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Jean-Luc Schaffhauser : "Nos entreprises sont les plus fiscalisées au monde"
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Mal français

Les entrepreneurs français sont soumis aux plus fortes charges sociales au monde et font face à une concurrence déloyale. Ils ne peuvent pas créer des emplois car les politiques d'austérité du gouvernement ont tué la demande. Cette même austérité appliquée au niveau européen n'a pas eu les résultats escomptés, à savoir atteindre la rigueur, mais a provoqué une dépression et davantage de chômage.

Jean-Luc Schaffhauser

Jean-Luc Schaffhauser

Jean-Luc Schaffhauser est ancien député européen apparenté RN.

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Atlantico : Vous êtes député européen et souhaitez alerter sur la situation des entreprises françaises et la fiscalité à laquelle ces dernières sont soumises…

Jean-Luc Schaffauser : Nos entreprises sont les plus fiscalisées au monde selon l’étude produite par la cour des comptes en 2013 et l’OCDE en 2014. 18 points de Pib pour les impôts des entreprises en France, par exemple, contre 10 points en Allemagne, si nous voulons nous comparer à notre premier partenaire économique. 160 milliards devraient donc être donnés chaque année, par le gouvernement, aux entreprises françaises subissant cette concurrence, si on voulait rétablir une concurrence loyale. Je ne vous parle pas de la Chine ou d’un autre dragon asiatique !

A quelles entraves sont selon vous confrontés les entrepreneurs français ?

Nos entrepreneurs sont les plus enfermés dans la législation par un code du travail obsolète et tatillon qui n’a pas son pareil dans son formalisme, car il a perdu l’esprit de protection qui devait l’animer, pour aider à fabriquer 6 millions de chômeurs sans droit au travail, pour finir, sans-droit au chômage.

Nos entrepreneurs sont les plus soumis aux charges sociales car pour 1 euro donné au salarié, il en coûte plus de 2 euros à l’entreprise et pourtant nous avons 8 millions de pauvres, 3 millions de personnes assistées avec un budget social qui approche 35% du PIB.

Nos entrepreneurs n’en peuvent plus tout simplement d’essayer de survivre, malgré tous ces handicaps. Ils se suicident comme aucune profession, un tous les deux jours. Car aux charges publiques, à la législation du travail, à l’Etat social qui pèse sur eux en fabriquant toujours plus de pauvres, il y a ce marché ouvert à tout vent qui a fait de la concurrence déloyale – selon d’autres règles non protectrices - le principe même de l’organisation du marché. Mais où sont donc nos inspecteurs du travail pour rétablir la justice face à cette concurrence déloyale devenue un jeu de massacre ? Ils aimeraient bien agir mais les responsables politiques, socialistes et dit libéraux, leur ont tout simplement ôté tout pouvoir au nom de l’Europe et de l’OMC !

Ce constat est le constat de 40 ans d’irresponsabilité politique de nos dirigeants qui eux ont prospéré dans la faillite de la France.

Nos entrepreneurs qui permettent de créer des richesses en France, malgré tous ses handicaps, devraient mériter la reconnaissance de la Nation pour survivre malgré les irresponsables politiques de droite et de gauche, ils mériteraient d’être protégés comme la poule aux œufs d’or, mais les voilà conspués et rendus responsables de la situation du chômage et de l’emploi par cela-mêmes qui en portent la responsabilité.

Messieurs les socialistes, les entrepreneurs ne peuvent pas créer de l’emploi car il n’y a pas de demande ; vous l’avez tuée par vos politiques économiques et sociales de dépenses inutiles se conjuguant, malgré tout, avec l’austérité. Ce n’est pas 40 milliards que vous devriez donner à nos entreprises mais 160 milliards (80 milliards en diminuant les charges et 80 milliards en augmentant les salaires) pour susciter une politique d’offre et de demande ciblé vers nos entreprises. Vous en êtes bien incapables. C’est vous qui devez être renvoyés et vite ! La France ne peut plus attendre !

Suite au séminaire du Front National, ayant eu lieu en ce début du mois de février, le parti ne serait toujours pas parvenu à "clarifier" ses positions sur la ligne à tenir concernant la sortie , ou non, de l'euro.  Dans ce cas, quel crédit apporter à la déclaration de Marine Le Pen, qui a pu indiquer sur TF1 "Il n'a jamais été question de sortir de l'euro, jamais !". ?

La position du Parti – dont je ne suis pas membre – est très claire. La souveraineté monétaire est indispensable à toute politique économique, elle n’est pas négociable. Elle n’entraîne pas forcément la sortie de l’euro si la BCE est prête à considérer le développement de la zone euro et à faire un Quantitative Easing pour l’économie réelle en adaptant les traités, comme elle le fait actuellement. J’ai pu lire, d’ailleurs, dans Atlantico, souvent, un tel point de vue invoquant la nécessité de ces politiques monétaires pour des politiques de relance. Ces politiques sont une condition nécessaire, certes pas suffisante car, parallèlement à ces facilités monétaires, il faut mener des réformes structurelles d’offre (les 8 points de Pib qui pèsent, en plus, sur les entreprises françaises par rapport aux entreprises allemandes) et des politiques de la demande, en distribuant du pouvoir d’achat vers des productions françaises ciblées (habitat, développement durable, économies d’énergie et énergies nouvelles). Il faut à nouveau obtenir de la croissance en France. J’avais pu exprimer il y a quelques années, sous ces colonnes d’ailleurs, ce point de vue.

