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L’étude américaine qui montre l’effet contre-productif sur les fumeurs du message morbide des campagnes anti-tabac
©Reuters

Inefficace

Une étude américaine a révélé que le message des campagnes anti-tabac était inapproprié pour toucher les consommateurs et que le caractère morbide de cette propagande provoquait l'effet inverse chez les fumeurs.

Les campagnes anti-tabac sont-elles réellement efficaces ? Face aux importants moyens mis en place pour sensibiliser les fumeurs sur les risques liés au tabagisme, les fumeurs semblent rester passifs et les chiffres d'affaires des buralistes ne pas faiblir. Rebecca J. Evans-Polce, chercheur à l'université d'État de Pennsylvanie (États-Unis) a tenté de comprendre d'où venait cette indifférence.

Selon elle, stigmatiser le consommateur dans une campagne anti-tabac pourrait provoquer l'effet inverse et l'amener à se sentir en colère ou même, à perdre confiance en lui. Pire il pourrait être sur la défensive et renoncer à arrêter de fumer. Selon les chercheurs qui ont publié leurs travaux dans dans la revue Social Science & Medicine, 30 à 40% des fumeurs ressentiraient une forte désapprobation de la part de leur famille et un isolement social. Près de 27% d'entre eux estimeraient être traités différemment à cause de leur tabagisme et 39% penseraient que l'on a une mauvaise opinion d'eux. "Ce sont surtout les parents qui sont stigmatisés", a précisé Rebecca Evans.



L'interpretation du message des campagnes anti-tabac : la frustration du consommateur

En ayant analysé près de 600 articles scientifiques sur l'auto-accablement des fumeurs, Rebecca Evans et sont équipe ont conclu que le sens des campagnes de sensibilisation devait être inversé : plutôt que de répandre l'idée que le tabac nuit à la santé et par déduction, que les fumeurs sont irresponsables, celles-ci devraient s'articuler autour des bienfaits que procurent une vie sans tabac. En outre, les chercheurs préconisent l'utilisation d'un langage à connotation positive qui servirait à vanter le fait de ne pas fumer, plutôt que des insinuations négatives incriminant le tabagisme et plaçant les fumeurs dans une position de frustration.

Pour autant, Gérard Dubois, président de la Commission Addictions à l’Académie nationale de médecine et co-auteur du rapport des "Cinq sages" au ministre des Affaires sociales sur la Santé Publique à l'origine de la loi Evin, indique en effet que le fumeur doit être aidé. "80% des fumeurs aimeraient arrêter de fumer", nous explique-t-il. Et de rassurer sur le but premier des campagnes anti-tabac : "Elles ne sont pas faites pour attaquer les fumeurs, mais les paquets et la fumée. Un fumeur sur deux décède à cause du tabagisme. L'éspérance de vie varie de 10 ans selon si une personne est fumeuse ou pas".



La promotion d'une vie meilleure plutôt que celle de la terreur

Selon les scientifiques, la tournure d'un message, quel qu'il soit, a une incidence réelle sur le mental du consommateur. Véhiculer l'idée que les fumeurs sont continuellement dans l'erreur, les stigmatiser en tant que personnes irresponsables ou faisant des choix dangereux, peut installer des idées reçues dans l'inconscient collectif qui mèneront les consommateurs à l'isolement social.

A l'inverse, orienter les arguments d'une campagne sur les avantages que constitue une vie sans tabac n'incrime pas le fumeur et lui laisse la liberté d'imaginer ce que serait la sienne s'il arrêtait de fumer. A titre d'exemple, une marque de vêtement n'orientera jamais sa publicité sur le fait qu'une jeune femme est moins séduisante si elle ne porte pas son dernier pull en cachemire, mais bien que ce vêtement la rendrait irrésistible si elle l'achetait.

Cette seule promesse d'être mise en valeur et donc par déduction, d'être séduisante et sûre d'elle, amène le consommatrice potentielle à s'ouvrir à la proposition en s'imaginant avec le produit. De la même façon, le Dr. Evans recommande la publicité positive mettant en avant tous les avantages pour le fumeur, plutôt que l'exploitation de la terreur. Pour se sentir concernée, une personne doit pouvoir tirer des avantages du message. Ainsi, sur son paquet de cigarettes, un fumeur se sentirait plus concerné si le message n'était pas "Fumer tue", mais "Ne pas fumer protège".

Gérard Dubois fait notamment le parallèle entre cette étude et le débat qui s'articule autour du paquet neutre, qui selon lui, consitue l'une des meilleures armes de prévention. "Le paquet neutre est un élement complémentaire de l'interdiction de publicité d'un produit qui tue la moitié de ses consommateurs. Des études ont démontré que le manque d'attractivité du paquet neutre décourageait les fumeurs".

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