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Pourquoi l'affaire DSK 
nous angoisse-t-elle ?
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Travail de deuil

A l'annonce de l'arrestation de Dominique Strauss-Kahn pour tentative de viol ce dimanche à New York, les Français sont restés stupéfaits. Une sidération qui dépasse la raison et sème le doute dans les esprits.

Bertrand Vergely

Bertrand Vergely

Bertrand Vergely est philosophe et théologien.

Il est l'auteur de plusieurs livres dont La Mort interdite (J.-C. Lattès, 2001) ou Une vie pour se mettre au monde (Carnet Nord, 2010), La tentation de l'Homme-Dieu (Le Passeur Editeur, 2015).

 

 

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Tandis que Dominique Strauss-Kahn attend dans sa résidence surveillée new yorkaise le sort qui va lui être réservé par la justice américaine, la France terrassée par la stupeur est en proie à un profond malaise. Témoin, les multiples façons que l’on voit se développer pour atténuer voire nier ce qui s’est passé. On aimerait croire que l’on a rêvé, qu’il s’agit d’une machination, d’un traquenard, d’un piège, d’une relation consentie au départ avant de mal tourner entre l'ancien Directeur général du FMI et la femme de chambre de l’hôtel. Force est de constater que la thèse du complot a du mal à passer. Ce qui invite à s’interroger. En admettant que Dominique Strauss-Kahn soit coupable de tentative de viol, pourquoi tant de malaise, pourquoi soudain cette étrange inversion faisant de DSK une victime et de la femme de ménage sinon une coupable du moins l’agent d’un stratagème diabolique ? Il y a, me semble-t-il, trois raisons à cela que l’on peut résumer par trois mots : la chute, la machine et le brouillard.

La chute

DSK tombe de haut. C’est le moins que l’on puisse dire. La chute est impressionnante, vertigineuse. Tellement vertigineuse, qu’elle fait peur. Tout perdre à ce point là ! Personne n’aimerait être à sa place. Tout le monde préférerait être mort, chacun se demandant comment survivre à un tel désastre, un tel gâchis, une telle punition suite à un coup de folie, une pulsion passagère. Le drame de DSK,  c’est qu’il n’y a pas de réponse rationnelle à ce qu’il vit. Et c’est cela qui angoisse tout le monde. Le vide abyssal de toute solution possible après une telle chute. Le fait de ne plus savoir quoi dire, quoi faire et quoi penser.

La machine

La deuxième chose qui angoisse est la machine judiciaire américaine. On la suppose dure. Elle l’est. À l’Ouest, on ne plaisante pas avec la loi, la morale sexuelle et le harcèlement des femmes. La France n’a pas le culte de la loi. Elle vit mal la culpabilisation. Elle n’aime pas que l’on mette en cause la vie sexuelle de quelqu’un, censée relever de la sphère privée. Enfin, elle est sensible à une proportionnalité entre le délit et la peine. Ce qui arrive à DSK est ressenti comme étant d’une dureté excessive.

Le brouillard

Tout le monde a besoin de repères. Même si ce n’est pas formulé consciemment, il existe un besoin de savoir qui est qui, qui fait quoi et quelles sont les limites à ne pas dépasser. Un ancien Directeur général du FMI en prison, un président de la République virtuel accusé par la justice américaine d'être un vulgaire délinquant qui s’attaque à une femme noire et modeste en pratiquant une sorte de "droit de cuissage", cela choque parce que cela brouille les repères. Comme on dit, cela fait désordre. À qui faire confiance, si les plus hautes instances nationales et internationales chargées de veiller sur la société et son avenir ne sont plus fiables parce qu’elles témoignent de failles inquiétantes ?

Autrement dit, l’affaire DSK angoisse parce qu’avec elle et à cause d’elle, on se sent dépassé par les événements, impuissant, pris dans une souricière, prisonnier de la fatalité et du sordide avec cette question pour l’instant sans réponse qui pèse d’un poids accablant : quelle vie, quelle politique, quel avenir après une telle affaire ?  

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