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Jean-François Copé : "Je serai celui qui pose les questions qui fâchent sur ce que les présidents de droite n'ont pas fait"
©Reuters

Grand entretien

Alors qu'il vient de réunir le nombre de parrainage pour être le candidat officiel à la primaire, le député de Seine-et-Marne s'exprime sur les risques liés au traitement de sujets tels que l'islam en France, la primaire de la droite.

Jean-François Copé

Jean-François Copé

Jean-François Copé est député de Seine-et-Marne et Maire de Meaux. 

Il est candidat à la primaire présidentielle des Républicains de 2016.

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Vous venez d'indiquer avoir rassemblé les parrainages nécessaires pour concourir à la primaire de la droite, plusieurs jours avant la date limite du 9 septembre. Quels sont les prochains défis que vous aurez à affronter ? Comment abordez-vous cette nouvelle étape avant le vote prévu fin novembre ?

Jean-François Copé : Oui, j’ai réuni tous les parrainages pour être candidat à la primaire de la droite et du centre. Cela malgré les pressions, les insinuations, les intimidations de certains membres de la "bande des quatre" autres candidats qui ont tout fait pour que je ne puisse pas concourir. Ne leur en déplaise, je serai le cinquième élément de cette primaire. Que personne ne doute de ma détermination : j’irai jusqu’au bout pour défendre mes idées, celles d’une vraie rupture avec trente ans de reculades des Présidents de la République successifs qui ont mené la France dans cet état actuel de vulnérabilité terrible. Vulnérabilité face au terrorisme islamiste et à la délinquance. Vulnérabilité économique face au chômage et à la compétition internationale. Vulnérabilité morale avec des Français désemparés qui n’arrivent plus à être fiers de leur pays qui décroche. C’est avec cette spirale démissionnaire et dépressive qu’il faut rompre pour faire enfin entrer la France dans le XXIe siècle. Non pas en promettant la "rupture" comme en 2007, mais en la faisant, vraiment. 

Les intentions de vote à la primaire vous donnent toujours des scores faibles, alors que vous avez annoncé votre candidature à la primaire le 14 février dernier. Sur quoi comptez-vous pour rattraper ce retard, quelle stratégie comptez-vous mettre en oeuvre ?

Je vais faire entendre ma différence en disant la vérité tout simplement. Je suis le seul des candidats à ne pas avoir été membre de l’exécutif et donc comptable de l’occasion manquée de réforme du quinquennat 2007-2012. Je ne suis prisonnier d’aucun bilan à défendre. J’ai une liberté totale de parole pour défendre un vrai projet de droite décomplexée. Je vais poser les questions qui fâchent : pourquoi les Présidents de droite n’ont-ils pas supprimé les 35 heures ou l’ISF ? Pourquoi cette fausse réforme des régimes spéciaux cédée aux syndicats ? Pourquoi avoir supprimé la double peine ou coupé dans les effectifs de la police ou de l’armée ? Pourquoi avoir augmenté les impôts en fin de quinquennat ? Pourquoi ces atermoiements face à l’islamisme (Souvenez-vous que j’ai dû me battre avec mes amis députés pour imposer à l’Elysée et à Matignon l’interdiction de la burqa)? Pourquoi ? Eh bien, par peur de heurter le politiquement correct. Par peur de bousculer ceux qui affaiblissent la France à savoir le gauchisme aveugle, incarné par Nuit Debout ou monsieur Martinez de la CGT. Par peur de prendre à bras le corps la montée de l’islamisme en combattant les ennemis de la République qui la vomissent. Moi je n’ai pas d’état d’âme. Je ne ferai pas "d’ouverture". Je m’honore de déplaire à la bien-pensance Islamo-gauchiste. Je propose de réformer la France en trois mois, par ordonnances comme le général de Gaulle en 1958, au service de trois priorités : la liberté économique avec un programme chiffré de baisse massive des impôts et des dépenses ; l’autorité via un tournant régalien pour réarmer notre pays qui a trop baissé la garde depuis 30 ans avec le recrutement de cinquante mille policiers, gendarmes, militaires, magistrats, personnels pénitentiaires, avec la construction de 20 000 places de prison, avec la création d’une rétention antiterroriste pour interpeller les djihadistes avant qu’ils ne passent à l’acte, avec le retour assumé du patriotisme à travers l’obligation de lever le drapeau à l’école et un service national obligatoire pour tous ; enfin la lutte contre le communautarisme islamiste avec l’interdiction du port du voile dans tous les établissements publics, la prohibition du burkini, que j’ai été le premier à proposer, et la création d’un délit d’islamisme radical pour ne plus laisser passer la moindre provocation contre la République. Personne ne va aussi loin que moi. C’est seulement ainsi que nous remettrons la maison France à l’endroit. Ainsi que nous retrouverons l’indépendance, que nous avons peu à peu soldée, et qui sera la clé pour que la France retrouve son rang dans un XXIe siècle lourd de menaces.

