Et si Nadine Morano avait raison ? Pourquoi Nicolas Sarkozy ne sait pas gérer ses fidèles et préfère toujours séduire ceux qui lui tiennent tête<!-- --> | Atlantico.fr
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Nicolas Sarkozy est en train de dessiner une nouvelle image et de constituer un nouveau vivier de soutiens, plus jeunes.
Nicolas Sarkozy est en train de dessiner une nouvelle image et de constituer un nouveau vivier de soutiens, plus jeunes.
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Meilleurs ennemis

Dans un entretien à l'hebdomadaire Marianne, Nadine Morano, fidèle de Nicolas Sarkozy a estimé que ce dernier allait "chercher des gens qui lui crachent à la figure" et a même menacé de faire campagne contre son mentor. Elle en a également profité pour critiquer la politique d'ouverture de l'ancien chef de l'Etat qui avait déjà été montrée du doigt en 2007.

Christelle Bertrand

Christelle Bertrand

Christelle Bertrand, journaliste politique à Atlantico, suit la vie politique française depuis 1999 pour le quotidien France-Soir, puis pour le magazine VSD, participant à de nombreux déplacements avec Nicolas Sarkozy, Alain Juppé, François Hollande, François Bayrou ou encore Ségolène Royal.

Son dernier livre, Chronique d'une revanche annoncéeraconte de quelle manière Nicolas Sarkozy prépare son retour depuis 2012 (Editions Du Moment, 2014).

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Atlantico : Dans un entretien donné à l'hebdomadaire Marianne, Nadine Morano déclaré à propos de Nicolas Sarkozy "quand je le vois aller chercher des gens qui lui crachent à la figure, je ne vois vraiment pas l'intérêt". Nadine Morano ferait, dans son interview à Marianne, en fait allusion aux contacts que l'ancien président de la République a eu avec Laurent Wauquiez. Nicolas Sarkozy a-t-il une tendance particulièrement prononcée à s'entourer de personnes lui tenant tête et à délaisser ses fidèles ?

Christelle Bertrand :Nicolas Sarkozy est en train de dessiner une nouvelle image. Ce que l'on m'a rapporté depuis la constitution de l'association des amis de Nicolas Sarkozy est que ce n'est pas tant lui qui a un problème avec cette association mais beaucoup lui disent que ce n'est pas la meilleure image que l'on peut avoir de son entourage. Et pour sa part Nicolas Sarkozy ne souhaitait pas ouvertement prendre ses distances avec ses soutiens.

Aujourd'hui depuis deux ans, il a vu énormément de jeunes élus de manière à reconstituer un nouveau vivier. Un vivier qui soit différent et qui ne le ramène pas, comme Nadine Morano et Rachida Dati, à son image "bling bling" du début du quinquennat. Image à laquelle il tente aujourd'hui d'échapper pour revenir en homme neuf. Nicolas Sarkozy aime beaucoup Nadine Morano mais elle commence à lui poser problème. Elle, qui est une fidèle et une émotive, et qui n'a pas démérité dans ses soutiens, le prend mal et c'est normal.

On voit résumer là, toutes les difficultés qui vont se poser à lui pour son retour. C'est assez bien résumé par Emmanuelle Mignon qui s'est occupée de ses précédents programmes et qui travaille au programme actuel : il faut qu'il revienne à un retour sur deux jambes. C'est-à-dire qu'il lui faut parler à l'électorat du centre et cela va être d'autant plus nécessaire si Alain Juppé confirme sa candidature à la primaire tout en conservant ses affinités avec l'électorat le plus à droite. Laurent Wauquiez incarne bien cet électorat le plus à droite. Et ce n'est pas pour rien qu'après l'avoir copieusement critiqué, Nicolas Sarkozy, s'en rapproche. Nadine Morano apporte quelque chose d'autre, un électorat de plus populaire. 

S'agit-il d'un travers qui lui est propre ou cette tendance se retrouve-t-elle chez d'autres hommes politiques ?

