Délais de paiement, fiscalité, innovation, concurrence : ce moratoire dont les PME ont besoin d'urgence<!-- --> | Atlantico.fr
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les PME ont besoin d'un moratoire.
les PME ont besoin d'un moratoire.
©Reuters

Les entrepreneurs parlent aux Français

65 000 entreprises ont fermé cette année, détruisant 174 000 emplois. Une partie n’était pas au niveau, mais une majorité d'entre elles n’était juste pas payée.

Denis Jacquet

Denis Jacquet

Denis Jacquet est fondateur du Day One Movement. Il a publié Covid: le début de la peur, la fin d'une démocratie aux éditions Eyrolles.  

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Les USA viennent de publier leur meilleur chiffre de création d’emplois depuis 2008. 248 000 emplois créés le mois dernier. L’économie libérale, c’est pas si mal ! Les Français, au lieu de voter Le Pen, vont peut être voter Obama aux prochaines élections. Une douche de plus qui démontre notre incapacité à résister à la pluie de la fatalité. La pluie qui semble être l’image la plus marquante de ce quinquennat et de ce président. Mais cette averse, ce sont les Français qui la prennent de front. Sous prétexte, depuis 25 ans, de les surprotéger, nous les avons mis à nus, attachés, accrocs à la surprotection, dépourvus de défenses immunitaires, dans le noir et le froid. Ils meurent. Un peu plus surement chaque jour. Pourtant la solution existe.

Cette semaine, je vous propose de faire court et simple. Le temps manque.

A ma gauche (pour des raisons pratiques seulement), les grands groupes. A ma droite, les PME et les start-up. Les grands groupes sont magnifiques. Ils permettent à notre pays de briller à l’étranger mais se réduisent en France. Ils détruisent de l’emploi. C’est inéluctable. Non pas tant qu’ils délocalisent, comme le clament ces syndicats qui n’ont rien compris à l’international. Ils se rapprochent de leurs clients. Ce qui est d’une logique imparable. Voulez-vous m’expliquer, pour des produits de consommation courante, comment vendre à un Chinois un produit réalisé en France au prix de revient français ? Pour Vuitton et Gucci, oui. Pour un yaourt, surement pas.

En conséquence, baser le droit du travail, le CICE, le dialogue social, les contrats aidés, sur la masse qu’ils sont susceptibles de représenter est ridicule. Ils pourront prendre des apprentis et stagiaires, pour faire plaisir, à la marge au gouvernement. Mais la marge ne fait pas bouger les véritables lignes. Nous ne voulons pas vivre à la marge, mais pleinement. Il faut donc en urgence réformer le dialogue social en France, afin de donner la parole aux véritables créateurs d’emplois en France, j’ai nommé les petits, les besogneux, les ETI naissantes ou existantes, les gladiateurs de l’économie, classique ou numérique. A nous, les entrepreneurs, qui voulons parler sans intermédiaire au pays et dépasser les couches graisseuses d’un syndicalisme, qui même au musée ne trouverait pas sa place. Faire des Assises de l’entrepreneuriat, lancées par Fleur Pellerin, un outil de proposition, qui irait rogner les frontières et les prérogatives des institutions représentatives (de qui sont-elles représentatives, déjà ?).

Les grands groupes, malgré leur retrait de la France, sont les meilleurs ennemis de l’innovation, du changement, du développement des PME. Pourquoi tant de haine ? En laissant ses belles plantes se développer, elles pourraient se défaire de la pression que tout gouvernement qui se respecte leur impose, du fait que leur formation et leur arrogance leur impose de ne discuter qu’avec les gros. Grands groupes, réveillez-vous, laissez vous bercer et pénétrer de l’innovation des start-up, aidez-les à réussir et payez-les. La seconde mesure est un moratoire d’urgence.

Pour les 24 prochains mois, payez vos fournisseurs à 30 jours. Votre trésorerie vous le permet, vos bénéfices le prouvent. En injectant ainsi entre 5 et 8 milliards dans l’économie, vous perdrez un peu d’intérêts financiers mais cela ne modifiera que peu vos résultats de l’année prochaine.

Mais cela changera la vie de 3 types d’entreprises :

- Celles, sous-traitantes (ou cotraitantes, car on a inventé une hiérarchie dans le prolétariat de la sous-traitance), qui malgré des carnets de commande, pleins, de leurs donneurs d’ordre, sont sèches en trésorerie et au bord de l’implosion. Certains, comme Airbus, s’en soucient fortement et agissent, mais ce sont encore des exceptions. Ces sous-traitants, pourraient ainsi innover, investir et s’internationaliser, car leur extrême expertise pourrait leur valoir des marchés opulents sur cette planète bleue, qui pourrait leur sembler tout à coup très rose !

