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Macron candidat à la présidentielle ? Ce que trame le ministre de l'Economie pour 2017 (et les réseaux qui y pensent pour lui)
©Reuters

Je m'voyais déjà

Alors que des rumeurs courent sur un éventuel départ du gouvernement, Emmanuel Macron commence à se préparer pour la présidentielle de 2017. Il travaille à un programme, tisse ses réseaux, parallèlement le PS lui aurait d'ores et déjà réservé la circonscription de Béthune pour les législatives

Christelle Bertrand

Christelle Bertrand

Christelle Bertrand, journaliste politique à Atlantico, suit la vie politique française depuis 1999 pour le quotidien France-Soir, puis pour le magazine VSD, participant à de nombreux déplacements avec Nicolas Sarkozy, Alain Juppé, François Hollande, François Bayrou ou encore Ségolène Royal.

Son dernier livre, Chronique d'une revanche annoncéeraconte de quelle manière Nicolas Sarkozy prépare son retour depuis 2012 (Editions Du Moment, 2014).

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"Si Manuel continue à jouer contre nous je vais aller soutenir une candidature Macron", cette confidence de fin de repas, accordée dans "l'intimité" d'un grand restaurant parisien quelques semaines après les attentats de novembre, vient d'un intime de François Hollande. Ce que l'entourage du chef de l'Etat a à reprocher au Premier ministre n'est pas anecdotique : depuis le 13 novembre ses proches se répandent, en effet, dans tout Paris, expliquant "en off" que le soir des attentats le Président était sonné, perdu, et que son Premier ministre a dû le secouer et presque le contraindre à faire "un geste fort". Une sacrée humiliation pour le locataire de l'Elysée qui n'entend pas laisser faire. Canaliser Manuel Valls, le neutraliser si possible, telle est depuis l'obsession de l'Elysée. Et quoi de mieux qu'un Macron pour étouffer un Valls. Quoi de mieux qu'une candidature du vibrionnant ministre de l'Economie pour ringardiser le non moins vibrionnant Premier ministre ? "Au jeu du plus jeune et plus réformateur que moi tu meurs, Macron bat Valls à plates coutures", résume ce proche de l'Elysée en souriant avant de quitter la table.

Et il se trouve que l'idée n'est pas totalement saugrenue car depuis des mois, le ministre de l'Economie se prépare. "Il y pense tous les matins en se rasant", sourit un proche. Et comme Nicolas Sarkozy qui, en se laissant pousser la barbe, entendait envoyer un message signifiant à ses électeurs je n'y pense plus mais j'y repenserai un jour, le menton piquant d'Emmanuel Macron est vecteur de messages subliminaux. Oh bien sûr, il ne se fait pas beaucoup d'illusions, son heure n'a pas encore sonné, l'année 2017 ne sera pas la sienne. "Il n'imagine pas se présenter contre l'actuel président de la République, il se décrédibiliserait totalement", insiste un conseiller de l'ombre qui ajoute "en revanche, il travaille au cas où celui-ci déclarerait forfait". En politique il faut être prêt à tout et même au plus improbable. Même au plus fou. Qui imaginait, en 2011, que DSK devisserait ?  Bien que résolu à se présenter, François Hollande peut aussi être empêché. Et dans ce cas, tout est ouvert et hors de question de laisser la voie libre à Manuel Valls.

Macron travaille donc pour lui-même et un certain nombre de gens l'aident à rédiger un programme au nombre desquels Alain Minc, Jean-Marie Colombani ou encore Jacques Attali avec qui l'actuel ministre de l'Economie rédigea le célèbre rapport commandé par Nicolas Sarkozy. Le locataire de Bercy s'inspire aussi de trois économistes de haut vol : Philippe Aghion, Elie Cohen et Gilbert Cette. Le programme auquel réfléchit le groupe autour de Jacques Attali défend "une France ouverte sur l'extérieur, une Europe fédérale, une France pro-business, favorable au progrès technologique et anti principe de précaution", décrit l'une des têtes pensantes qui gravite autour du projet.

