Peut-on se fier aux classements des vins ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Un verre de vin.
Un verre de vin.
©Reuters

Info ou Intox ?

Le classement des vins de Saint-Emilion, attaqué au mois d'avril par trois candidats déchus pour prise illégale d'intérêt, fera l'objet d'une nouvelle plainte à la fin de l'été, la première étant restée lettre morte.

Fabrizio Bucella

Fabrizio Bucella chronique la science et le vin. Docteur en physique et professeur des universités à l'université libre de Bruxelles, il tient une chronique pour Le Point "Le prof en liberté". Chaque semaine, on le retrouve dans le poste de radio et télévision belge de service public (RTBF). Sur les réseaux sociaux, il publie quotidiennement une vidéo ludique sur le vin et la science. Ses comptes sont suivis par plus de 200 000 abonnés.

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Atlantico : Alors que les trois châteaux déchus du classement des vins de Saint-Emilion continuent leur combat judiciaire entamé en avril 2013, estimant que certains juges étaient également parties. Les classements des vins sont-ils vraiment fiables ?

Fabrizio Bucella : Cela dépend de quels classements il est questions. Si on pense au classement de Saint-Emilion (rive droite du Bordelais), il appartiendra en dernier ressort à la justice ordinaire de trancher s’il y a eu des irrégularités ou à tout le moins une apparence de partialité dans le chef de l’un ou l’autre juge. Bien entendu, cela laisse dès aujourd’hui une image brouillée de l’opération. Si l’on pense au classement impérial du Médoc de 1855, sur l’autre rive de Bordeaux, il n’est aujourd’hui pas remis en cause. Il est des châteaux qui se vendent mieux que leur niveau de classement ainsi que l’inverse. Mais le classement de 1855 en tant que tel est accepté par l’ensemble de la profession.

Quels critères sont pris en compte ? Comment départage-t-on un très grand vin d’un autre ?

Dans le classement de Saint-Emilion, les critères pris en compte sont les suivants : (1) la qualité des vins jugée par dégustation des échantillons; (2) la notoriété du cru; (2) l’assiette foncière et l’homogénéité du terroir; (4) la conduite du vignoble. Comme on le voit, l’appréciation de ces critères est laissée au jugement des experts désignés. C’est sur le niveau d’indépendance de ceux-ci que sont fondés une partie des arguments de plaignants.

Quelle est l’impact des différents classements des vins sur les ventes des viticulteurs ?

L’impact est énorme. Si vous êtes un grand cru classé A à Saint-Emilion (le haut du classement), votre prix de vente peut être multiplié par 10 ou même 20 par rapport à un simple grand cru classé. Ceci sans même faire de comparaison avec des vins de Saint-Emilion qui ne sont pas des crus classés.

Le classement de Saint-Emilion comprend les Crus Classés A (4 vins), les Crus Classés B (15) et les Crus Classés (64). Les autres vins de Saint-Emilion, même s’ils peuvent prétendre à la mention Grand Cru, ne sont pas classés.

Ces classements sont-ils politiques avant d’être au service des consommateurs ?

C’est la bonne question. Ces classements sont surtout au service des châteaux et des exploitations vinicoles. Leur premier résultat est de multiplier très rapidement la valeur foncière du terrain sur lequel est situé un domaine qui soit intègre le classement pour la première fois, soit est promu au sein de celui-ci. Ces classements sont de formidables outils à fabriquer de la valeur ajoutée. Fondamentalement, le coût de production de grappes de raisin fermentées et enfermées dans un contenant en verre de soixante-quinze centilitres ne change pas avant et après le classement. Le prix de vente par contre oui. A voir le très peu de cas de châteaux qui ont été "déclassés", de mémoire quatre ou cinq, on est en droit de se demander si finalement on n’a pas été tenté de contenter un maximum de participants.

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