Confinement indifférencié : la double (et grave) erreur conceptuelle du gouvernement <!-- --> | Atlantico.fr
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Jean Castex Olivier Véran
Jean Castex Olivier Véran
©ludovic MARIN / POOL / AFP

Stratégie contre la Covid-19

Face à la hausse de cas de Covid-19, le gouvernement a décidé d'instaurer un nouveau confinement. De nombreuses interrogations demeurent sur la politique d'isolement des malades et sur les conséquences économiques pour les commerces de proximité notamment.

Guy-André Pelouze

Guy-André Pelouze

Guy-André Pelouze est chirurgien à Perpignan.

Passionné par les avancées extraordinaires de sa spécialité depuis un demi siècle, il est resté très attentif aux conditions d'exercice et à l'évolution du système qui conditionnent la qualité des soins.

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Peu à peu nous progressons dans le consensus sur la pandémie: la situation s’est très fortement dégradée cet été et comme prévu les nouveaux cas se transforment en partie en nouveaux malades, nouveaux consultants dans les cabinets de médecine générale et nouveaux hospitalisés. Ces hospitalisés nécessitent parfois des soins de réanimation et certains décèdent. En se basant sur des modèles à court terme, sur les observations de cohortes de patients de ces neuf derniers mois et sur nos connaissances des coronavirus pathogènes ce qui se passe est tout sauf une surprise.

Le deuxième élément de réflexion est l’indéniable difficulté de la situation. La concurrence des menaces est un phénomène aléatoire mais les déterminants opèrent depuis des décennies. L’islamisme tue en France depuis 1980 et l'attentat de la rue Copernic, l’organisation sanitaire à petit à petit été asphyxiée par des dépenses sociales extravagantes et une bureaucratisation sans précédent qui a culminé avec les ordonnances Juppé, la dette, à vaut l’eau, est un fardeau de dépenses de fonctionnement qui altère notre réponse à la Covid-19. Dans ce contexte chaque citoyen doit faire preuve de responsabilité avec de demander plus de liberté. De son côté l’Etat doit s’adapter à la situation au lieu de maximaliser les contraintes sur la société alors qu’il est toujours incapable d’assumer son role régalien.

Le premier pilier de la réponse à la pandémie n’a pas changé: interrompre la transmission

Cette virose respiratoire, très contagieuse et beaucoup plus mortelle que la grippe saisonnière, est entravée par toutes les mesures de protection personnelle et par l’isolement des cas contacts et des nouveaux cas positifs. Interrompre la transmission n’est pas arrêter la vie économique et sociale. C’est la rendre résiliente à la pandémie. C’est pourquoi il est erroné de vouloir diminuer les interactions sociales en général. Vu la situation de gravité indéniable la vie normale est impossible. Il faut interdire les activités où la protection personnelle n’est pas possible et laisser les autres activités fonctionner sous un régime de stricte observance. Le confinement indifférencié était inefficace en Mars-Avril il le reste aujourd’hui. Il ne faut pas faire de toute activité humaine une source de transmission. C’est pourquoi le gouvernement doit rapidement reconsidérer ce qu’il appelle à tort sa doctrine et se focaliser sur la transmission en agissant avec rationalité. Avoir pour objectif de diminuer les interactions sociales est efficace mais très coûteux. Agir sélectivement sur la transmission est efficient et moins coûteux. Les exemples sont légions et concernent l’activité économique comme la liberté d’aller et venir.

L’activité économique doit reprendre partout où elle ne favorise pas la transmission

Pour l’activité économique comment ne pas constater le paradoxe entre une grande surface ouverte et sa galerie commerciale fermée! Pourquoi se balader dans les rayons de la grande surface est « autorisé » alors que se rendre en face de la sortie au pressing est « interdit »? Il n’y a aucune justification en terme de réduction de la transmission car le responsable du pressing peut faire respecter les masques l’éloignement et la jauge. Au contraire les grandes surfaces sont encore laxes sur l’hygiène, la protection, l’éloignement et la jauge. Nous sommes neuf mois après le début de la pandémie et le système de vidéosurveillance des magasins de grande surface n’est pas utilisé pour rappeler à l’ordre et évacuer les stupides qui, masque sous le menton, déposent leurs gouttelettes sur les produits… La stratégie doit être modifiée, ce n’est pas le caractère essentiel d’une activité qui est déterminant car c’est un critère totalement discrétionnaire qui plaît à l’administration mais qui est inefficace, mais plutôt la poursuite des activités économiques dans l’observance de réduire la transmission au minimum. Les commerçants doivent y contribuer même si certains ont pris cela à la légère au début. Les engagements doivent être stricts et les pénalités élevées. Et comment arrive-t-on à ce type d’aménagement? Par le compromis et non par l’invective ou les oukases, l’état restant garant de l’observance de la loi.