Vous avez dit cet été que les autres avaient fait leur temps, l'emballement médiatique autour du départ d'Emmanuel Macron ne vous met-il pas un peu dans la même situation, d'un homme qu'on a déjà vu, qui a déjà été ministre il y a longtemps, chef de parti, bref qui tomberait dans la catégorie de ceux qui donnent l'impression aux Français que la politique ne se renouvelle pas ?

Je suis surtout un homme de terrain, de proximité. Je suis le seul candidat à être maire d’une ville moyenne, à l’image de la France, à la fois au cœur de la ruralité et avec des quartiers difficiles. A ce titre, je suis le seul en prise avec la réalité des Français : Meaux n’est pas Bordeaux, encore moins Neuilly ou le 7eme arrondissement de Paris. Quant à Bruno Le Maire, il n’a jamais voulu conquérir une ville, alors que le mandat de maire est le seul qui donne une vraie proximité avec les Français… Certes, j’ai été ministre du budget, le dernier d’ailleurs à baisser simultanément le déficit, la dette, les impôts et les dépenses publiques, mais je n’ai jamais exercé les plus hautes fonctions. J’ai donc de l’expérience mais sans avoir ni été Président de la République comme Nicolas Sarkozy, ni Premier ministre comme Alain Juppé ou François Fillon. On ne peut me ranger dans la même catégorie que ceux qui ont dirigé la France et échoué à la réformer. Quant au renouveau, qui est la ligne d’Emmanuel Macron comme de Bruno Le Maire, c’est simplement du marketing démago. En quoi crier sur tous les toits "je suis le plus jeune" ou "je me repens d’avoir fait l’ENA" peut-il changer la vie des Français ? C’est un poujadisme tout juste bon à faire vendre de la presse, mais clairement insuffisant pour redresser notre pays ! Emmanuel Macron vient de trahir François Hollande qui pourtant lui a offert une existence politique après un passage sans grand résultat au ministère de l’Economie. C’est donc déjà un vieux routier de la politicaillerie… Les Français ne se laisseront pas duper. 

Cet été, vous avez pu donner l'impression d'être fatigué par la campagne... Suite au ralliement de Christian Jacob à Nicolas Sarkozy, vous avez écrit sur Twitter "Rude semaine ! Après Sarko à Châteaurenard et Jacob mon ami de toujours qui part chez Sarko. Chirac, toi qui as vécu ça en 1995, aide-moi !"...

Fatigué, jamais ! Blessé, certainement ! Je ne suis pas une machine. Certains qui me doivent une partie de leur carrière qui, au-delà de la politique, étaient des amis avec lesquels j’ai partagé tant d’émotions et de combats, ont préféré aller à la soupe chez des personnes qu’ils critiquaient hier plutôt que d’honorer la fidélité en amitié… Chacun sa conception de la vie. Moi, je n’ai jamais trahi un ami. Maintenant, ce ne sont pas des ralliements tactiques qui feront la différence, mais la dynamique des idées, la pertinence du projet que je porte avec les près de 300 élus et 3000 adhérents qui m’ont parrainé. 

Vous connaissez bien le terrain et les militants. En 2016, quand on a une minute sur un marché pour convaincre quelqu'un, il faut dire quoi ?

Vous avez cru en la rupture en 2007. Vous avez été déçu. Vous l’avez dit en faisant perdre Nicolas Sarkozy en 2012. Si vous ne voulez pas que la déception de 2007 se reproduise en 2017 ne votez pas pour ceux qui ont déjà eu la main qui tremble. Votez pour la vraie rupture : celle de la droite décomplexée qui peut renverser la table en rétablissant l’ordre, en baissant les impôts et en ne cédant rien au communautarisme islamiste.

