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Pôle Emploi en grève contre l’efficacité numérique
©Reuters

Osé

Ah, vraiment, ce pays est croquignolet : les salariés d’un établissement public destiné à l’emploi se mettent en grève parce que l’évolution technologique menace leur emploi…

Hash H16

Hash H16

H16 tient le blog Hashtable.

Il tient à son anonymat. Tout juste sait-on, qu'à 37 ans, cet informaticien à l'humour acerbe habite en Belgique et travaille pour "une grosse boutique qui produit, gère et manipule beaucoup, beaucoup de documents".

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Ce dimanche, j’évoquais la gréviculture et nos syndicats si efficaces pour conserver leur emploi mais pas le travail dans les entreprises où ils sévissent. Aujourd’hui, l’actualité me sert sur un plateau un nouvel épisode rebondissant de leurs actions si délicieusement en phase avec la société et le monde réels.

On apprend en effet que nos gréviculteurs professionnels de chez SNU-FSU, FO, la CGT et Solidaires ont appelé les agents de Pôle Emploi à des débrayages lundi 6 mars. Avouons au passage que faire la grève dans la boutique dont l’objectif est de trouver un emploi permet d’élever le cynisme au rang d’art, d’autant plus lorsqu’on découvre la raison qui anime nos pépiniéristes du piquet de grève : la numérisation avancée de l’ensemble des activités de l’établissement public impose de redéployer 2500 à 3000 conseillers Pôle Emploi vers des activités de suivi et d’accompagnement des chômeurs.

Et ça, c’est la goutte de sueur qui fait déborder le syndivase : cette « dématérialisation à outrance » leur fait redouter la disparition complète de certains postes.

Rendez-vous compte : avec ce numérique qui s’insinue partout, Paul Employ va subitement devenir efficace au point de donner plus de temps aux agents pour s’occuper directement des chômeurs ; 12.000 d’entre eux sont en effet employés à calculer l’indemnisation des chômeurs, alors que les avancées informatiques permettent d’en réduire le nombre. C’est proprement scandaleux, mais ce n’est pas tout : une partie ces conseillers va devoir modifier sa façon de travailler, ce que redoute par dessus tout Jean-Charles Steyger du syndicat SNU-FSU (à vos souhaits), et ce alors que leur activité existe « depuis plus de 40 ans ».

Quelle tristesse ! 40 ans de savoir faire quasi-artisanal, de petits cerfas minutieusement concoctés, de formulaires en triplicatas tendrement assemblés par des attaches-trombones ouvragés de haute main, le tout dans l’ambiance studieuse des Ateliers Nationaux de Fabrication de Chômeurs ! Remettre en cause Paul Employ, c’est mettre en péril ce qui est devenu un véritable savoir-faire, une marque de fierté nationale, l’emblème de tout un pays, et, pire que tout, en introduisant l’informatique, que dis-je, en uberisant l’établissement à coup de simplification numérique, en laissant le chômeur utiliser Le Bon Coin, appeler un ami ou utiliser le 50/50. Quelle horreur !

Ah, vraiment, ce pays est croquignolet : les salariés d’un établissement public destiné à l’emploi se mettent en grève parce que l’évolution technologique menace leur emploi… Difficile de ne pas y voir la synthèse parfaite des problèmes qui minent la France : syndicalisme idiot, grève contre-productive et carrément cynique dans le contexte, refus du changement, combat d’arrière-garde contre le progrès, repli sur soi.

Qui que soit l’élu en mai de cette année, on sent nettement la taille de l’obstacle qu’il (ou elle ?) devra surmonter.

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