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Plaidoyer pour une République plus démocratique. Jean-François Chemain, « Non, la France ce n'est pas seulement la République !: Le coup de gueule d'un enseignant ».
Plaidoyer pour une République plus démocratique. Jean-François Chemain, « Non, la France ce n'est pas seulement la République !: Le coup de gueule d'un enseignant ».
©GERARD JULIEN / AFP

Bonnes feuilles

Jean-François Chemain publie « Non, la France ce n'est pas seulement la République !: Le coup de gueule d'un enseignant » aux éditions Artège. La France ne se résume pas seulement à la seule République, « ses valeurs » et les illusions perdues de son contrat social. Il faut donner à aimer aux enfants de France, la richesse et la précision de sa langue, la profondeur de son histoire. Extrait 1/2.

Jean-François Chemain

Jean-François Chemain

Diplômé de l'IEP de Paris, agrégé d'Histoire, docteur en Droit et docteur en Histoire, JFC, après avoir été consultant dans des cabinets anglo-saxons, puis cadre dirigeant dans un grand groupe industriel, a choisi il y a près de 10 ans de devenir enseignant dans un collège de Zone d'Education Prioritaire. Il est l'auteur de plusieurs livres, tous publiés chez Via Romana : La Vocation chrétienne de la France (2010), Kiffe la France (2011), Une autre Histoire de la Laïcité (2013) et L'Argent des Autres (2015).

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Samuel Paty serait encore vivant si Abdoullakh Anzorov n’avait pas été en France. J’ai bien conscience, écrivant cela, de risquer l’accusation d’encourager à la « haine », mais ce que j’énonce est une évidence. De même que seraient vivantes les trois victimes de la basilique de Nice, le 29 octobre, si l’on n’avait pas fait entrer leur assassin, un jeune Tunisien, quelques jours plus tôt.

Un sondage récent que j’ai évoqué, publié par France Info, station de radio publique, donc républicaine, révèle que 70% des Français « trouvent qu’il y a trop d’étrangers en France ». Je cite l’intégralité de l’information car elle est éloquente, dans le fond comme dans la forme :

Ils sont 62% à estimer que l’on « ne se sent plus chez soi comme avant ». Par ailleurs, 29% seulement jugent que « l’immense majorité des immigrés qui se sont installés en France ces trente dernières années est bien intégrée ». Pour 46%, « pour réduire le nombre de chômeurs, il faut réduire le nombre d’immigrés ». Enfin, 57% jugent que « le racisme anti-Blanc est assez répandu en France ». La religion musulmane est particulièrement visée. Elle est considérée par 74% des sondés comme intolérante et incompatible avec la société française. Selon Michel Winock, « les ingrédients du populisme sont là et dépassent les rangs des électeurs de Marine Le Pen ».

Le fond se passe de commentaire : les Français, dans leur immense majorité, souhaitent qu’on mette un terme à l’immigration. Que leur rétorque-on? « Populisme », « Le Pen ».

À une demande que l’on pourrait qualifier de démocratique, l’article répond par un néologisme méprisant, et l’assimilation immédiate à l’extrême droite. Qu’est-ce que le populisme, pourtant? La définition qu’en donne Wikipédia y voit une approche politique opposant le peuple aux élites, empreinte de démagogie, prônant des solutions simplistes, et in fine rappelant la naissance des fascismes. Mais à quel moment la demande, brute, de ces 70% de Français fait-elle référence aux élites? Ne sont-ce pas plutôt ces élites qui la balaient d’un revers de main? Le Japon est-il moins démocratique que nous pour s’être refusé, jusqu’à décembre 2018, à accueillir des immigrés?

On peut ici faire le parallèle avec une autre demande, réputée sulfureuse, du peuple français : le rétablissement de la peine de mort. Elle a été abolie en 1981 – c’était une promesse du candidat François Mitterrand –, alors même que 63% des Français étaient favorables à son maintien. Aujourd’hui, révèle un sondage publié par BMF TV, ils seraient 55% à souhaiter son rétablissement. Va-t-on les écouter? Sans doute pas, la question est trop bien verrouillée juridiquement.

Le 29 mai 2005, 55% des Français ont voté « Non » au référendum sur le projet de Constitution européenne. Résultat sans appel, qui n’empêcha pourtant pas le président Chirac, tout en prenant acte de ce refus, de réaffirmer que « la France tiendrait sa place dans l’Union dans le respect de ses engagements », et qu’il souhaitait donner une impulsion nouvelle et forte à l’action gouvernementale. Autrement dit : « Causez toujours, vous m’intéressez. » Avant que son successeur Nicolas Sarkozy ne réussisse finalement à imposer à la population française le traité de Lisbonne, approuvé par l’Assemblée nationale le 7 février 2008. Selon l’ancien président Valéry Giscard d’Estaing, qui s’en réjouissait, celui-ci était « une quasi-copie parfaite du traité de 2005 ».

Ces trois exemples ne touchent pas seulement au quotidien des Français, dont beaucoup ont le sentiment d’être devenus étrangers dans leur pays. Ces Français s’indignent de voir commettre des meurtres par des assassins récidivistes remis en liberté, et se voient socialement déclassés dans l’univers concurrentiel promu par l’Union européenne. Ils affectent aussi, et peut-être surtout, la croyance qu’ils ont de pouvoir être, chez eux, le fondement de la souveraineté. Quoi d’étonnant, dès lors, s’ils se désintéressent de la République, et que l’abstention progresse d’élection en élection jusqu’à devenir le parti majoritaire? Ce qui permet à des élus de moins en moins représentatifs de prendre des décisions de plus en plus déconnectées de la volonté populaire.

Ce sentiment a encore été aggravé par la gestion opaque et autoritaire de l’actuelle pandémie qui, selon une étude publiée par le groupe de recherche du journal The Economist, a fait régresser la France du statut de « démocratie à part entière » à celui de « démocratie défaillante ».

Il ne suffit donc pas de s’autoproclamer le pays de la liberté et des Droits de l’homme, encore faut-il que cela s’inscrive dans les actes. Certes, la démocratie est considérée avec méfiance depuis que les nazis ont, en 1933, accédé démocratiquement au pouvoir. Mais à vouloir maintenir définitivement la volonté populaire sous le couvercle d’acier des bons sentiments de l’élite, on va finir par faire sauter la marmite. « À vouloir étouffer les révolutions pacifiques, on rend inévitables les révolutions violentes »‚ a dit Kennedy.

Il faut mettre plus de démocratie dans notre République. Je laisse aux juristes la réflexion sur les moyens de le faire, mais il ne fait pas de doute que laisser plus de place aux référendums, y compris sur les questions qui peuvent choquer certains, et avoir le courage d’en mettre en œuvre les décisions, fait partie de la solution.

Extrait du livre de Jean-François Chemain, « Non, la France ce n'est pas seulement la République !: Le coup de gueule d'un enseignant », publié aux éditions Artège.

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