La liberté d’aller et venir n’est pas un accélérateur de transmission

Pour la liberté d’aller et venir c’est similaire. L’état et son administration ont ressorti les « attestations de déplacement dérogatoire ». C’est un curieux paradoxe que les Allemands soient beaucoup plus hostiles à la main mise de l’état fédéral que les Français qui acceptent ce régime d’Ausweis de l’état jacobin.  C’est le vieux système où, le pas de la porte à peine franchi, l’état est en droit de demander des papiers multiples et variés au citoyen lambda mais laisse des étrangers se balader et agir criminellement sur notre territoire. Les modalités des déplacements sont totalement arbitraires car basées sur des inventions administratives. Rayon d’un kilomètre, durée d’une heure, limite de la région… Aucune leçon du premier confinement n’a été apprise. Il n’y a aucune preuve que la libre circulation de personnes qui respectent la protection contre la Covid-19 augmente la transmission. En revanche les rassemblements illicites sont de puissants accélérateurs et il est préférable de les empêcher avant qu’ils ne se produisent grâce au renseignement plutôt que de mobiliser les forces de l'ordre pour contrôler les cyclotouristes quant à la distance de leur domicile ou à la durée de leur pratique.

Le deuxième pilier est de remplacer la doctrine de la dérogation par une pénalité dissuasive ex post

Pour tous les acteurs de la vie sociale la dissuasion est nécessaire car l’inobservance même minoritaire accélère la transmission dans un contexte de résurgence grave. Il est donc impératif de mettre en place une dissuasion réelle plutôt qu’une interdiction à priori accompagnée d’un régime de dérogations. La constatation du non respect des règles est aujourd’hui très faiblement sanctionnée voire pas du tout. L’Etat communique peu sur ce sujet. Il est important de souligner que ce contrôle ex post s’ applique aux cas contacts et aux nouveaux cas positifs dans le cadre de l’isolement. Un nouveau cas positif qui va faire ses courses avec l’attestation dérogatoire dans la poche et le test positif dans l’autre n’est ni traçable ni sanctionnable. C’est beaucoup plus dangereux que de se déplacer à 21h35!

Ces modifications doivent faire l’objet de discussions avec les représentants de la société civile et ce immédiatement. Elles augmenteront l’efficience du confinement que la situation impose et diminueront l’impact économique qui d’ores et déjà est considérable. C’est sûr ce chemin étroit que l’exécutif doit s’engager. Mais il y a un autre avantage, celui de préparer les mois à venir car le but est d’éviter le yoyo. Il faut devenir compatible avec la pandémie et ses résurgences sur le moyen terme. C’est à dire se préparer à isoler les contacts et les cas positifs.

Le confinement (qui au stade où nous sommes est nécessaire) ne nécessite pas d’être aussi indifférencié et généralisé. Bis repetita.

Esquisse d’un confinement visant à éviter les activités de transmission

1/ Tous les commerces qui respectent le port du masque et l’éloignement interpersonnel c’est-à-dire une jauge d’occupation en fonction de la surface et un respect de la signalétique doivent être laissés ouverts.

2/ Les Français sont libres d’aller et venir mais pas de se rassembler à plus de trois personnes hors de leur domicile et le port du masque est obligatoire dans tous les espaces clos, semi-clos, ou bien à l’extérieur si il y a un rassemblement autorisé par exemple un marché. le post du masque sans couvrir le nez et la bouche fait l’objet d’une contravention

3/ Tous les commerces où le port du masque n’est pas possible pendant toute l’activité sont fermés jusqu’à nouvel ordre

4/ Tous les résultats de tests sont transmis aux ARS pour que soit organisé l’isolement qui est obligatoire pendant 14 jours

5/ Aucune dérogation n’est nécessaire pour aller et venir en revanche le contrevenant à ces règles s’expose à une contravention de 1500 € pour le commerçant et 500 € pour le client.

6/ Le non port du masque ou le port du masque sans couvrir le nez et la bouche fait l’objet d’une contravention sauf à l’extérieur à condition que l’éloignement interpersonnel soit respecté.

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