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Le troublant profil d'Abou Maria, ce déserteur de Daesh qui rêve toujours d'un "véritable État islamique"
©Reuters

Bonnes feuilles

"Daesh, paroles de déserteurs" est une plongée au cœur de la machine État islamique. Elle dévoile les différentes facettes de l'organisation à travers les mots de ceux qui, après avoir servi et combattu pour elle à un moment de leur vie, s'en sont échappés. Extrait de "Daesh, paroles de déserteurs" de Thomas Dandois et François-Xavier Trégan, aux éditions Gallimard (1/2).

François-Xavier Trégan

François-Xavier Trégan

François-Xavier Trégan est grand reporter et réalisateur. Historien de formation, il a vécu plusieurs années en Syrie et au Yémen.

 

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Thomas Dandois

Thomas Dandois

Thomas Dandois est un réalisateur et grand reporter. Sa filmographie se compose d'une trentaine d'œuvres. 

 

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Abou Maria, 22 ans, Syrien de Raqqa, fut sans doute le moins loquace de tous les déserteurs que nous avons rencontrés. Le plus troublant aussi. Il nous a fait comprendre qu’un déserteur n’est pas forcément un repenti. Avant chaque phrase, il réfléchit de longues secondes pour peser chaque mot, installer des nuances, exprimer ses idées le plus clairement possible, sans donner de détails trop précis sur son parcours et sur sa vie pour ne pas être démasqué. Il semble brisé, mais toujours habité par le rêve de construire un jour un véritable État islamique. Il évoque même l’idée de se rendre en Birmanie pour combattre aux côtés des Rohingyas. Une grande partie de sa famille vit toujours à Raqqa. Certains de ses oncles sont de puissants émirs. Lui aussi a rejoint l’État islamique pour « appliquer la shariah sur la terre, car c’est ça le plus important ».

Il a été soldat, il avait du pouvoir et le respect de ses hommes. Puis il a vu les bourreaux « exécuter leurs victimes avec des couteaux mal aiguisés, simplement pour les faire souffrir ». Lui aussi a vécu l’histoire de trop. Au détour d’une phrase, il avoue avoir exécuté quelques personnes à la kalachnikov. « C’était les ordres. Nous n’avions pas le choix. ».

Il n’en dira pas plus. Souvenirs trop douloureux, trop inavouables. À peine s’autorise-t-il à parler de cette histoire de « Roméo et Juliette » des temps modernes dans une Syrie en guerre. Le jour de leur mariage, un mari et son épouse ont été exécutés parce que la femme s’était maquillée. Tués surle-champ, les jeunes mariés ont été balancés dans le Houtah, le gouffre situé à la sortie de Raqqa. Abou Maria les a découverts par hasard alors qu’il tentait de récupérer le corps d’un homme qu’il avait exécuté d’un coup de kalachnikov et que des combattants avaient balancé dans le trou. En descendant en rappel, il a trouvé les corps des deux époux l’un près de l’autre ; unis dans cet antre de l’enfer.

Extrait de "Daesh, paroles de déserteurs" de Thomas Dandois et François-Xavier Trégan, aux éditions Gallimard

"Daesh, paroles de déserteurs" de Thomas Dandois et François-Xavier Trégan

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