Covid : cette nouvelle vague bien partie pour percuter l’été 2022 de plein fouet<!-- --> | Atlantico.fr
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Le variant BA.5 pourrait entraîner une hausse des contaminations à la Covid-19 dans les semaines et les mois à venir.
Le variant BA.5 pourrait entraîner une hausse des contaminations à la Covid-19 dans les semaines et les mois à venir.
©PASCAL POCHARD-CASABIANCA / AFP

Tic tac tic tac

Le nouveau variant d’Omicron BA.5, très transmissible, fait planer une incertitude pour les mois à venir. Il pourrait devenir dominant dans l'ensemble de l'UE. Ce variant est notamment à l'origine d'une importante vague épidémique au Portugal.

Antoine Flahault

Antoine Flahault

 Antoine Flahault, est médecin, épidémiologiste, professeur de santé publique, directeur de l’Institut de Santé Globale, à la Faculté de Médecine de l’Université de Genève. Il a fondé et dirigé l’Ecole des Hautes Etudes en Santé Publique (Rennes, France), a été co-directeur du Centre Virchow-Villermé à la Faculté de Médecine de l’Université de Paris, à l’Hôtel-Dieu. Il est membre correspondant de l’Académie Nationale de Médecine. 

 

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Atlantico : Dimanche 12 juin au soir, les chiffres transmis par Santé Publique France indiquait presque 80 000 nouveaux cas de Covid en 24H, un chiffre en forte augmentation. Assistons-nous au début d’une reprise épidémique d’ampleur en France et plus largement en Europe ?

Antoine Flahault : Qu’il doit être difficile pour les autorités de piloter la réponse à cette pandémie avec une aussi piètre veille sanitaire ! À nos portes, les services publics du Royaume-Uni fournissent des indicateurs sanitaires du vingt-et-unième siècle. À partir d’échantillons aléatoires de leur population, ils estiment chaque semaine la situation épidémiologique, un peu comme les sondages politiques pour les élections. La France pratique vis-à-vis du dénombrement des cas positifs pour le Covid une forme d’élection nationale quotidienne avec un taux d’abstention considérable. En effet, on ne compte que les personnes qui vont se faire tester et qui sont positives, mais on ignore évidemment celles qui s’autotestent chez elles, ou celles qui ont peu de symptômes et ne se font pas tester. Cela étant dit, vous avez raison de souligner que les indicateurs sanitaires sont tous en train de virer au rouge désormais. Par ailleurs, cette évolution n’est pas propre à la France mais tous les pays limitrophes la connaissent aussi. En Suisse, nous n’avons certes pas la Rolls-Royce anglaise de la veille sanitaire, mais nous analysons les eaux usées de manière systématique à Genève et à Zürich. Eh bien là aussi, la circulation du sous-variant BA.5 remonte très rapidement. Il faut appeler un chat un chat, on assiste bien au démarrage d’une nouvelle vague pandémique, liée cette fois-ci principalement au sous-variant BA.5 d’Omicron.

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Quelles conséquences peut-on anticiper sur la situation hospitalière et sur la mortalité ? Sommes nous suffisamment protégés pour éviter que la situation soit hors de contrôle ?

Comme il est difficile de prédire cette pandémie, le mieux me semble-t-il, est de se tourner vers ceux qui ont récemment fait l’expérience d’une vague analogue et de tenter de transposer les chiffres à la situation française avec toutes les précautions d’usage. Trois régions du monde ont connu ou connaissent actuellement une résurgence pandémique. Je laisserai de côté la Chine et la Corée du Nord, tant leur situation ne me semble pas transposable à l’Europe. Écartons aussi, provisoirement peut-être, les USA. En effet, ils connaissent une vague qui est due à un sous-variant de BA.2 (il s’appelle BA.2.12.1), Ce sous-variant nord-américain peine à s’imposer en Europe continentale. En revanche, il sévit en Martinique, région qui a le taux d’incidence et aussi le taux de mortalité Covid les plus élevés de France, environ six fois supérieurs à ceux de l'Ile-de-France. L’Afrique du Sud a été le premier pays à connaître une vague due aux sous-variants BA.4 et BA.5. Ils s’en sortent aujourd’hui, après huit semaines d’épidémie, leur plus courte vague depuis le début de la pandémie. Ça n’a pas été la catastrophe non plus en termes d’hospitalisations et de décès, peut-être sous-estimés cependant, on le saura plus tard. Le Portugal nous intéresse davantage, parce que ce pays de 10 millions d’habitants est à nos portes, partage davantage de caractéristiques démographiques et économiques avec la France. Ce pays connaît une vague liée quasi exclusivement au sous-variant BA.5. Il est difficile de mesurer l’ampleur des contaminations pour les mêmes raisons de piètre veille sanitaire qu’en France. Les pays européens testent beaucoup moins qu’en janvier dernier. En revanche, la morbidité hospitalière et la mortalité rapportées ces dernières semaines ont été très élevées. Ces taux ont surpris les autorités et les experts car la couverture vaccinale est très élevée au Portugal, la plus haute d’Europe. Or la mortalité enregistrée actuellement y est la deuxième la plus forte au monde après Taïwan. C’est à cela que le reste de l’Europe ferait bien de se préparer. Il ne s’agit pas de craindre un phénomène hors de contrôle. En Afrique du Sud comme au Portugal, tout finit par revenir dans l’ordre sans déployer des mesures fortes mais au prix d’une mortalité élevée dont une partie semble évitable.

