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Élections législatives : "La droite peut faire la différence
si elle parle de la France"
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Bourbon

Plus de 6 600 candidats vont briguer ce dimanche un siège à l'Assemblée nationale. Si Nicolas Sarkozy a échoué à la présidentielle, le pays semble structurellement à droite. Les anti-sarkozystes de mai permettront-ils à la droite de créer la surprise en juin ?

Roland Hureaux

Roland Hureaux

Roland Hureaux a été universitaire, diplomate, membre de plusieurs cabinets ministériels (dont celui de Philippe Séguin), élu local, et plus récemment à la Cour des comptes.

Il est l'auteur de La grande démolition : La France cassée par les réformes ainsi que de L'actualité du Gaullisme, Les hauteurs béantes de l'Europe, Les nouveaux féodaux, Gnose et gnostiques des origines à nos jours.

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C’est dans une ambiance irréelle, celle qui accompagne d’habitude le festival de Cannes, que se déroule la campagne pour les législatives. L’opinion est fatiguée et ne suit que de loin. Sans doute beaucoup de ceux qui étaient allés voter aux présidentielles s’abstiendront-ils.

L’UMP, devenue l’opposition, a poussé ses candidats à faire des campagnes localistes pour profiter de l’enracinement des députés sortants, en évitant les thèmes nationaux, comme si la droite avait été désavouée lors de l’élection présidentielle : or ce n’est pas la droite qui l’a été, c’est Nicolas Sarkozy.

Pas de souffle : l’UMP n’a présenté aucun programme nouveau pour nous dire ce qu'elle ferait en cas de cohabitation. Il a été encore moins question de changer le nom du parti, comme l’a fait le Modem.

On ne dira jamais assez combien de mal ont fait Jacques Chirac et Lionel Jospin en instaurant le quinquennat : l’élection des députés, moment emblématique de la république parlementaire, se trouve vidée de sa substance et de son intérêt par la coïncidence avec l’élection présidentielle.

La pente naturelle des électeurs est de ratifier, plus ou moins mollement, très mollement cette fois, le choix présidentiel, sans considération de la personnalité de candidats ou de leurs projets. C’est pourquoi, dans cette atmosphère alanguie, les sondages donnent la  gauche gagnante.

Et pourtant cette « drôle de guerre » se joue au bord du gouffre...

Nous ne parlons pas des affaires internationales où, sur des sujets essentiels comme le sauvetage de l’euro ou la Syrie, François Hollande et Nicolas Sarkozy ont, quoi qu’on dise, exactement les mêmes positions.

Nous parlons des affaires intérieures. Sur ce terrain, personne ne vient rappeler le paradoxe énorme de la présidentielle : un président de gauche élu à la suite d’un mouvement de l’opinion vers la droite ; à la fois par un certain progrès du vote de droite (UMP, FN et autres) au premier tour de la présidentielle (environ 2 %), sa radicalisation (montée du FN de 7,5 % ) et le fait que les 2,1 millions de votes blancs du second tour, venus pour la plupart de la droite, dépassent largement l’écart entre les deux candidats.

Un paradoxe aggravé du fait que cette droitisation ne s’est nullement faite  sur des thèmes économiques et sociaux (sottement brandis par l’UMP comme si nous étions encore au temps du programme commun de la gauche !) mais sur les questions  identitaires : principalement sur la place de l’immigration, et tout ce qui tourne autour (le drapeau, l’école, et aussi l’ordre public), accessoirement sur différents thèmes sociétaux, qui d’un côté comme de l’autre, motivent peu de gens mais les motivent très fort. 

Or, contrairement à ce qu’ont longtemps enseigné les marxistes - et aujourd’hui les libéraux clamant la péremption des frontières -, le sens de l’identité est le moteur principal de l’histoire et le principal aliment des guerres civiles. En mettant en avant le rôle des nations, le général de Gaulle ne pensait pas autre chose.

C’est dire combien serait périlleux qu’à rebours  de l'évolution de l’opinion, la France se trouve livrée pour cinq années à un parti allant on ne peut plus  à l’encontre de l’aspiration identitaire et contrôlant, outre 80 % des médias, le gouvernement, les deux chambres, presque toutes les régions, la majorité des départements et des grandes villes.

Tout aussi inquiétants la recrudescence des incendies de voitures dans des banlieues où désormais on se lâche, à moins que la police ne se relâche : il est vrai que la proposition irresponsable de Manuel Valls de délivrer des récépissés après les contrôles d’identité, est bien peu propre à la motiver. L’agression verbale de Jacques Myard par un quidam récusant le droit d’un élu de la République à faire campagne à Sartrouville, « terre d’islam », va dans le même sens.

C’est dire combien est peu propre à nous rassurer l’affirmation de François Hollande selon laquelle tout son programme serait réalisé, y compris sans doute l’accord du droit de vote aux étrangers et le mariage homosexuel ! Les vrais hommes d’État, qui savent s’abstraire des programmes pour considérer, une fois élus, le seul intérêt national, sont hélas devenus rares.

Que, sur la toile, circulent des  textes annonçant, à l’encontre de toutes les traditions républicaines, que certains ne considèrent pas François Hollande comme « leur président » et appellent déjà à la « résistance », n’est pas moins inquiétant.

Sans vouloir pousser la comparaison, le décalage entre des résultats électoraux paradoxaux et l’état réel de l’opinion, c’est ce qui s’était observé dans l’Espagne de 1936 et le Chili de 1970 !  

C’est pourquoi, dans un tel contexte, quelque répugnance qu’éprouvent à son égard les gaullistes de conviction, la cohabitation serait sans doute un moindre mal.

Si l’on considère que la grande majorité de ceux qui ont voté blanc au second tour des présidentielles, peut voter à droite au second tour des législatives, Nicolas Sarkozy étant éliminé, la victoire de la droite aux législatives est encore possible.

Encore faudrait-il que cette droite la veuille vraiment. Encore faudrait-il qu’elle parle aux électeurs du seul sujet où - comme le Nicolas Sarkozy des derniers jours l’avait si bien compris - elle peut faire la différence : la France.

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