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Européennes : soulagement teinté d’inquiétude pour les milieux d’affaires français
©EMMANUEL DUNAND / AFP

Atlantico business

Ecologie, immigration, accords commerciaux : les demandes qui ressortent du résultat des élections vont imposer des réponses incontournables. La question que se posent les chefs d’entreprise est de savoir si Emmanuel Macron aura les moyens de les apporter.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Sur le terrain politique, les élections européennes ont attiré une participation inhabituelle mais elles ont aussi montré à quel point le paysage politique traditionnel est désagrégé. La gauche socialiste n’existe plus, la droite est explosée .. Restent les verts qui arrivent en 3 e position et qui correspondent à la vague verte qui déferle partout en Europe. Mais le mouvement de Marine Lepen devance la liste de « En marche », parrainée par Emmanuel Macron.

Les responsables politiques vont évidemment commenter à l’envie, les effets de ce résultat, et notamment le duel entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron mais les milieux d’affaires considèrent qu ‘avec un tel duel, on n’avancera guère . Pour eux, la véritable interrogation porte sur deux points.

Le premier est de savoir comment le parlement européen va s’organiser pour dégager une majorité très pro-européenne.

Le deuxième point concerne l impact que cette élection va avoir sur la politique intérieure française. Quelles leçons le président de la république peut en tirer et avec qui il peut gouverner ?

Pour les milieux d’affaires, ces resultats sont intéressants mais ils signifient aussi que les responsables politiques n ‘auront   plus le droit de mentir. Le résultat des élections européennes ne condamne pas l’Union européenne, mais appelle à des réponses claires sur des dossiers qui ont un impact sur la vie quotidienne.

Contrairement à ce qu‘on pouvait imaginer ou craindre, l’Union européenne n’a pas été rejetée par la majorité des électeurs qui se sont exprimés.

D’abord, le taux de participation qui est supérieur à ce qui était annoncé, traduit plutôt un attachement à l’Europe qu'une volonté de s’en défaire.  Le syndrome du Brexit n’a pas fait de progrès, il a plutôt régressé.

Le spectacle désolant que donne la Grande Bretagne a sans doute refroidi beaucoup de ceux qui étaient tentés par la sortie de l’Union européenne. Mais pas seulement, le résultat des élections a donné un avantage sensible aux listes qui ont eu le courage de rappeler les bénéfices de l’Union européenne, sur la paix intérieure, la protection de l’environnement, la protection sanitaire et sociale, la liberté de circuler, le succès d’Erasmus chez les jeunes, les taux d’intérêt, la protection monétaire aussi avec l’euro.

Enfin, et c’est très important, les moteurs qui ont le plus fortement actionné les électeurs vont appeler à des réponses claires et fortes, à la fois au niveau de la politique européenne que des politiques nationales 

Ces moteurs qui ont fait voter les électeurs sont au nombre de trois : l’écologie, l’immigration et les accords commerciaux avec toute la problématique que porte la mondialisation.

Ces trois moteurs offrent des enjeux à la fois européens et nationaux. Ils appellent donc tous ceux qui seront aux manettes de prendre des décisions claires et lourdes et de confirmer des stratégies responsables. Plus question de mentir et de jouer avec les chiffres et les faits.

Le 1er moteur est celui de la revendication écologique.C’est le risque environnemental et climatique qui a ramené vers les urnes les jeunes générations et cela dans tous les pays de l’Union européenne. Jusqu’alors, l'engagement des jeunes était purement associatif, le vote montre qu‘ils considèrent aussi que la solution doit venir des institutions politiques. Sur l’écologie qui concerne tous les candidats, pas question de mentir et de raconter n’importe quoi. En matière environnementale, il existe des réalités incontournables. Les émissions de gaz carbonique sont le fait d’un coté de nos habitudes quotidiennes de consommation et par ailleurs, de nos systèmes de production. Le problème est mondial.

Les populations occidentales et européennes ont leur part de responsabilités, donc tout ce qui pourra être fait pour inciter à la baisse des émissions de CO2 sera bon à prendre. Incitations culturelles, macroéconomiques et fiscales. Mais ces mesures ne seront acceptées et portées par les opinions que si elles ne se résument pas à punir les pollueurs, mais à répartir l’effort de coordination. C’est donc du ressort des nations et de Bruxelles.