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Les sous variants BA.4 et BA.5 pourraient devenir majoritaires, que sait-on de ces variants et notamment de leur gravité?

L’Afrique du Sud nous avait plutôt rassurés, nous laissant penser que ces nouveaux sous-variants n’étaient pas plus virulents que BA.1 et BA.2. L’expérience portugaise tempère cet optimisme. La principale différence entre les deux pays, et l’on peut même dire les deux continents, c’est leur démographie. Les pyramides des âges y sont très différentes. Dans notre Europe vieillissante, ces sous-variants d’Omicron font des dégâts beaucoup plus considérables qu’en Afrique. Au Portugal durant cette dernière vague BA.5, 93% des personnes décédées avaient plus de 80 ans. C’est elles qu’il va falloir protéger cet été. Si l’on veut éviter une surmortalité semblable à celle de la canicule de 2003 en France, si le variant BA.5 se propage ces prochaines semaines comme il l’a fait au Portugal, il faudra se préoccuper grandement de protéger les personnes âgées contre les formes graves. La prévention tout d’abord: en proposant la 3ème dose à tous ceux qui ne l’ont pas encore reçue et la quatrième à tous les plus de 60 ans, en réinstaurant le port du masque dans les EPHAD, en aérant les locaux intérieurs, ce qui peut être compliqué voire contradictoire lors des épisodes de fortes chaleurs, et enfin en sensibilisant les familles pour qu’elles soient précautionneuses avec leurs anciens. Puis en mettant en place chez les plus de 80 ans une stratégie “tester et traiter”. Tester aux moindre symptômes afin d’instituer rapidement des traitements efficaces qui évitent les formes graves de Covid, celles qui peuvent avoir une évolution fatale.

A quoi va ressembler l’été pour les patients atteints de formes non-graves de Covid ?

La grande inconnue de cette pandémie, ce sont les Covid longs. A cause du Covid long, il ne faut souhaiter à personne de contracter ce virus. On peut recommander à chacun de chercher à réduire les risques d’infection par le port du masque en milieu intérieur bondé et mal ventilé et dans les transports publics et en recherchant les interactions sans masque plutôt en milieu extérieur. Moins souvent on contracte cette infection, moins chargée de virus est la dose infectante et mieux est-ce, tant en termes de gravité de l’infection que de formes post-infectieuses (Covid longs).

Quelles sont les priorités pour limiter au mieux cette hausse des cas et ses impacts ?

La priorité me semble de chercher à éviter toutes les formes graves et tous les décès évitables. On sait aujourd’hui qui est à risque de ces formes sévères et on doit mettre un dispositif d’urgence pour les protéger cet été et à l’automne prochain. Ensuite, on en a souvent parlé dans vos colonnes et même si nous n’avons pas encore su intéresser grand monde à ce sujet, répétons-le, il faut préparer l’automne et l’hiver en s’attaquant à la question de la qualité de l’air intérieur. Nous voudrions pouvoir entrer dans un bar ou un restaurant, nos enfants devraient pouvoir aller à l’école, nous devrions pouvoir nous déplacer dans les transports publics sans risquer de nous contaminer. Pour cela il faut rendre la qualité de l’air intérieur voisine de celle de l’air de la rue où surviennent moins de 5% des contaminations.

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