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Pourquoi il faut soutenir le secrétaire d’état au commerce extérieur contre les opposants forcenés du libre échange
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Un besoin de lucidité

Matthias Fekl, en charge du commerce extérieur, subit actuellement de vives critiques pour ne pas avoir soutenu son homologue allemand, opposé au traité de libre-échange (TAFTA). Les arguments traditionnels invoqués contre la libéralisation omettent cependant les bénéfices économiques importants qu'un tel traité engendrerait, à un moment où la zone euro n'a pas les moyens de s'en passer.

Guillaume Lagane

Guillaume Lagane

Guillaume Lagane est spécialiste des questions de défense.

Il est également maître de conférences à Science-Po Paris. 

Il est l'auteur de Questions internationales en fiches (Ellipses, 2021 (quatrième édition)) et de Premiers pas en géopolitique (Ellipses, 2012). il est également l'auteur de Théories des relations internationales (Ellipses, février 2016). Il participe au blog Eurasia Prospective.

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Le jeune secrétaire d’Etat au commerce extérieur est sous le feu des critiques : il n’aurait pas soutenu l’Allemagne dans son opposition à un mécanisme de recours aux tribunaux privés introduit dans le grand projet de traité de libre-échange entre l’Union européenne (UE) et les Etats-Unis. Ce mécanisme, l’ISDS (Investor State Dispute Settlement), était soutenu par de nombreux Etats européens, dont le Royaume-Uni, car il est fréquemment employé, dans les accords commerciaux, pour régler les différends. A l’inverse, il est accusé par ses détracteurs de fragiliser les Etats en "privatisant" la justice.

En réalité, derrière la polémique liée à l’ISDS, c’est le projet même de "grand marché transatlantique" qui est visé. Déjà, tout ce que la France compte de forces anti-libre-échangistes, du Front National au Front de Gauche, en passant par les associations anti-mondialisation (ATTAC) et les innombrables lobbys professionnels, se mobilisent contre le projet d’accord de libre échange transatlantique (TAFTA : Trans Atlantic Free Trade Agreement). Les arguments traditionnels, utilisés à chaque vague de libéralisation, circulent à nouveau : dumping social, dégâts écologiques, menaces sur la santé publique, etc. Le tout corsé par le thème, toujours florissant, de l’antiaméricanisme.

Pourtant, le TAFTA conserve quelques vertus. Sur le plan économique, ses bénéfices sont évidents : l’UE et les Etats-Unis représentent 60% du PIB mondial, un tiers du commerce global. Ils ont tout intérêt à commercer ensemble. Une étude estime le bénéfice d’une libéralisation à 545€ par an de revenus disponibles additionnels pour une famille européenne de quatre personnes. Mais, comme toujours avec le libre-échange, ces effets positifs, qui touchent tout le monde, c’est-à-dire personne, seront dans les perceptions largement occultés par les effets négatifs sur l’activité des secteurs touchés par l’accord, mécontents et le faisant savoir.

Sur le plan géopolitique, à l’heure où l’Amérique se redéploie vers l’Asie avec sa stratégie du pivot et quitte militairement l’Europe, il semble également utile de rapprocher les deux rives de l’Atlantique. La politique actuelle de la Russie, qui, en froid avec l’UE depuis l’affaire ukrainienne, se rapproche de la Chine en lui proposant ses exportations énergétiques, plaide également pour un accès plus large de l’Europe aux ressources américaines. Enfin, dans un contexte de ralentissement de la croissance des grands émergents (Brésil, Inde), une relance de l’activité des économies occidentales est à souhaiter pour le bénéfice de tous.   

Matthias Fekl, qui simple député flirtait parfois avec la gauche du parti socialiste, critiquant un gouvernement trop "orthodoxe" sur le plan budgétaire, se retrouve comme ministre avec un mandat ambitieux et quelque peu contre nature pour un PS ambivalent à l’égard du libre-échange. Sa tâche n’a rien d’évident pour un élu du Lot-et-Garonne dont l’électorat, à l’image de la société française, est sans doute plus avide de protectionnisme agricole et de subventions publiques diverses que d’un très technocratique "abaissement des barrières non tarifaires". Mais, pendant international de la loi Macron, le TAFTA peut être favorable à l’économie française en lui ouvrant les marchés Outre-Atlantique et doit être, à cet égard, soutenu.

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