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Médiapart : tout ce que vous direz pourra être retenu contre vous
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Zone franche

Enregistrons-nous discrètement les uns les autres : on ne sait jamais, ça peut toujours servir une noble cause…

Hugues Serraf

Hugues Serraf

Hugues Serraf est écrivain et journaliste. Son dernier roman : La vie, au fond, Intervalles, 2022

 

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Il serait amusant (tout à fait anormal et éthiquement insupportable, évidemment, mais amusant tout de même), qu’un journaliste un peu vicelard s’avise de mettre son iPhone sur « enregistrement » pendant les réunions de rédaction de Médiapart ― voire pendant d’anodines conversations entre confrères près de la machine à café.

Bien sûr, ces gens-là sont pour la plupart des êtres humains de très haute qualité, que n’anime jamais la moindre mauvaise pensée et qui, s’ils balancent des vannes à l’occasion (ce n’est pas leur genre, mais admettons), veillent par réflexe à ce qu’elles ne heurtent pas le représentant d’une minorité ethnique, religieuse ou sociale…

Pour autant, êtres humains de très haute qualité ou pas, il doit bien leur arriver de baisser la garde, de se lâcher, de s’autoriser un propos déplacé sur, je ne sais pas moi, ces « crétins de commentateurs analphabètes qui n’ont rien compris à ce papier pourtant excellent », cette « contractuelle bornée qui colle des prunes pour cinq minutes de retard mais à qui j'ai dit ma façon de penser ce coup-ci », l’instit du fiston « qui passe sa vie en congé-maladie », les impôts « qui font des histoires pour des conneries »

Le journaliste un peu vicelard (dont nous rappelons à quel point son comportement serait indéfendable) pourrait alors faire circuler ses fichiers MP3 dans les gazettes concurrentes, lesquelles s’empresseraient d’en publier les moments les plus significatifs (sans toutefois épouser la cause du Ganelon à l’attitude inqualifiable et aux objectifs malsains, ça va sans dire) au nom de la nécessité d’informer.

« Verbatim », preuve formelle et sans appel...

« Les journalistes de Médiapart méprisent leurs lecteurs, ignorent le code de la route, fraudent le fisc, agressent des fonctionnaires antillais et militent pour la privatisation de l’éducation nationale. Le verbatim de leurs déclarations ! », clamerait alors un « chapô » surmonté d’une photo montrant un groupe de jeunes gens hilares se gorgeant de Nespresso Arpeggio grand cru à un euro la capsule ― image terrible d’un luxe ostentatoire et sans limites quand tant de gens souffrent de la faim de par le monde…

Un communiqué serait sans doute publié pour expliquer à quel point ces réflexions n’ont aucun sens « sorties de leur contexte », et pour dénoncer les « manœuvres cousues de fil blanc d'un pouvoir déterminé à museler la dernière parole libre du paysage médiatique français »... Las, il serait probablement déjà trop tard et les journalistes impliqués n’auraient plus qu’à démissionner ou, au minimum, à s'excuser publiquement d'avoir tenu des propos aussi scandaleux.

Mais j’y pense, les écoutes d'Edwy Plenel sous Mitterrand, c’était dégueulasse, bien sûr, tout le monde est d’accord, mais qu’est-ce que ça racontait en fait  ? On ne pourrait pas en publier la transcription ou les mettre sur Youtube ? Au nom de la liberté de l'information…

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