Le gouvernement a montré qu'il souhaitait réagir à travers la relance d'une Fondation pour l'islam de France dirigée par Jean-Pierre Chevènement. Mais l'islam sunnite étant par nature dénuée de clergé, est-il vraisemblable d'imaginer des solutions à court terme ? Vous disiez en 2013 concernant la politique étrangère qu'elle n'était pas le "temps de l'immédiat". Cela pourrait-il s'appliquer au sujet de l'islam de France ?

L’expérience du CFCM initiée par Nicolas Sarkozy a, pour le moment, échoué. Quand je vois son président défendre le burkini au nom de la liberté de se vêtir comme on le souhaite, je m’inquiète ! Cela veut dire que le CFCM, dans sa forme actuelle, n’est pas à ce jour le bon interlocuteur pour régler la question de l’Islam de France. Je crains que l’initiative du gouvernement n’échoue aussi. Pour ma part, je propose un Code de la laïcité et des cultes qui doit encadrer la pratique du culte musulman en France. Un sujet qui n’a pas été réglé par la loi de 1905, puisque l’Islam n’était alors pas présent en métropole. Ce code rappellera que les cultes sont soumis au respect des lois de la République et que nul ne peut se prévaloir de ses croyances religieuses pour bénéficier d’un traitement particulier. Outre l’interdiction du port du voile dans les établissements publics, ce Code permettra notamment les baux emphytéotiques pour construire des lieux de culte. En contrepartie, sera imposée une obligation de transparence totale des financements. Ceux-ci devront transiter par la Fondation des Œuvres de l’Islam de France et il n’y aura aucune tolérance à l’égard des prières de rue, sauf procession religieuse organisée déclarée auprès des autorités municipales. Il mettra aussi en place une certification des imams assurant qu’ils soient formés aux exigences de la laïcité et aux lois de la République ; si les imams s’y refusent, ils devront être interdits d’exercer. Il faut également imposer que hors ce qui relève de la liturgie, le prêche dans l’ensemble des lieux de culte se fasse en français. Enfin, il faut être intraitable sur tous les comportements contraires à nos valeurs, à notre mode de vie, à notre identité et ne rien laisser passer sur la question emblématique de l’égalité homme/femme. 

Vous revenez d'un déplacement en Afrique où vous avez été à la rencontre des soldats français engagés dans l'opération Barkhane. Quelles observations avez-vous pu faire ?

Je reviens de trois jours passés au Tchad, au Niger et au Mali, au milieu de nos soldats engagés dans cette opération qui vise à protéger du terrorisme une région totalement déstabilisée par chaos libyen. Faire tomber Kadhafi sans alternative crédible pour le remplacer était une grave erreur d’appréciation dont nous payons toujours le prix. J’ai tiré trois enseignements de ces quelques jours très forts : d’abord, nos soldats sont admirables. J’ai trouvé chaque homme à son poste malgré une immense adversité. Le théâtre d’opération où l’armée se déploie est cinq fois plus étendu que la France avec des conditions de vie extrêmes, une population parmi les plus déshéritées au monde et des infrastructures quasi inexistantes… Ensuite, le mérite de nos hommes est d’autant plus grand que leur mission, qui a permis d’empêcher l’effondrement du Mali et contient le terrorisme dans cette zone, se fait avec très peu de soutien international. L’Allemagne par exemple, premier budget militaire de l’Europe, apporte une contribution plus que timide à cette opération. La France ne peut plus continuer à porter presque seule et sans contrepartie un effort de guerre qui devrait relever de l’Europe. Et puis, j’ai pu constater la vétusté et la dégradation de certains matériels : nos soldats sont incroyables de dévouement. Ils font beaucoup avec très peu ! Si nous n’investissons pas sérieusement dans notre appareil de défense, nous risquons à court terme d’avoir une armée paupérisée avec une faible capacité de projection. C’est pourquoi il est temps d’assumer un vrai tournant régalien après des années de coupes : durant le dernier quinquennat, le budget de la défense est passé de 38,1 milliards € à 32 milliards. Depuis il est encore descendu à 31,4 milliards €. Les effectifs ont diminué de 41 840 personnes entre 2007 et 2012 et de 17 217 personnes depuis 2012... Je propose de réinvestir massivement dans la défense nationale : en augmentant de 10 000 le nombre de militaires au cours du prochain quinquennat et enpassant le budget de la défense de 1,4% à 2 % du PIB d’ici 2027. Cela implique de dégager environ 25 milliards € sur le prochain quinquennat. Les récents cadeaux électoraux de François Hollande ont un coût de 6,5 milliards d'euros en 2016. Leur annulation permettrait de financer les besoins de la défense. La France n’est grande que lorsque son armée est forte. Ces quelques jours au Sahel au contact de nos soldats m’ont conforté dans cette conviction.

