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Guet-Apens contre des policiers : un simple (mais énorme) problème de volonté politique
©MICHEL SEIMANDO / AFP

Émeutes au quotidien, oubli du régalien

Des policiers qui s'étaient déplacés pour un véhicule en feu se sont retrouvés encerclés et visés par des tirs de projectiles, jeudi soir à Mantes-la-Jolie (Yvelines). Une scène devenue banale dans la France d'Emmanuel Macron, Nicole Belloubet et Christophe Castaner.

Xavier Raufer

Xavier Raufer

Xavier Raufer est un criminologue français, directeur des études au Département de recherches sur les menaces criminelles contemporaines à l'Université Paris II, et auteur de nombreux ouvrages sur le sujet. Dernier en date:  La criminalité organisée dans le chaos mondial : mafias, triades, cartels, clans. Il est directeur d'études, pôle sécurité-défense-criminologie du Conservatoire National des Arts et Métiers. 

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Il est étrange de voir des médias d'"information" parler de "flambée des guet-apens", reflétant sans doute l'ahurissement des officiels qui leur tiennent la plume - et tombent eux-mêmes de la lune. Restaurons les faits : ces embuscades visant policiers, gendarmes, pompiers etc., relèvent du quasi-quotidien dans la France de Macron-Castaner-Belloubet.

Rien qu'en octobre, la seule Île-de-France en a subi à Boissy-Saint-Léger, Champigny-sur-Marne, Étampes, Émerainville, Les Mureaux, Mantes-la-Jolie, Trappes, etc.

Sur la réalité du terrain, lisons ce cri d'alarme d'un syndicat de police "À chaque soir son petit guet-apens... Mode opératoire : les émeutiers embrasent un mobilier urbain et des véhicules pour attirer pompiers et policiers sur le site. Sur place, soldats du feu et forces de l'ordre sont en zone de guerre. Projectiles, cocktails Molotov, tirs tendus de feux d'artifice, engins explosifs improvisés : tout est bon pour blesser ou tuer les intervenants".

Or, de Roubaix à Montpellier, de Nantes à Grenoble et à la banlieue lyonnaise ; dans de plus petites villes aussi, Romans, Tours et Dijon récemment, ces émeutes n'entraînent  jamais d'interpellations. Quand elles s'achèvent, les voyous rentrent au bercail sans que nul ne les inquiète - en attendant le prochain guet-apens. Nous avons de cela cent témoignages issus de toute la France.

Pourquoi cette paralysie officielle ? Presque toutes ces embuscades adviennent dans, ou aux limites, de ces quartiers hors-contrôle où la police pénètre désormais rarement, de crainte de violences urbaines pires encore. Qu'on les baptise "Zones franches urbaines", "Zones urbaines sensibles" ou autre aimable euphémisme, ce sont des zones de non-droit ; que les criminels du cru veulent sanctuariser toujours plus - émeutes... intimidation.... chantage électoral... corruption... Pour y mener à l'aise leurs trafics : stupéfiants, proxénétisme, etc.

Hier encore : "Le Val Fourré" à Mantes-la-Jolie ; dans les Yvelines toujours, "Les Merisiers" à Trappes, "La Vigne Blanche" et "Les Musiciens" aux Mureaux. Ainsi de suite en France, des secteurs criminalisés depuis parfois un demi-siècle où, de fait, la loi nationale et l'appareil d'Etat ont disparus.

Or si les émeutes sont visibles, ce qui règne vraiment dans ces coupe-gorge est le discret pouvoir criminel de caïds enrichis à milliards d'euros par le trafic du haschisch - désormais, de la cocaïne. Des caïds pas du tout coupés de la société : ils payent grassement des avocats parfois connus, qui les protègent à distance. Ces caïds accèdent aussi au sommet de la société par leurs accointances dans divers milieux frelatés : proches de footballeurs, "monde de la nuit", showbiz, artistes, qu'ils fournissent en stupéfiants, parfois en chair fraîche : Epstein n'est pas une triste singularité américaine. La aussi, les témoignages de policiers de terrain, et autres, sont édifiants.

Ces bandits riches et branchés peuvent déclencher une émeute - ou l'arrêter - d'un claquement de doigt ; face à eux, un appareil d'Etat myope et à-demi impuissant.

Au sommet, le président Macron semble délaisser le régalien - sauf communication palliative. Évoquer ces quartiers hors-contrôle, c'est parler de la fameuse "politique de la ville" pour laquelle M. Macron ne fait rien du tout. Passé l'épisode Borloo, vite renvoyé à sa niche, il ne s'y passe désormais plus rien. Ce terrain préventif crucial pour la paix sociale est déserté. À la justice, la somnolente Mme Belloubet fait du Taubira basses-calories, rien de plus.

Et face à eux directement, les caïds et leurs troupes trouvent un M. Castaner qui passe parfois à la télé lire de travers une note qu'il semble saisir à moitié. D'une façon qui serait comique si cela n'affectait pas la sécurité du pays, M. Castaner est suivi de près par M. Nunez, qui, façon Laurel et Hardy, vient recoller les morceaux du vase que son impayable ministre a cassé. Inutile de dire que ces caïds ont de longue date classé Laurel-Nunez et Hardy-Castaner dans la catégorie "bouffons" et leur mettent tant et plus la pression, pour conquérir des espaces criminels nouveaux.

Ces mêmes bandits ont enfin réalisé que c'était les Gilets Jaunes que l'on réprimait et pas eux. Or la logique des malfaiteurs est enfantine - même M. Castaner y arriverait en s'appliquant un peu : les bandits ne s'arrêtent que quand on les arrête. On, c'est la police, bien sûr. On ne les arrête pas ? Eh bien, ils continuent - même, ils accélèrent leurs prédations. Attendons donc la prochaine émeute. Elle ne saurait tarder.

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