C'est un peu le travers de toute la vie politique. Lorsque l'on arrive à ce niveau on suit ses intérêts plutôt que ses amitiés. Et je dirais que Nicolas Sarkozy est parfois le plus fidèle à ses amitiés. Par exemple, il n'a jamais pris ses distances avec Brice Hortefeux qui est un ami. Brice Hortefeux est peut-être l'un des seuls personnages politiques à être invité aux anniversaires de Nicolas Sarkozy, à avoir intégré son cercle privé. C'est aujourd'hui aussi vrai pour Nathalie Kosciusko-Morizet. Malgré les ennuis judiciaires de Brice Hortefeux, Nicolas Sarkozy n'a jamais pris ses distances. Il l'a certes éloigné de la Place Beauvau mais tout cela s'est fait de concert. Il n'a jamais pris non plu ses distances avec les Balkany malgré leurs problèmes judiciaires. Peut-être plus que certains hommes politiques qui ont tendance à être plus utilitaristes pour atteindre leurs objectifs.

Dans le journal Le Monde du 7 août, elle avait également estimé que l'ancien président ne pouvait pas s'entourer uniquement "d'énarques ou d'héritiers". Elle a à nouveau fustigé la politique d'ouverture qu'avait menée Nicolas Sarkzoy dans Marianne puis de conclure : "qu'il recommence ces conneries-là et je ferai campagne contre lui !". Dans quelle mesure la critique de Nadine Morano est-elle pertinente ?

La politique d'ouverture a choqué la plupart de ses soutiens dès le début du quinquennat. Car ses soutiens se trouvent à la droite de la droite de l'échiquier politique. Et puis cela donne le sentiment que quand on est le meilleur soutien on est finalement moins bien récompensé que quand est le meilleur ennemi, le meilleur adversaire. Cette critique est donc pertinente dans la mesure où Nicolas Sarkozy ne doit pas refaire les mêmes erreurs. En même temps quand on arrive au gouvernement on est obligé de passer des alliances. Et la constitution d'un gouvernement, on le sait bien, c'est l'assemblage de différentes tendances au sein d'une famille politique et il faut respecter les poids politiques. C'est toute l'ambiguïté de la vie politique dans laquelle les meilleurs serviteurs ne sont pas forcément les mieux remerciés.

Cela a-t-il pu le jouer des tours par le passé ? Risque-t-il de voir ses fidèles le délaisser ?

C'est quelqu'un qui a besoin de soutien, qui a besoin de sentir aimer et il a tendance à s'appuyer sur des gens qui pourraient le conforter et le réconforter. Certains de ses conseillers estiment qu'il doit rompre avec cet entourage amical qui pourrait décrédibiliser son image. Mais ce n'est pas quelque chose de naturel pour lui.

Mais je ne crois pas que le danger puisse venir de ses fidèles, il viendrait plutôt du centre. S'il se présente à la présidence de l'UMP, l'adversaire c'est Bruno Le Maire, François Fillon ou encore Alain Juppé qui sont plus modérés que lui. Donc les soutiens de Nicolas Sarkozy comme Nadine Morano ou Rachida Dati, si elles restent fidèles à leurs convictions politiques, soutiendront Nicolas Sarkozy. 

Au contraire, la stratégie de Nicolas Sarkozy ne peut-elle pas lui être payante ?

Quoiqu'il arrive, ses fidèles voteront pour lui. Ils séduisent une partie de l'électorat qui est plutôt populaire. Brice Hortefeux pourrait lui poser quelques problèmes. Mais Brice Hortefeux relève d'une autre configuration. Il fait partie du cercle amical. Et comme Nicolas Sarkozy avait décidé de ne plus s'exprimer publiquement, il avait besoin de porte-parole et Brice Hortefeux a joué ce rôle-là. Il est donc difficile de prendre ses distances avec ce dernier et je crois qu'il n'en a pas envie non plus. C'est le même type de personnage, très populaire, plutôt à la droite de la droite et qui rappellent un peu le passé.

Son entourage a été son problème, à la fin de l'année 2012. Et c'est pour cela qu'il part en quête de nouveaux soutiens et qu'ils demandent à rencontrer des jeunes conseillers municipaux. Il en reçoit plusieurs par semaines. Il veut faire monter une jeune garde pour remplacer l'ancienne.

Propos recueillis par Carole Dieterich

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