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Murdoch va-t-il faire exploser Cameron en vol ?
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Rupert Murdoch, magnat de la presse australienne et anglo-saxonne, a comparu pour la première fois mercredi, soit 9 mois après l'éclatement du scandale des écoutes téléphoniques. Mais l'affaire embrase le Parlement britannique... Au point de porter préjudice au gouvernement de David Cameron ?

Sophie Loussouarn

Sophie Loussouarn

Sophie Loussouarn est spécialiste de l’histoire politique et économique du Royaume-Uni et proche du monde politique anglo-saxon.

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Tous les Premiers Ministres depuis Margaret Thatcher jusqu’à David Cameron, en passant par Tony Blair et Gordon Brown, ont courtisé le très influent Rupert Murdoch. Les liens entre le monde politique et la presse sont étroits au Royaume-Uni comme en France et l’actuel Premier Ministre David Cameron a eu le courage de nommer le juge Lord Leveson Président d’une Commission d’enquête sur l’éthique de la presse en juillet 2011, afin de protéger la vie privée des personnes publiques. Le Royaume-Uni dispose d’un système très complexe de réglementation de la presse, mais ce pouvoir de régulation est entre les mains d’Ofcom ou de la Commission de la Concurrence ou de la Commission de Plainte contre la presse.

Pendant deux jours, Rupert Murdoch a parlé de ses quarante années en tant que patron de News Corporation et de ses liens avec le monde politique britannique. Au cours de la séance du 25 avril, il est apparu comme un patron expérimenté, conscient de sa responsabilité en tant que baron de la presse. Le propriétaire du Times, du Sun et de News of the World jusqu’à sa fermeture en juillet 2011, a utilisé son discours devant la commission d’enquête présidée par le juge Leveson  pour mettre fin à certains mythes sur les pratiques de sa société et il a fait preuve d’une grande humilité. Rupert Murdoch a successivement soutenu Margaret Thatcher, puis Tony Blair en 1997, Gordon Brown jusqu’en 2009 et David Cameron qu’il a rencontré pour la première fois lors d’un pique-nique organisé par sa fille Elizabeth dans le parc de Blenheim Palace.

Rupert Murdoch a un profond respect pour Margaret Thatcher. Il a été enthousiasmé par Tony Blair, qui est le parrain d’une de ses filles et qu’il considère comme un ami personnel. D’origine écossais par son grand père, le patron de News Corporation, a beaucoup d’amitié pour Gordon Brown, mais il a accusé l’ex Premier Ministre Gordon Brown de mensonges à propos des écoutes téléphoniques de son fils et les révélations sur son état de santé. En fait, Gordon Brown n’a jamais pardonné au Sun d’avoir apporté son soutien aux conservateurs à partir de septembre 2009 et d’avoir critiqué le manque de matériel envoyé aux soldats britanniques en Afghanistan. Enfin, Rupert Murdoch est plein d’admiration pour David Cameron, qu’il a rencontré à plusieurs reprises avant 2010 et depuis qu’il est de venu Premier Ministre.

La séance du 26 avril a examiné son rôle dans les écoutes téléphoniques et le scandale qui a porté atteinte à la réputation de News International. Rupert Murdoch a reconnu qu’il n’avait pas suffisamment contrôlé ce qui se passait à News of the World. Il a néanmoins été profondément choqué de l’arrestation d’une dizaine de journalistes du Sun.

Si le Ministre de la Culture, de la Presse et des Sports Jeremy Hunt a été impliqué dans le scandale de la fusion de BSkyB, c’est parce qu’il a donné son numéro de mobile à James Murdoch qu’il tenait informé de l’état d’avancement des négociations. Il a été malmené par l’opposition travailliste mercredi 25 avril à l’issue des questions au gouvernement, mais il a le soutien de son Premier Ministre qui souhaite le garder à la veille des Jeux Olympiques. La commission d’enquête du juge Leveson ne se prononcera pas sur les liens entre Jeremy Hunt et le clan Murdoch et aucune sanction ne devrait être prononcée contre le Ministre de la Culture de David Cameron. Le secrétaire permanent du Ministère de la Culture interrogé hier par les députés britannique a refusé de répondre

En aucun cas cette enquête ne risque de faire éclater le gouvernement. Ed Miliband a certes accusé le gouvernement de David Cameron de corruption, mais Tony Blair n’avait-il pas coutume d’inviter Rupert Murdoch à Downing Street ? Les deux hommes ne se rencontraient-ils pas quatre fois par an pour parler de sujets aussi variés que la criminalité, la politique de santé, l’Europe, le terrorisme, l’Irak et l’Afghanistan ? Gordon Brown n’avait-il pas organisé un anniversaire à Chequers, la résidence d’été du Premier Ministre, pour les quarante de Rebekah Brooks, la rédactrice en chef de News of the World ? Ed Miliband ne peut être le donneur de leçon alors que le parti travailliste a été si proche de Rupert Murdoch jusqu’en 2009 et que Tony Blair n’aurait jamais gagné les élections de 1997 avec un tel raz-de-marée sans le soutien inconditionnel de toute la presse de Murdoch.

Le témoignage de Rupert Murdoch devant la commission d’enquête du juge Leveson laisse en suspens de nombreuses questions sur la conduite des journalistes qui pratiquent le harcèlement et l’intimidation, sur l’équilibre à trouver entre le respect de la vie privée et la liberté d’expression et sur la réglementation de la presse dans les années à venir. Cependant, ce passionné des médias a annoncé hier que les journaux n’existeraient plus dans vingt ans et même peut-être en 2017. Confronté à la montée d’Internet, les journaux traversent aujourd’hui une crise d’identité. La diffusion des journaux a diminué de 25% au cours de la dernière décennie et la nouvelle génération tire ses informations de la télévision et d’internet. La commission d’enquête du juge Leveson souligne le manque de transparence de Rupert Murdoch dans la gestion de sa société et révèle également combien le pouvoir s’est maintenant déplacé vers le numérique, qui révolutionne le monde de l’information.

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