Si Marine le Pen arrivait donc au pouvoir (je m’exprime en mon nom propre mais je crois que c’est un scénario réaliste) elle se concerterait avec les autres pays du Sud (l’Italie, l’Espagne, le Portugal, la Grèce) et demanderait à la BCE une politique de facilité monétaire pour la Banque de France et pour les Banques Nationales de ces pays. Il s’agirait d’un plan concerté de mise à niveau des pays du Sud par rapport aux pays du Nord comme celui que j’avais préparé en 2012 avec d’ailleurs le soutien informel de l’Elysée. Il s’agirait d’une politique d’offre – par la diminution de la mauvaise dépense publique - et par l’investissement rentable également appuyée par une demande ciblée. Il s’agirait de sortir de la dépression liée aux politiques d’austérité actuelles qui sont un cercle vicieux car ces politiques n’ont pas conduit à la rigueur en raison de la récession. L’équilibre de la balance des paiements ne s’est pas fait par des politiques d’offre plus rentables mais par la diminution de la demande et l’austérité avec le cercle vicieux de toujours plus d’austérité et de chômage. Cette politique a été menée contre le bon sens en raison, il faut le dire, de la pression allemande.

Marine le Pen dirait, sans doute, à la BCE si vous refusez ce plan, nous réquisitionnerons la Banque de France pour fabriquer nos euros et ceci sans votre consentement. L’option sortie de l’euro reste donc possible car, de fait, cela signifierait la fin de la zone euro, mais elle n’est pas un préalable. Marine le Pen n’a jamais dit qu’elle commencerait, si elle arrivait au pouvoir, à sortir de la zone euro. Elle a toujours mis en avant une concertation et un référendum. Je suis d’ailleurs opposé à cette idée de référendum, à titre personnel, car pour négocier avec la BCE et avec les Allemands, il faut avoir un fusil chargé et non pas un fusil qu’on pourrait éventuellement utiliser, après un référendum !

La maîtrise de la dépense publique est nécessaire et je l’ai, à maintes reprises, souligné avant d’être député. La France doit diminuer sa dépense publique pour arriver au maximum à 50% du Pib alors qu’elle est actuellement à 57%. En cela, la rigueur allemande est un exemple. Mais l’Allemagne veut bien qu’on crée de la fausse monnaie-car c’est ce que nous faisons actuellement- pour diluer les dettes de ses banques qui ont prêté aux pays du Sud et ont toujours de mauvaises créances. Egalement, il s’agit pour elle d’éviter de perdre les 600 milliards de Target 2-les transferts de la Banque Centrale- dans le collapse de la zone euro. L’épargne excédentaire allemande continue, en effet, d’être distribuée -via la Banque Centrale- aux pays du Sud ; c’est le principe même d’une zone à monnaie unique. Je crois que Madame Merkel et le docteur Schäuble ne connaissent rien aux phénomène monétaires et n’ont pas compris ce qui se passe., contrairement au professeur Sinn, ou aux membres d’Alternative pour l’Allemagne.

Madame Merkel comme nos gouvernements ne semblent pas avoir compris que si on refuse la monétisation des dettes des banques (et donc indirectement leur nationalisation), le bail in des banques, voulu par eux, entraînera, avec une nouvelle crise bancaire, nos dirigeants à piquer l’épargne des Allemands ou desFrançais pour essayer d’éviter la faillite des banques. Elle deviendra alors la femme la plus impopulaire d’Allemagne et de l’Europe, elle retrouvera la place qu’elle mérite dans l’histoire, sa place de physicienne qui expérimente comme les apprentis sorciers ce qui cache, en fin de compte, une non maîtrise totale des évènements politiques. Un jours l’histoire le dira, Madame Merkel a trahi l’Europe et l’Allemagne ! Marine le Pen est le contraire de Madame Merkel, l’histoire aussi le montrera.

Il y a 30 ans, le 17 février 1986, naissait l'acte unique européen. Quels ont été, selon vous, les progrès et les erreurs de ce texte et de ces évolutions ? Quelles seraient les adaptions nécessaires à mettre en place ?

Je crois qu’il faut totalement repenser la construction européenne sur la base de l’Europe des Nations et de la coopération internationale, c’est ce que disent d’ailleurs Marine le Pen et le Front. Je suis – comme vous avez pu le comprendre – opposé à une sortie brutale de la zone euro mais je suis, par contre, favorable à une sortie, après référendum, de la France des institutions actuelles de l’Europe. J’ai cru que ces institutions étaient réformables ; je reste un véritable européen de civilisation et de culture en tant qu’Alsacien. Mais bientôt 2 ans au Parlement m’ont appris une chose : il n’y a rien à attendre de cette Europe. Je ne suis donc pas éloigné de la position du Front. J’ai évolué. Il faut de manière concertée reconstruire l’Europe et poser de nouveaux actes fondateurs avec l’indispensable suppression de la Commission et la mise en place de la politique concertée au niveau du Conseil, sans pouvoir fédéral.

Il faut une Europe de la coopération des Nations avec des agences ouvertes à ceux qui veulent aller de l’avant. Il faut rétablir au Conseil le principe de l’unanimité de manière stricte – ce qui sera facilité par la suppression de la Commission - car notre politique étrangère ne peut dépendre – on l’a vu avec les sanctions russes – de pays qui sont instrumentalisés par les Etats- Unis, notre politique ne peut dépendre des pays baltes qui ont des comptes à régler et qui sont dirigés de Washington.

L’Europe actuelle est vassalisée à une puissance extérieure, les Etats-Unis, et ceci n’est pas possible pour l’Européen que je suis qui conçoit l’Europe avec la Russie. Je veux à titre personnel cette Europe continentale pour faire face à la menace de l’Islam radical mais aussi pour ne pas dépendre, demain, d’une autre puissance extérieure : la Chine.

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