Mais la lutte contre le réchauffement climatique est aussi et surtout de la responsabilité des plus grands pollueurs. Et les grands pollueurs ne sont pas en Europe.  

Les Etats- Unis, l’Inde et la Chine représentent à eux trois plus de 80 % des émissions polluantes. Il faut donc convaincre les Américains à changer leur modèle, mais il faudra aussi aider les pays émergents. Ces pays fonctionnent au charbon, au pétrole et au gaz. Donc le défi de la transition écologique leur appartient en chef. Ou alors il leur faudrait abandonner leur objectif de croissance.

Hors de question, tout l’enjeu des populations occidentales qui prônent une baisse des émissions de gaz à effet de serre va être de transformer le modèle de production des émergents. C’est un énorme challenge beaucoup plus compliqué à organiser qu’une marche pour le climat entre République et Nation, un samedi après-midi à Paris.

Le deuxième moteur concerne la régulation de l’immigration. Là encore, il va falloir avoir le courage de dire la vérité. Parce que l’Europe ne pourra pas accueillir toute la misère du monde et d’abord cette de l’Afrique noire. Il faudra donc réexpliquer aux descendants de l’époque coloniale que l’essentiel des migrants appartiennent à des populations complètement déshéritées et sans aucun process de croissance économique. La seule solution pour eux est de se rapprocher de la lumière de l’Occident. Alors que l’Europe devra comme pour la lutte contre le réchauffement climatique aider au développement économique des pays qui ne produisent aujourd’hui que des migrants ou des islamistes radicaux.

Dire la vérité va consister aussi à expliquer aux Européens qu’ils ne peuvent pas accueillir toute la misère du monde, mais qu’en revanche, ils peuvent accueillir des populations dont ils peuvent avoir besoin. Les frontières ne peuvent pas être ouvertes, mais les immigrations peuvent être choisies en fonction des besoins et des capacités d’accueil qui dépendent de chacun des pays européens.

Le troisième moteur porte sur les accords commerciaux. Les populations européennes ont mal vécu la vague de mondialisation accélérée depuis les années 2000, parce que cette vague s’est traduite par des délocalisations et du chômage. La solution ne passera pas par l’école de Donald Trump, c’est à dire par le protectionniste. A noter que le président américain est beaucoup moins protectionniste dans les faits que dans ses tweets. Et pour cause, les chaines de production sont complémentées éclatées entre différents pays. Une voiture automobile se compose d’éléments venant d’une dizaine de pays différents. Les marchés de consommation en revanche sont plus simples. Les principaux débouchés pour les produits de consommation ou d’équipement les plus courants sont principalement l’Inde, la Chine, l’Amérique du Sud et l’Afrique. L’industrie automobile européenne ne peut survivre que par ses ventes et ses fabrications éparpillées dans le monde. La croissance est ailleurs que dans le pays d’origine.

Bloquer l’entrée en Europe de produits fabriqués dans les émergents nous fait courir le risque de se voir refuser nos exportations vers ces mêmes pays.

Le problème ne se pose pas à l'intérieur de l’Union européenne où les économies se sont spécialisées avec des mécanismes de coordination et surtout avec des modèles de consommation identiques.

Le problème se pose surtout avec l‘extérieur de l’Union européenne. La question est de savoir si on continue de vivre sous l’empire d’accords commerciaux multilatéraux ou alors on revient au bilatéralisme. Avec le multilatéralisme, c’est l‘Europe qui négocie pour l'ensemble des pays de l’unions les modalités de l’accord d’échange, sur les tarifs, les normes sanitaires, sociales et environnementales, les conditions de fabrication etc... avec le pays tiers.

Si on laisse chaque pays de l’Union négocier son propre accord bilatéral, le risque, c’est la confusion et la naissance de circuits parallèles. La mise en concurrence est un facteur de progrès, certes, sauf quand cette concurrence ouvre la voie aux restrictions, aux fiscalités discriminantes, et par conséquent aux détournements et finalement au protectionnisme. 
Les conséquences négatives du Brexit portent principalement sur la difficulté qu’aura la Grande Bretagne de renégocier les accords commerciaux avec chacun de ses partenaires.
La négociation sous la tutelle de Bruxelles apporte une protection pour les consommateurs et pour les producteurs dont beaucoup ont pris conscience de l’intérêt pendant cette campagne européenne.

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