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Petit rappel et humble requête à l’attention de notre Ministre des Finances et notre secrétaire d’Etat aux PME
©BERTRAND GUAY / AFP

Les entrepreneurs parlent aux Français

Bruno Le Maire aurait obtenu que la loi Pacte soit prioritaire. Le contenu du texte devra contenir les ingrédients suivants afin de permettre aux PME d'assurer leurs besoins vitaux : de l'amour, du paiement, du chiffre d'affaire, du digital et des compétences.

Denis Jacquet

Denis Jacquet

Denis Jacquet est fondateur du Day One Movement. Il a publié Covid: le début de la peur, la fin d'une démocratie aux éditions Eyrolles.  

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J'entends malgré la distance et le décalage horaire, de petits bruissement français qui indiqueraient que Bruno Le Maire, aurait obtenu du président la concession, la reconnaissance, du fait que sa loi Pacte, soit prioritaire. C’est en soi, bien évidemment, une bonne nouvelle et en même temps quelque chose d'assez inquiétant.

La bonne nouvelle c'est qu'il y a peu (ou pas ?) de gouvernement, ces 30 dernières années, qui ait eu la faiblesse de considérer, comme facteur déterminant de la préparation de ses Lois, que ce qui constitue la seule ressource net n’emplois dans ce pays, depuis plus de 15 ans, puisse représenter un quelconque intérêt. C’est donc un plaisir énorme de constater que tout arrive, et nous n’allons pas bouder notre plaisir.
Il est néanmoins intéressant de voir qu’à l’heure où la croissance annoncée n'est pas au rendez-vous et que le chômage ne diminue toujours pas, il y ait besoin d'un degré de conviction important, pour faire comprendre au plus haut niveau à quel point injecter du muscle et de la souplesse à nos PME est la clé de notre avenir.
Puisque nous parlons d'inquiétude il est difficile de comprendre qu'une loi qui était annoncée pour le printemps n'arrive, ni au printemps, ni en été et peut-être pas à la rentrée, alors qu'elle est d'une urgente nécessité. Comment peut-on avoir besoin de convaincre que sans la puissance de deux millions d'entreprises, souvent prêtes à embaucher, si enfin, on les laisse travailler en paix, il n’y aura pas de miracle français ? On n'imagine plutôt le contraire à savoir que cette loi ne serait pas indispensable!! 
Je ne vais pas ajouter au concert larmoyant de tous ces amers, de gauche ou de droite, qui reprochent à Emmanuel Macron de ne pas avoir fait en 1 an ce qu'ils n'ont pas fait en 30. Bien évidemment. Mais, force est de constater qu'il reste toujours deux trous béants dans la mécanique actuelle : les PME bien évidemment et le digital. 
Nous trouvons  d’ailleurs sur ce point, un autre intérêt d'urgence nationale, dans la conjugaison des deux facteurs, puisque nos PME française sont certainement parmi les plus en retard dans l'évolution digitale dans toute l’Europe. Si nous voulons en faire un élément moteur de rebond et de croissance, il serait temps de souffler un réchauffement climatique favorable, à cette prise de conscience d’une nécessite de transformation majeure, puisque le mot transformation semble être le plus populaire au sein du gouvernement et à l'Élysée.
Dès lors, mes sujets d'interrogation pour notre Ministre et sa Secrétaire d’Etat (qui vient du privé et comprend bien les enjeux des grands groupes) sont assez simples. Tout d’abord, nous avons été, comme d'autres, écoutés et je pense entendus, sur les mesures principales. Nous avons échangé avec Delphine Genty Stéphan et son cabinet, dans un climat d’ouverture et de respect incontestable. Néanmoins j'ai peur que nous nous perdions entre les lois, le réglementaire et la technique, dans le détail de la mesure ou du mot clé dans le Powerpoint, en oubliant au passage les grandes lignes, les principes clés, et que ces derniers soient laissés de côté, au profit de mesures « phares » faites pour la presse. J'espère bien entendu avoir tort. Cela ferait du bien, à la fois à mon ego, car cela signifierait que nous avons été entendus, mais j'ai bien peur en écoutant et pour bien connaître une partie de ceux qui ont été plus impliqués encore dans le processus, que nous passions bien à côté des réalités et des nécessités absolues. Celle qui sont le terreau de tout changement.  
La nécessité est simple. Les PME besoin principalement de 4 oligo-éléments pour devenir un terreau favorable à la croissance :
De l'amour 
Du paiement
Du chiffre d'affaire 
Du digital
Des compétences
De l'amour. Vous le savez, il n'existe que des preuves d’amour. Le reste n’est que promesse et déclamation. Le gouvernement doit montrer que son exclusive attention se portera désormais sur les entreprises, petites et moyennes, de la start-up aux ETI (surtout les ETI) et s’engager fermement à ce que toute règle ou norme nouvelle ne soit mise en œuvre qu’à la condition qu’une Pme soit en mesure de les appliquer !! Cesser de dessiner le schéma législatif et normatif en fonction des grands groupes.
Ce serait une véritable révolution en France qui ne connait que les grands groupes par formation, par déformation et par collusion, ce qui transformerait le paysage français pour les décennies à venir. Et ferait rentrer E.Macon et B.Lemaire dans l’histoire. Celle de notre avenir.