Outre son programme, Emmanuel Macron travaille aussi à tisser des réseaux.  "Il va le plus souvent possible à la rencontre des parlementaires et des acteurs économiques", explique le sénateur François Patriat l'un de ses soutiens qui précise: "il veut élargir son audience mais pas forcément pour 2017". Julien Dray lui a fait rencontrer nombre d'élus. Et le PS lui aurait, d'ores et déjà, trouvé une circonscription pour les législatives de 2017, celle de Béthune aujourd'hui détenue par Stéphane Saint-André, membre du PRG. Une circonscription en or et tellement symbolique de cette France industrielle qui n'attend que de rebondir.

Quant à claquer la porte du gouvernement lors du prochain remaniement, personne n'y croit guère. "Je crois qu'il aimerait surtout que son rôle soit renforcé", observe François Patriat qui ne croit pas non plus que François Hollande ait envie de se passer d'un ministre aussi populaire. D'ailleurs lundi, lors de la présentation de ses mesures pour l'emploi, le chef de l'Etat a sorti pas mal d'idées de la boite à outil macronienne, "la transformation du CICE en baisse de charges, sur les prudhommes et l'indemnisation du chômage", énumère le sénateur qui y voit un hommage du chef de l'Etat qui a même cité son ministre lors de son discours. Des soutiens qui n'imaginent par Emmanuel Macron ailleurs qu'aux côtés du chef de l'Etat en 2017.

Si François Hollande est candidat "il faudra bien qu'il se fasse élire avec les voix de la gauche libérale. Emmanuel Macron va lui apporter les 5 ou 6% des libéraux et des chefs d'entreprises qui lui permettront de battre le candidat de droite au premier tour", explique un soutien qui ajoute: "Hollande le protège pour qu'il continue à faire entendre sa voix, sa petite musique". Pour l'ami Thierry Pech, directeur général du think tank Terra Nova, "Emmanuel Macron incarne un progressisme hostile à l'économie de rente, assez américain dans son approche des problèmes. Il pense en termes d'opportunité, de chance, de mobilité. Ce qui le qualifie, c'est un rapport à l'avenir optimiste, volontariste, il veut que chacun ait sa chance". Libéraux, chefs d'entreprise mais pas que… un récent sondage montre que le locataire de Bercy commence aussi à séduire à gauche et parmi les classes populaires. "Une partie ont besoin de protection mais une autre partie, comme les jeunes, par exemple, attendent des opportunités, ils n'ont pas envie que l'Etat leur envoie un chèque tous les mois", analyse Thierry Pech tout en précisant qu'il parle à titre amical et que Terra Nova n'est au service de personne.

Ces grandes manœuvres raisonnent, en outre, comme un message à l'attention de nombre de personnes dont le Premier ministre lui-même. En effet, si celui-ci avait envie d'entraver une nouvelle candidature de François Hollande afin de se présenter, il sait d'ores et déjà qu'il trouvera Emmanuel Macron sur sa route et que celui-ci réclamera des primaires. Le message s'adresse, dans le même temps, à la gauche du PS qui a lancé, le lundi 11 janvier, une pétition réclamant que se tienne cette consultation interne. Si elle avait lieu, Emmanuel Macron serait prêt à concourir et n'occuperait pas forcément le créneau attendu. Depuis peu, les soutiens du ministre de l'Economie entonnent, en effet, un refrain bien inattendu sur le thème "Macron est plus à gauche que ce que l'on croit". Il serait même, selon François Patriat, "le plus à gauche du gouvernement". Et le ministre lui-même de vanter sa relation avec Jean-Pierre Chevènement qui l'accompagnera à Moscou les 24 et 25 janvier pour la réunion du CEFIC (Conseil économique, financier et commercial). Tenir en respect Manuel Valls et en même temps la gauche du PS, voilà déjà un destin inédit.

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