L’abstentionnisme record aux régionales de 2021 a marqué l’aggravation de la fracture démocratique<!-- --> | Atlantico.fr
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L’abstentionnisme a une fois de plus battu des records aux élections régionales et départementales du 20 juin 2021.
L’abstentionnisme a une fois de plus battu des records aux élections régionales et départementales du 20 juin 2021.
©LUDOVIC MARIN / POOL / AFP

Bilan 2021

Près de deux électeurs sur trois ne se sont pas rendus aux urnes lors des élections régionales et départementales en juin dernier. L'abstention s'élevait à 65,7% pour le second tour. Ce taux d’abstention record s’explique par la défiance envers la politique et un désintérêt pour le scrutin.

Maxime Tandonnet

Maxime Tandonnet

Maxime Tandonnet est essayiste et auteur de nombreux ouvrages historiques, dont Histoire des présidents de la République Perrin 2013, et  André Tardieu, l'Incompris, Perrin 2019. 

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Aux élections régionales et départementales du 20 juin 2021, l’abstentionnisme a une fois de plus battu des records : une participation de seulement 35 % (un tiers de l’électorat !) contre 50 % aux élections législatives de 2017 et aux européennes de 2019, 40 % aux municipales de juin 2020. Cet effondrement est le signe patent d'une démocratie malade. Dès lors que l'immense majorité des citoyens s'abstient désormais de se rendre aux urnes, le suffrage universel est annihilé et le pouvoir du peuple devient une formule vide de tout sens. Cette situation est immensément dangereuse. La nature a horreur du vide : si le peuple se dérobe à son devoir, d'autres prendront sa place. La neutralisation du suffrage universel ouvre la voie à dictature des bureaux ou des tribunaux ou encore à l'arrivée au pouvoir de n'importe quel charlatan ou despote échappant à tout contrôle.

De fait, la responsabilité essentielle de cette situation incombe à la classe dirigeante du pays. Depuis quelques années, le naufrage de la politique au plus haut niveau dans les coups de communication, le Grand-Guignol permanent, l'obsession de paraître et de pavoiser finit par engendrer un profond dégoût des citoyens. Les sondages de popularité qui mesurent une émotion immédiate ne reflètent pas forcément cet écœurement dans toute sa profondeur. Cependant, celui-ci se retrouve dans les taux de participation misérables aux élections suivantes. Et l'image dégradée de la politique est générale, sans que les Français opèrent une distinction entre le niveau national et territorial.

À cela s'ajoute le constat tragique que les dirigeants du pays qui prennent tellement de temps à pavoiser devant les caméras de télévision pour être réélus, se montent incapables de régler les grands sujets de préoccupation des Français : un chômage qui touche 3,5 à 6 millions de personnes (selon pôle emploi), un effondrement vertigineux du niveau scolaire, une pauvreté qui touche près de 10 millions de personnes selon l'INSEE, les problèmes de violence et de délinquance qui rongent surtout les milieux populaires, les inquiétudes autour de la maîtrise des migrations et une dette publique de 120 % du PIB. À cela s'ajoutent les conditions du traitement de la crise sanitaire et les dégâts d'une année « d'Absurdistan », que par-delà l'autosatisfaction de la classe dirigeante, les Français ne sont pas près d'oublier…

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Ce taux d'abstention gigantesque traduit surtout que les Français ont largement intériorisé l'idée que toutes les majorités et tous les gouvernements se valent. Au milieu de ce brouillard –volontairement entretenu – la croyance qu'il n'existe aucune alternative crédible est désormais répandue. Pour une vaste majorité de Français, désormais, la vie politique est devenue une imposture et voter ne sert strictement à rien. L'abstentionnisme traduit certes une désespérance politique qui a sûrement de bonnes raisons mais il reflète aussi un renoncement collectif.

2022 sera une grande année électorale. Les sondages prolifèrent, à un rythme quotidien. Mais curieusement, le taux d’abstention à attendre n’est jamais évalué ! Pourtant, il représente bien une variable essentielle du scrutin susceptible de faire pencher le résultat dans un sens ou dans un autre mais surtout qui donne une mesure assez fidèle de la profondeur de la fracture démocratique, le gouffre qui sépare la nation de sa classe dirigeante. D’ailleurs l’idée de rendre le vote obligatoire est une idée absurde parmi tant d’autre : casser le thermomètre ne soigne pas une maladie, la maladie de la démocratie.  

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