Les différents candidats sont critiqués pour dessiner des programmes économiques peu en rapport avec le monde d’aujourd’hui. Ainsi, le G20 de ce week-end abordera des questions telles que la faible croissance mondiale ou les inégalités. Quelles sont vos réponses à ces questions ? 

Un programme économique de droite décomplexée rompt avec l’idéologie anti-travail de la gauche et avec la frilosité d’une certaine droite à l’eau tiède. Sa philosophie tient en un mot : liberté ! Le rôle d’un Etat moderne est d’assurer les conditions de sécurité suffisantes pour que l’économie prospère (sécurité des biens et des personnes, sécurité juridique, qualité des infrastructures, formation de la main d’œuvre…). Cela suppose de revenir sur les 35h, la retraite à 65 ans, l’ISF, comme cela aurait dû être fait depuis des années ! Pour le reste, il s’agit de faire confiance aux personnes, de leur dire "allez-y, entreprenez, prenez des risques !". Cet état d’esprit je veux qu’il soit incarné avec ma proposition de donner un numéro de Siret pour tous dès 16 ans afin de signifier à notre jeunesse que son avenir c’est l’entreprenariat, pas l’assistanat ! Cette politique de liberté économique à tous les étages que je propose repose sur 3 piliers :

1. La baisse des prélèvements obligatoires : je propose un choc fiscal de 50 milliards de baisses d’impôts (35 pour les entreprises - 30 milliards de charges en moins et 5 milliards de baisse de l’IS - et 15 milliards pour les ménages - 4,5 milliards de suppression de l’ISF, 5 mds de baisse de l’IR, 4 milliards de baisse des charges salariales pour augmenter les salaires nets, et le rétablissement de la fiscalité familiale) .

2. La libéralisation du marché du travail : avec une arme "fatale" le référendum d’entreprise pour lever tous les blocages, notamment syndicaux, sur l’organisation du travail. J’ajoute qu’il faut mettre fin au paritarisme qui se traduit par une gestion contestable des caisses (structurellement en déficit) et une cogestion de fait de la France avec les syndicats.

3. Le recentrage de l’Etat sur son cœur de métier, le régalien, et la baisse de son interventionnisme à tout va dans l’économie : cela passe par une réduction de 100 milliards des dépenses sur 5 anspour revenir à 50% de dépenses publiques sur le PIB en fin de mandat. Cela passe par la fin de l’emploi à vie dans la fonction publique, la retraite à 65 ans, la fusion des régimes, la fusion départements/régions, le gel des dépenses sociales, la suppression du Tiers payant, la suppression AME, la dégressivité des allocations chômage, le gel de dépenses sociales et des dépenses de l’Etat…. Cela passe aussi par une détransposition de toutes les directives européennes que nous avons surtansposées (notamment dans le domaine agricole) et une retransposition à la moyenne allemande.

Soyons lucides, 2017 est l’une des dernières chances pour – au moins à moyen terme – relever la France, la faire rentrer dans la compétition internationale du XXIe siècle et la replacer sur le podium des grandes nations. Si nous reculons une nouvelle fois, si nous ne réparons pas les dégâts de 30 ans de démissions, alors notre pays s’enfoncera inexorablement dans une crise plus profonde, et cela au détriment de l’avenir de nos enfants dont les éléments les plus dynamiques n’imaginent déjà souvent plus leur avenir qu’à l’étranger.

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