Nicolas Dupont-Aignan : "Je suis républicain, j'obéirai au gouvernement sur les rythmes scolaires mais pas au risque de mettre les enfants en danger" <!-- --> | Atlantico.fr
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Nicolas Dupont-Aignan, député-maire de Yerres, menace de cadenasser les écoles mercredi 3 septembre.
Nicolas Dupont-Aignan, député-maire de Yerres, menace de cadenasser les écoles mercredi 3 septembre.
©Reuters

Désobéissance civile

Alors que 12 millions d'enfants reprendront le chemin de l'école ce mardi 2 septembre, 24 000 communes devront appliquer les nouveaux rythmes scolaires. Faute de moyens et de personnel nécessaires à la bonne mise en œuvre de cette réforme, Nicolas Dupont-Aignan, député-maire de Yerres, menace de cadenasser les écoles mercredi 3 septembre.

Nicolas Dupont-Aignan

Nicolas Dupont-Aignan

Nicolas Dupont-Aignan préside Debout la France, parti politique se revendiquant du gaullisme et est l'auteur de France, lève-toi et marche aux éditions Fayard. 

 

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Atlantico : Vous avez affirmé que vous n'hésiteriez pas à cadenasser les écoles de votre commune de Yerres (Essonne), mercredi 3 septembre, afin de signifier votre opposition à la mise en place des nouveaux rythmes scolaires. Quels sont les principaux problèmes que soulève cette réforme pour une commune comme la vôtre ? 

Nicolas Dupont-Aignan : Cela soulève d'abord un problème financier. Cette réforme nous coûte 650 000 euros de dépenses au moment où l'Etat supprime 400 00 euros de dotations ; cela manque pour le moins de cohérence. Au-delà de la question financière, on ne peut pas recruter et on ne trouve pas des animateurs suffisamment qualifiés pour appliquer l'ensemble de la réforme. Je ne bloque pas toutes les écoles de ma ville. J'applique la réforme le lundi, mardi, jeudi et vendredi de 16h à 16h30, c'est-à-dire que j'accueille les enfants. Mais je n'ai pas trouvé le nombre d'animateurs suffisants pour ouvrir l'école le mercredi sachant que les instituteurs partent à 11h30 et que moi je dois garder les enfants pour la cantine et les centres de loisirs l'après-midi. Et c'est là que le bât blesse. Nous n'avons pas la capacité physique des centres de loisir et nous manquons de personnel qualifié. Je demande simplement au gouvernement de nous accorder plus de temps.  Il nous faudrait un an pour bien peaufiner le système. Cette réforme est mauvaise mais je suis républicain, j'obéirai au gouvernement sur les rythmes scolaires mais pas au risque de mettre les enfants en danger. J'accepte de mettre en place cette réforme tant que j'ai les capacités en termes de personnel de bien m'occuper d'eux. 

>>A lire également : Rentrée scolaire : réforme des rythmes, crise des vocations, tensions communautaires et autres mines sur le chemin de l'école

Si vous avez choisi de frapper fort pour ce premier mercredi de l'année scolaire, les choses rentreront-elles dans l'ordre dans les semaines à venir ? Avez-vous prévu de continuer à fermer les écoles jusqu'à ce que vous soyez entendu, ou allez-vous opter pour une opposition plus passive, n'assurant simplement pas les activités périscolaires le mercredi après-midi ? 

Nous verrons, mais le problème est que notre gouvernement est sourd et aveugle. Je ne suis pas tout seul, il y a des dizaines de mairies qui n'appliqueront pas la réforme le mercredi 3 septembre. Ce que je demande à Madame Vallaud-Belkacem, c'est un peu de compréhension. Je suis prêt à la rencontrer et je l'invite à venir dans ma ville pour voir les efforts que nous faisons. Il ne s'agit pas d'une opposition de principe. C'est simplement du bon sens. 

On peut parquer les enfants dans des cours de récréation en plein hiver n'importe comment et appliquer la réforme n'importe comment mais je suis un homme honnête vis-à-vis de mes concitoyens. Si j'ouvre les écoles c'est pour accueillir correctement les enfants. Beaucoup de communes ne veulent pas désobéir au gouvernement et ce faisant, mettent nos gamins dans des conditions lamentables. Je suis franc, je défends mes concitoyens, je veux qu'on aille vers le haut et pas que l'on soit médiocre. 

Cette réforme a été décidée par le gouvernement et chaque commune touchera une aide de l'Etat de 50 euros par enfants. Ce coup de pousse est certes faible mais qu'allez-vous répondre à vos administrés ? Vous soutiennent-ils ? Les enfants et les parents ne seront-ils pas les premiers à faire les frais de votre refus d'ouvrir l'école ce mercredi 3 septembre ? 

Au contraire, nos concitoyens nous soutiennent tous. D'abord parce qu'ils veulent garder leur mercredi de libre et car ils ont bien conscience des difficultés concrètes et sont effarés de l'ignorance du gouvernement sur la réalité des choses. J'ai le soutien complet de mes administrés. 

Par ailleurs, l'Etat ne compense pas réellement financièrement, il n'accorde qu'une aide de 50 euros par enfant et le prix par enfant est de 100 à 150 euros. Et encore, l'aide de l'Etat n'est accordée que pour un an. Mes administrés me soutiennent également sur ce point car ils savent que sinon, ce sera à eux de payer. 

Najat-Vallaud Belkacem a déclaré ce lundi 1er septembre qu'elle ne tolérerait aucune exception à l'application de la réforme. Et selon le code pénal, "le fait, par une personne dépositaire de l'autorité publique, agissant dans l'exercice de ses fonctions, de prendre des mesures destinées à faire échec à l'exécution de la loi est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.".  Ne craignez-vous pas les sanctions ?

On veut sanctionner les maires parce qu'ils garantissent la sécurité des enfants ? Eh bien qu'ils le fassent ! Nous avons des dealers dans nos quartiers, dans nos rues, la police n'a pas les moyens de les arrêter et on va sanctionner les maires qui sont sur le terrain et qui connaissent la ville ? Mais si ce gouvernement en arrive là, on n'aura jamais vu cela sous la République. Où trouve-t-on les animateurs pour venir travailler trois heures le mercredi ? Il faut vérifier leur casier judiciaire et vérifier s'ils ont les compétences nécessaires. C'est une affaire sérieuse.  

Est-ce si compliqué de trouver des animateurs ? 

Croyiez-vous que les communes puissent se substituer à l'Education nationale d'un coup de baguette magique trois heures par semaine ? En fait, nous sommes face à la première étape de privatisation de l'Education nationale et on renvoie aux communes le soin de faire le métier d'enseignants formés. Nous avons trouvé une partie des animateurs mais ce n'était pas facile, et ce sont des centaines de personnes qui doivent travailler trois heures par semaine, 45 minutes chaque jour.  Pensez-vous que l'on trouve facilement des gens qui acceptent de travailler 45 minutes par jour ?

Quels sont aujourd'hui les compromis possibles pour les communes afin que les enfants n'en fassent pas les frais ? 

Le compromis, c'est que Madame la ministre nous donne un petit délai supplémentaire et nous autorise à mettre en place la demie-journée le samedi matin. Car les parents récupèreront leurs enfants directement à 11h30. En un mot, qu'elle fasse preuve d'un peu de souplesse. Et je suis convaincu que l'on va pouvoir s'en sortir intelligemment.   

Propos recueillis par Carole Dieterich

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