Et vous pensiez que le stevia était un édulcorant naturel et sain ? <!-- --> | Atlantico.fr
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Le Stevia n'a rien de naturel.
Le Stevia n'a rien de naturel.
©Reuters

Faux sucre et faux ami

Le Stevia est un édulcorant qui séduit de plus en plus. Mais contrairement à ce qu'en dit la publicité, ce substitut du sucre, bien qu'il soit issu d'une plante, n'a rien de naturel.

Réginald  Allouche

Réginald Allouche

Réginald Allouche est médecin et ingénieur. Il assure une consultation principalement axée sur la nutrition et la prévention du diabète de type II. Réginald Allouche a notamment publié en 2022 La nouvelle méthode anti-diabète chez Flammarion et La Méthode hépato-détox aux éditions Albin Michel.

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Atlantico :  Par quels processus obtient-on le produit commercialisé ? 

Dr Reginald Allouche : La Stevia est un édulcorant extrait d'une plante herbacée qui pousse au Paraguay et au Brésil. Le processus d'extraction est un processus très proche de celui que subit le sucre extrait des betteraves. L'action principale de ce processus d'extraction est de faire macérer les feuilles dans de l'eau puis de filtrer afin de séparer le liquide des feuilles et celui des tiges. Le liquide extrait est ensuite purifié puis, tout comme le sucre, cristallisé. La Stevia est tout comme le sucre un produit naturel qui a subi une transformation. Pour cette raison, il n'existe pas d'extrait de stevia ayant le label Bio.

La Stevia devrait devenir l'édulcorant le plus consommé d'ici 2017. Comment expliquer que cet édulcorant connaisse un tel succès ? 

La Stevia a immédiatement bénéficié de l'appellation naturelle et le fait que cette plante soit connue par les populations amérindiennes depuis la nuit des temps a renforcé l'image naturelle du produit.

Un autre facteur a joué un grand rôle pour son succès : la Stevia est apparue au moment de la polémique lancée autour de l'aspartame. Malgré de nombreuses études rassurantes sur cet édulcorant déjà ancien dans les pays occidentaux, l'aspartame est aujourd'hui vécu comme un produit issu de la chimie. Il n'a pas résisté longtemps à la vague soulevée par la Stevia. C'est un peu le combat entre la chimie et la nature. Pourtant l'aspartame n'est en fait que l'association de 2 acides aminés, rien de plus.

Aujourd'hui la Stevia a les faveurs du public et malgré les études qui rassurent quant à l'utilisation de l'aspartame, la "messe" est dite pour l'opinion.

Ce produit est présenté comme ayant la capacité de baisser le taux de glucose du sang et la tension artérielle. Ces attributions sont-elles réalistes ou le simple fruit du marketing ? 

Il existe des études sur de très petits nombres de patients qui tendraient à montrer l'effet bénéfique de la Stevia chez les personnes diabétiques. Cet effet serait d'autant plus important que la glycémie est élevée. Il faut être très prudent sur les conclusions de ces études car d'autres études contredisent ces effets. Il est important de compléter l'arsenal scientifique de la Stevia en mettant en place des études sur le long terme et sur de plus grands échantillons avant de conclure et de diffuser ces conclusions.

Concernant l'hypertension, il n'existe pas dans ce cas non plus d'études réellement probantes sur l'effet hypotenseur de la Stevia.

En revanche, la stevia à la différence du sucre ne provoque pas de carie, cela est un véritable avantage lorsque l'on connait les ravages que provoque le sucre dans le domaine de la santé bucco-dentaire.

Le FDA américaine l'a reconnue sans danger pour la santé si consommée sans excès. Pourtant, certaines études comme celle réalisée par l'UCLA en 2008 mettaient en garde contre de possibles conséquences sur la santé si consommée fréquemment et à long terme. Que sait-on aujourd'hui ? Sucrer ses aliments avec de la Stevia est-elle une bonne alternative au sucre ? 

La FDA a effectivement reconnu l'inocuité et la sécurité de la Stevia. Cela étant, il existe des études sur modèles murins (rats) et sur cultures cellulaires qui jettent le doute sur cette sécurité. Des mutations cellulaires ont été constatées dans des études dignes d'intérêt. Mais là aussi, il faut savoir raison garder et il serait nécessaire de poursuivre et d'approfondir ces travaux avant de conclure de façon certaine. Des études sur l'homme sont indispensables avant de conclure.

Ceci m'amène à insister sur un point : à quoi sert un édulcorant ? La réponse semble évidente  : avoir le plaisir du goût sucré sans les inconvénients de la consommation de sucre pur. En fait sucre et édulcorant répondent aux mêmes critères : c'est l'effet dose qui importe. Plus la dose est importante et plus les risques sont susceptibles d'augmenter.

Il vaut bien mieux se déshabituer du gout sucré. C'est dans ce cas que l'édulcorant peut aider dans une phase transitoire de "désintoxication" du gout sucré. L'édulcorant au quotidien, c'est continuer sur le chemin du gout sucré qui couvre toutes les subtilités d'un dessert. 

Finalement, ne vaut-il pas mieux préférer le sucre à toute ses alternatives si consommer à petites doses et occasionnellement ? 

Oui au mélange en petite quantité des deux : sucre et édulcorant et oui au caractère occasionnel. Il faut rappeler que le sucre a toujours été une denrée rare pour l'homme d'avant le 20ème siècle. Il n'est pas équipé pour en consommer tous les jours et à hautes doses. Nous avons pour le sucre et le gout sucré une attirance très forte. Comme pour toute attirance, il faut savoir la limiter pour ne pas tomber dans l'ennui gustatif.

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