Et si la droite s’inspirait non pas de Merkel mais des (jeunes) électeurs allemands ?<!-- --> | Atlantico.fr
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Un jeune homme vote dans un bureau de vote à Berlin le 26 septembre 2021, lors des élections fédérales allemandes et de l'État de Berlin.
Un jeune homme vote dans un bureau de vote à Berlin le 26 septembre 2021, lors des élections fédérales allemandes et de l'État de Berlin.
©JAN ZAPPNER / AFP

Enseignements du vote

Lors des élections législatives en Allemagne, les jeunes électeurs ont tourné le dos aux grands partis (moins d'un quart des électeurs de moins de 25 ans ont voté pour eux) et ont plébiscité les Verts et le Parti libéral-démocrate (FDP), qui ont remporté 44% des suffrages sur cette catégorie de la population selon le Wall Street Journal. Les Républicains devraient-ils s'inspirer du FDP afin d'attirer les électeurs les plus jeunes ? L'incapacité des grands partis en France, notamment Les Républicains, à attirer la jeunesse est-elle l'une des raisons pour lesquelles ils ont vu leur part du vote s'éroder ?

Alain  Policar

Alain Policar

Agrégé de sciences sociales, docteur en science politique (IEP de Paris), Alain Policar a accompli l'essentiel de sa carrière à la faculté de droit et des sciences économiques de Limoges. Il est actuellement chercheur associé au Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof).

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Atlantico : Les dernières élections législatives en Allemagne ont montré que les plus jeunes électeurs ont tourné le dos aux grands partis (moins d'un quart des électeurs de moins de 25 ans ont voté pour eux) et leur ont préféré les Verts et le Parti libéral-démocrate (FDP), qui ont remporté 44% des suffrages sur cette catégorie de la population. Ces deux partis semblent répondre plus à leurs aspirations, axées sur le climat et la justice sociale pour les Verts, et sur la libéralisation des marchés et les libertés individuelles pour l'autre. Le premier créneau étant pris en France par EELV, les Républicains devraient-ils s'inspirer du FDP afin d'attirer les électeurs les plus jeunes ?

Alain Policar : Je crains que le mal soit si profond que toute tentative dans le sens que vous évoquez ne soit condamnée à l’échec. Il existe un effet un doute substantiel quant à la sincérité de la parole politique. Elle touche tous les partis, mais particulièrement ceux qui, ayant gouverné, sont considérés comme les principaux responsables de cette situation. Au-delà, et la comparaison avec l’Allemagne est ici précieuse, c’est notre système politico-électoral qui est à bout de souffle. Et, avant que le populisme ne triomphe, il est urgent de comprendre que le régime présidentiel à la française favorise la démagogie, les compromissions et les mensonges. Nous sommes les seuls en Europe à croire en ses vertus. Partout ailleurs le parlementarisme permet un débat politique général de bien meilleure tenue. On considère à tort que le régime parlementaire est synonyme d’instabilité. Mais il suffit de regarder l’exemple allemand pour voir qu’il n’en est rien. C’est le scrutin proportionnel, comme en Italie ou en Israël, qui produit l’instabilité que le scrutin majoritaire sait éviter. Et si l’on souhaite une représentation relativement fidèle de l’état de l’opinion, il faut y adjoindre une dose de proportionnelle et, sans doute, conserver les deux tours de scrutin. C’st le premier moment de la lutte contre la démagogie et contre la perte de crédibilité de la parole politique.

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L'incapacité des grands partis – et notamment des Républicains - à attirer les jeunes électeurs est-elle l'une des raisons pour lesquelles ils ont vu leur part du vote s'éroder depuis des décennies ? Cette tendance est-elle viable à moyen terme ?

Comme je viens de le dire, on n’attirera les jeunes que s’ils ont le sentiment de pouvoir réellement peser sur les choix déterminants. Cela suppose certainement la mise en place d’éléments de démocratie délibérative, non en substitution à la démocratie représentative mais en sus. Les modalités sont diverses et, parmi elles, le référendum d’initiative citoyenne devrait être généralisé. Bien entendu, il faudrait également impitoyablement lutter contre le cumul des mandats. Et, plus fondamentalement encore, supprimer le métier d’homme politique.

Les jeunes ont tendance à être plus polarisés que leurs aînés, et l'une des raisons avancées en Allemagne pour expliquer leur désintérêt envers les deux grands partis est leur difficulté à distinguer leurs différences profondes. Observe-t-on la même chose en France entre Les Républicains et LREM, au détriment des Républicains ? Ces derniers auraient-ils intérêt à se différencier davantage du parti présidentiel ?

S’il y a difficulté à percevoir les différences, c’est précisément qu’elles ne sont pas profondes. D’un point de vue de stricte stratégie électorale, il est évidemment préférable d’accentuer les divergences. Mais ce n’est pas facile dans le cas que vous évoquez. En effet, sur le plan économique, le libéralisme, avec quelques variantes, est la commune boussole de LREM et de LR. En revanche, sur celui des libertés, notamment en matière de mœurs, le programme (et la pratique) macroniste paraît, à juste titre, plus proche des préoccupations des jeunes, en particulier ce ceux qui disposent d’un accès aisé aux biens culturels. Tout ceci m’incite à penser que les chances de LR de remporter les élections présidentielles sont rigoureusement nulles. D’autant que leur seul espoir aurait été, dans une tradition gaullienne, le ralliement à un homme providentiel : vous savez ce qu’il en est. S’il n’est pas totalement exclu qu’en raison des tensions à l’extrême droite, le candidat soutenu par LR parvienne au second tour, sa défaite est néanmoins inéluctable. Mais chacun sait que ce qui se jouera en avril prochain, aussi bien à droite qu’à gauche, c’est la conquête (éventuelle) du leadership pour 2027.

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