- Celles, les "Madames tout le monde" des PME, dont la seule perspective, faute de trésorerie, sera de déposer le bilan, malgré un produit ou un service qui aurait sa place sur le marché, et que les banques ne pourront plus aider, grâce à l’intelligence des accords de Bâle et Solvency qui ont fait de la PME la victime de la crise de 2008. Brillants technocrates ! Ces PME pourraient passer le cap si la seringue des commandes privées s’élargissait un peu et leur injectait, par une piqure régulière à 30 jours, le liquide vital qui dort chez les grands groupes, alors que son absence est létale pour ces entreprises. Nous avons vu cette année plus de 65 000 entreprises fermer et détruire 174 000 emplois. Une partie n’était pas au niveau. Une large partie n’était juste pas payée.

- Celles, enfin, qui innovent. Celles qui apportent des produits et services, qui pourraient être déployés par les grands groupes, utilisés par les grands groupes, disséminés dans le monde entier par les grands groupes. Mais ils n’y parviennent pas. D’un côté, tous les corporatismes de la terre France, qui s’acharnent à détruire ceux qui menacent leurs acquis et leur paresse. Taxis, liquidateurs, professions juridiques, auto-écoles. Même si chacun mérite qu’on lui laisse un temps d’adaptation ou de régler le coût qu’eux ont payé pour bénéficier de ces privilèges. De l’autre, des groupes, dont les couches "lasagniesques" et la peur du changement maintiennent aux portes de leurs entreprises des technologies et des produits, qui pourraient leur assurer des avantages et des gains de productivité essentiels à leur mutation.

Ces pages seraient trop courtes pour donner 1000 exemples, de ces DSI (Directeurs des Services de l’Information), qui à l’unanimité sont devenus, alors que leur formation devrait les pousser à embrasser les technologies modernes, les refouloirs du progrès, les fossoyeurs de l’innovation, à tel point que les divisions de leurs entreprises tentent en permanence de les contourner pour ne pas subir leur vindicte. Ces pages seraient trop courtes, pour citer ces innovations majeures qui se heurtent à la peur des hostilités sociales et syndicales que l’adoption de ces technologies provoqueraient et laissent ainsi leurs concurrents leur damer le pion.

Il faudrait donc d’urgence un moratoire permettant :

D’imposer aux services achats d’accepter de travailler avec des start-up et PME, quelque soit leur taille, leur antériorité, leur nombre de client.

Imposer un paiement à 30 jours pendant 24 mois. Y compris dans les services de l’état, qui aiment à payer, souvent, à 1 an !! Cela suppose un investissement dans une plateforme d’inscription des fournisseurs, unifiée, online, sur laquelle la SNCF tente d’être précurseur. Mais cela traîne.

Nous pourrions ainsi stopper l’hémorragie des dépôts de bilan des uns, permettre le développement des autres et donner vie à des start-up qui ne demandent qu’à devenir planétaires au lieu de rester régionales.

La France doit aller imposer une renégociation de Bâle et Solvency, qui permettra de réduire le taux de risque affecté, comme si la taille était une maladie honteuse.

La France doit laisser les "gêneurs", ces précurseurs, qui pourraient comme Uber devenir mondiaux, prospérer au lieu de les tuer dans l’œuf. Nous avons besoin de faire de la France un leader et en avons les moyens. Quel masochisme ! La préfecture de Paris, pour des raisons politiques, ne voulaient pas encore, la semaine passée, donner à Ornicar (auto école sur internet), leur autorisation, de peur de ne déclencher un tsunami politique. Ils attendent "lâchement" que la nouvelle règle, magnifique d’ailleurs et décidée par le gouvernement (en absence de réponse après un certain délai, le silence de l’administration vaut acceptation), permette de facto de leur donner l’autorisation sans l’avoir donné.

Troisième proposition, supprimer la lâcheté de l’administration !! Enfin. Interdisons au fisc de reprendre d’une main ce que le Crédit Impôt donne de l’autre. C’est un scandale et il faut y mettre fin. Des discussions claires et sans tabou, récentes, en "off", nous le confirme bien volontiers. Les directions du trésor ont pour volonté claire de récupérer ces sommes. Faute de budget. Il faut donc édicter une interdiction, pendant 24 mois, d’émettre le moindre contrôle fiscal à une entreprise innovante.

Ces simples mesures permettraient de se donner le temps de prendre les autres mesures plus structurelles, plus profondes, qu’un gouvernement dont les voiles sont apparemment gonflées par une brise libérale (ne rêvons pas d’un vent quand même), devra prendre en moins de 6 mois si nous voulons éviter que le FN prenne le pouvoir en 2017 et que la France reparte à la conquête du monde.

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