Les médecins bruxellois peuvent désormais prescrire des visites gratuites au musée et voilà pourquoi c’est une bonne idée<!-- --> | Atlantico.fr
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L’art peut-il vraiment aider certains patients à se sentir mieux ?
L’art peut-il vraiment aider certains patients à se sentir mieux ?
©ALBERTO PIZZOLI / AFP

Bienfaits de l'art

Durant la pandémie de Covid-19, des médecins bruxellois ont prescrit des visites au musée à des patients dont la santé mentale avait été affectée par la crise sanitaire.

Pascal Neveu

Pascal Neveu

Pascal Neveu est directeur de l'Institut Français de la Psychanalyse Active (IFPA) et secrétaire général du Conseil Supérieur de la Psychanalyse Active (CSDPA). Il est responsable national de la cellule de soutien psychologique au sein de l’Œuvre des Pupilles Orphelins des Sapeurs-Pompiers de France (ODP).

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Atlantico : Pendant la pandémie de Covid-19, des médecins bruxellois ont prescrit des visites au musée à des patients dont la santé mentale a été affectée par la Covid. Quel est le but de cette démarche ? Son efficacité a-t-elle été démontrée ?

Pascal Neveu : En préambule, quelques chiffres et constats, car le sujet mérite un livre.

En France, environ 3 millions de personnes souffrent de troubles psychiques.

La pandémie et le confinement ont eu des effets importants sur l’activité, les comportements, le moral, l’économie et la santé de nos concitoyens. Les premières études menées ont fait état d’un nombre important de troubles anxieux et dépressifs ainsi que de troubles du sommeil.

27% de 30000 personnes interrogées décrivaient de tels symptômes.

Les jeunes ont développé des troubles importants de phobie sociale, mêlées à de nombreuses frustrations, face à une enfance ou adolescence désormais plus emprunte au spectre de la mort que de la vie.

D’autres travaux menés pointaient du doigt un risque d’augmentation de conduites suicidaires, de symptômes d’allure psychotique, de symptômes psychosomatiques, de symptômes de stress post-traumatique et de consommations de substances psychoactives (alcool, drogue, tabac…), d’où un « laisser-aller » de la part des pouvoirs publics afin d’éviter des décompensations et passages à l’acte.

Nos amis Belges sont partis d’études québécoises mais aussi du Royaume-Uni où on pensait les bienfaits de l’art face aux démences.

Les précurseurs sont nos amis Québécois dès 2016 via le Musée des beaux-arts de Montréal (avec 1,3 million de visiteurs par an, le MBAM est l’un des musées les plus fréquentés au Canada. Il se classe au 8ème rang des musées les plus visités en Amérique du Nord.)

Nous attendons les résultats des études, qui doivent être validées par des articles et une méthodologie stricte.

Mais nous savons que l’art libère l’âme et permet de s’exprimer intérieurement, émotionnellement.

Dès la fin de la 2nde guerre mondiale le monde psychanalytique s’intéresse au lien que nous vivons avec l’art.

On trouve tant de si nombreux ouvrages de psys que d’artistes sur le sujet. Et de nombreux résultats, de l’enfant à l’adulte. Car il s’agit d’une expression… tant réalisée ou visualisée… qui laisse la parole intérieure à se libérer.

L’art peut-il vraiment aider certains patients à se sentir mieux ? Certains types d'œuvres ou courants artistiques sont-ils plus efficaces que d’autres ?

L’art et la culture sont à la santé ce que le sport a été XXe siècle !

De plus en plus d’études le démontrent : le contact avec les œuvres d’art a un réel impact sur l’état de santé physique et mentale de la population. Je suis convaincu que les patients seront heureux de profiter d’une visite au Musée pour apaiser leurs souffrances, et ce, sans aucun effet secondaire.

Peu importe les œuvres, l’œuvre, le courant artistique… car l’œuvre nous attire en fonction de notre état d’âme (dépression, mélancolie, joie, psychose…). Elle parle au patient et peut devenir un révélateur, un refuge, en tout cas un moment intime d’expression.

D’ailleurs certains musées recommandent le même jour des séances d’art-thérapie à certains patients. Ces activités de groupe adaptées à leurs états de santé et pathologies sont offertes au Musée.

Car l’art fait du bien ! L’expérience artistique et le contact avec des œuvres d’art ont des effets positifs sur la santé et le mieux-être.

Les arts améliorent la connectivité neuronale sous-tendant la résilience psychologique. Ils ont une influence positive sur l’attention et la mémoire de travail, ils favorisent la détente, la relaxation et une activité neuronale plus développée et complexe.

En dehors les nombreuses études incontestables, j’ai pu l’expérimenter à plusieurs reprises avec un ami artiste accompagnant un projet autour d’une vingtaine de personnes par groupe… En dehors des consignes livrées par l’artiste, et les supports choisis, je suis resté bluffé par la libération des émotions et surtout une capacité artistique que chacun des participants a pu découvrir, se libérant de problématiques enfouies, l’exprimant non verbalement mais à travers l’art.

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Et si les rituels porte-bonheur avaient un vrai impact sur le succès ?

Cette forme de traitement peut-elle être étendue à des patients qui souffrent d’autres pathologies ?

Bien évidemment.

Ces projets s’adressent, par exemple, à des personnes vivant avec

-       des Troubles de Comportement Alimentaires (anorexie et boulimie)

-       une déficience intellectuelle, des troubles du spectre de l’autisme (TSA)

-       de l’arythmie cardiaque

-       l’épilepsie

-       la maladie d’Alzheimer

-       des troubles langagiers ou sensoriels

-       des problèmes de santé mentale

-       ainsi qu’à des victimes du cancer du sein

-       et des personnes âgées.

Il s’agit d’affiner leurs capacités interprétatives, en leur offrant un accès gratuit à un lieu sécuritaire et bienveillant

Car cela reste une expérience enrichissante et relaxante, un moment de répit, ou encore l’occasion de resserrer les liens avec leurs proches ou des inconnys et donc retrouver un lien social perdu lors dette pandémie.

A Montréal, les médecins participants peuvent prescrire jusqu’à 50 ordonnances pour une visite des collections et expositions du MBAM lors de leurs consultations (chacune valable pour un maximum de deux adultes et de deux enfants de 17 ans et moins).

Si on pouvait résumer : « La thérapie ajoute à l'art le projet de transformation de soi-même. L'art ajoute à la thérapie l'ambition de figurer de façon énigmatique les grands thèmes de la condition humaine. » (J-P Klein)

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