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Fiscalité : les drôles de calculs du Figaro magazine
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Zone franche

A un million d’euros par an et des propriétés foncières en veux-tu en voilà, les "Français types" du Figaro magazine n’ont effectivement pas très intérêt à voter Hollande.

Hugues Serraf

Hugues Serraf

Hugues Serraf est écrivain et journaliste. Son dernier roman : La vie, au fond, Intervalles, 2022

 

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Libé m’agace souvent, avec ses papiers sociologiques à la gomme, décrivant la France sous Sarko comme une espèce de champ de ruines où des familles misérables se partagent une ultime barquette de frites avant de sombrer totalement. Mais je crois qu’il n’est jamais que le pendant sinistre du Figaromagazine : au moins aussi grotesquement biaisé dans sa représentation du monde.

L'hebdo de Pépé Dassault vient d’ailleurs de se surpasser, avec un article censé alerter les Français sur les risques fiscaux qu’ils prendraient à voter François Hollande. Titré « Impôts : ce que cinq foyers types vont payer », ce petit bijou de pataphysique nous fait effectivement rencontrer cinq familles « bien de chez nous » et partager leur dilemme de deuxième tour (elles sont tellement « typiques », en fait, que j’ai cru reconnaître ma cousine et mon beau-frère dans ces portraits anonymes. Lisez, ça vous fera certainement le même effet).

Voyons voir : il y a d’abord le couple de retraités (Le Figaromagazine est un canard de séniors, ce n’est pas une insulte de le préciser), vivotant sur une petite pension de 6 000 euros par mois et partageant leurs dernières années entre un modeste appartement parisien (1,5 million d’euros) et une fermette normande (600 000 euros). On imagine que sans les intérêts de vagues placements (750 000 euros en assurance-vie et autres), ils auraient du mal à joindre les deux bouts. Surtout qu’il leur faut encore aider leur fifille à l’occasion, laquelle n’a pas les moyens de s’acheter une auto pour aller au boulot.

Hé bien, à eux, si c’est Hollande qui l’emporte, ça va leur coûter un bras, un bras et demi, je vous le dis ! Ces socialistes, ils ne respectent même pas les vieux...

Vient ensuite cette sympathique famille de « cadres sup’ » lyonnais entre deux âges dont les revenus mensuels tutoient les 12 000 euros, ce qui leur permet tout juste de payer les traites d’un 120 mètres carrés à la Croix-Rousse (1,2 million), de rémunérer une employée de maison à plein temps (15 000 euros par an) et de mettre un peu d’argent de côté pour les études des enfants. Sans le modeste 90 mètres carrés de La Clusaz dont ils ont eu la chance d’hériter (500 000 euros), ils ne partiraient sans doute pas bien souvent en vacances. Et pourtant, cette crapule de Hollande s’apprête à majorer leurs impôts de tous les côtés et, tenez-vous bien, à réduire la déduction de 7 500 euros pour l’emploi de personnel à domicile !

Une petite veuve chichement installée en banlieue : même elle, Hollande veut se la farcir...

Ah, il y aussi ce duo de Parisiens que le rédacteur du Fig’ mag', qui doit être de gauche, comme tous les journalistes de ce pays, qualifie (sarcastiquement ?) de « fortunés ». Bon, à eux deux, ils rapportent tout de même un million tout rond à la maison chaque année ― la « maison » en question étant alternativement une résidence parisienne à 1,8 million ou une bicoque arcachonnaise à 1,3 million ― et tablent encore sur des revenus de placements évalués à 1,5 million (d’ailleurs exonérés d’ISF en tant « qu’outil de travail »)... Mais on les sens fébriles, nerveux, tendus pour l’avenir même s’ils n’ont heureusement plus d’enfants à charge.

Ceux-là, si Hollande passe, il les fiche à la rue c’est sûr ! Le salaud !

J’aime aussi beaucoup cette petite veuve chichement installée à Saint-Cloud ― une banlieusarde, quoi... ― qui se débrouille avec une pension de réversion de 30 000 euros, deux propriétés estimées conjointement à 3 millions d’euros et pour quelque 2 millions d’euros d’actions et obligations. Même cette gentille mamie-là (elle a un petit côté Liliane sur l’illustration), Hollande veut se la farcir, le pervers !

Bon, mais au Figaromagazine, on lit Libé, et on sait qu’il existe aussi une vraie pauvreté terminale, comme le démontre le portrait du couple de Nantais qui ferme la marche. Deux p’tits salariés lambdas cumulant des revenus aux allures de pourboire (4 350 euros nets, c’est pas plus ou moins le SMIC ça ? Je ne me souviens plus...) et habitant une quasi-caravane à 400 000 euros. Surement que le sosse, il va les laisser en paix, ceux-là ! Il n’aura pas le cœur de prélever quoi que ce soit sur les 30 000 euros de leurs Livrets A !

Loupé : ces petits, ces sans grades, changer de président leur coûtera 500 euros par an (le prix d’une tranche de jambon, ça ?) !

N’empêche, on reste un peu sur sa faim et on aurait aimé que le journal nous renseigne sur la manière dont un intermittent du spectacle septuagénaire et chargé de famille se défend contre les gabelous, lesquels le forcent à se tuer à la tâche juste avant de prendre leur retraite de la fonction publique à 55 ans. Ah ben non, suis-je bête, les intermittents du spectacle qui souffrent sous Sarko, c’est plutôt pour Libé, non ?

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