Le paiement. Le sujet d'urgence, ce sont les délais de paiement. Sujet sur lequel se croisent la préoccupation digitale, la dématérialisation des factures et celle, prosaïque, de mettre fin à ce que les grands groupes se financent sur le dos des PME. C'est donc le sujet de la dématérialisation des factures qui doit être accompagné, à la vitesse de l'éclair, afin que les PME ne perdent pas leurs marchés avec les grands groupes, qui ensuite, pourront et devront les payer un 30 jours et pas un de plus. Ce serait une seconde révolution et 15Mds environs dans les poches des entreprises, sans prendre un sous au contribuable. 
Du chiffre d'affaire. Ce chiffre pourrait notamment se matérialiser par l’accès à la commande publique, en espérant, qu'enfin on puisse dépasser les règles stupides de la concurrence qui font de nous une économie naine, en privilégiant les PME innovantes françaises au détriment de toutes les autres, pour l’attribution des marchés, et ainsi leur donner (leur rendre ?) une partie des 100 milliards de dépenses publiques annuelles, afin d'en faire des champions européens.
Du digital. Difficile de comprendre pourquoi il n'est pas, depuis le premier jour, une priorité d'un gouvernement qui pourrait être le fer de lance de la révolution digitale en Europe. Il faudra qu’il soit moins préoccupé, comme ses voisins d'ailleurs, à faire de la politique au lieu de faire de l'argent, ce qui fait les choux gras des Américains et des Chinois qui prennent une irrattrapable longueur d'avance. Devenir le leader Européen qui puisse entraîner l’Europe dans une politique massive pour nous doter des géants que nous n’avons pas et qui feront de nous les valets des 2 super puissances.
Des compétences. Ce qui suppose d’anticiper et accompagner et réformer notre éducation et système de formation professionnelle. Encore plus profondément que ce qui vient d’être entamé avec courage par notre Ministre du Travail.
Si nous ne savons pas appliquer ces quatre principes, la Loi Pacte sera futile et inutile. Elle permettra de faire joli dans les journaux et de faire plaisir à quelques influenceurs proches de la Présidence dont le seul mérite et d'avoir participé à la campagne d'un point de vue financier et dont les mesures n’enfleront que leur ego, au détriment de notre économie
Pour revenir au digital, il y a 3 chantiers principaux. Le premier est d'aider les grands groupes à adopter, avec leur propre modèle, plutôt européen, leur stratégie notamment sur la possession et le partage de la valeur liée à la data et la façon dont nous utiliserons l'intelligence artificielle. Cela rejoint donc note sujet des PME et des start-up, puisque les grands groupes ne pourront faire cette révolution qu’avec le soutien et la coopération des innovateurs. Donc principalement des start-up, les seules à pouvoir leur apporter un esprit de disruption qui n’est pas inscrit dans les gènes d'un grand groupe, averses à la véritable disruption, car averse au risque et à la capacité à penser « out of the box ».
Par ailleurs cela permettra aux PME start-up se doter d'un accès à des marchés conséquents, capables de faire de nos nains, des géants. Cela supposerait, 2ème chantier, à l'échelle européenne, une stratégie un peu plus éclairée que la politique défensive axée sur le RGPD, dont le seul avantage est d’apporter un début de preuve qu’au moins 1 ou 2 personnes, au niveau Européen, avait réalisé que le digital était une réalité !!
Cela suppose également, 3ème chantier, de réfléchir aux nouvelles formes de travail, de coopération et d'échanges financiers, notamment entre particuliers, et de mettre fin à cette obsession d’interdire ou de surtaxer tout forme nouvelle d’activité. Créer de l’activité économique, à défaut d'emplois, car nous serons bien contents d’en disposer, quand le soleil se sera définitivement couché sur la croissance européenne. Cela suppose bien évidemment de gérer le problème de la montée en puissance progressive (même lente) des indépendants, car cette nouvelle forme ne sera que prospérer. 
Pour résumer, de l'amour, du paiement, du chiffre d’affaire, du digital et des compétences. Il restera en effet, le sujet primordial des compétences, qui nous entraîne bien évidemment vers la transformation du monde de l'éducation nationale et de la formation professionnelle. Afin que le premier quitte son obsession de faire plaisir à sa superstructure et que le second ne soit plus une machine à faire (sur)vivre les syndicats et le paritarisme dépassé à la Française, mais une machine à faire gagner l’économie. Pardonnez-moi la caricature, mais tant que la formation professionnelle sera gérée de façon paritaire, c'est-à-dire principalement par des incompétents plus intéressés à leur survie qu’à l’adaptation à ce monde qui change à vitesse folle, nous n'irons pas bien loin.
Si la loi pacte respire ses principes elle sera efficace. Si elle n’est pas inspirée en priorité ces principes, elle sera largement inutile, et n'a aucune raison d’être prioritaire, ni maintenant ni dans 4 ans. Affaire à suivre… 

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