, conformément à la loi du 23 juillet 2010, refusent d’entériner le choix du chef de l’Etat. Toubon devrait être fixé le 2 juillet, tout comme Adeline Hazan, proposée au poste de contrôleuse générale des lieux de privation de liberté. Encore qu’il soit possible que la commission des lois du Sénat ne se réunisse que le 9 juillet. Dans ce cas, les bulletins de vote du 2 juillet à la commission des lois de l’Assemblée nationale seraient placés sous pli cachetés et le verdict, tant pour Jacques Toubon que pour Adeline Hazan ne serait connu que le 9 juillet.

Quoiqu’il en soit,  pour l’ancienne présidente du Syndicat de la Magistrature, cette nomination apparait comme un recasage, conséquence de son éviction de la mairie de Reims par l’UMP Arnaud Robinet lors des municipales de mars dernier. Certes, Adeline Hazan connait le monde pénitentiaire puisqu’elle a occupé, de 1980 à 1983, les fonctions de juge de l’application des peines (JAP) à Chalons-en Champagne. Mais si elle veut réussir, elle devra montrer son indépendance et  sa capacité à résister au pouvoir,  comme l’a fait son prédécesseur, l’emblématique conseiller d’Etat, Jean-Marie Delarue. Pour l’heure, à l’inverse de ce qui se pourrait se passer pour Toubon, la candidature de l’ex-édile de Reims, même si elle n’emballe guère l’opposition, ne devrait pas, à moins d’un coup de théâtre, être retoquée. En revanche, du côté des nominations dans le corps diplomatique qui ne nécessite pas le recours au feu vert du Parlement, François Hollande poursuit, comme l’a révélé Le Monde, son opération de charme en direction des juppéo-chiraquiens. Ainsi, Maurice Gourdault-Montagne, ancien directeur de cabinet d’Alain Juppé à Matignon (1995-1997) puis ambassadeur à Tokyo et Londres, actuellement en poste à Berlin, se voit offrir une ambassade prestigieuse : celle de Pékin. Pour sa part, Catherine Colonna, ancienne ministre déléguée aux Affaires européennes après avoir été porte-parole pendant 9 ans – un record- de Jacques Chirac  à l’Elysée, part pour le Palais Farnèse. En clair, elle est promue ambassadeur à Rome. Enfin, un autre ancien collaborateur de Jacques Chirac et d’Alain Juppé,  Bernard Emié,  successivement ambassadeur à Aman, Beyrouth, Ankara et jusqu’à aujourd’hui Londres, se voit affecté à l’un des postes les plus délicats et les plus sensibles de la diplomatie : l’ambassade de France à Alger.

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