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Cette disposition de la Loi Santé qui pénalisera désormais les veillées funéraires à domicile
©wikipédia

La loi s'applique aussi aux morts

500 000 familles par an sont touchées par le décès d'un de leur proche. Cet inéluctable événement par lequel nous achèverons tous notre vie terrestre est toujours vécu par la famille du défunt comme un moment douloureux et très intime. Et pourtant la loi s'apprête à s'immiscer dans cette intimité par le biais du projet de loi "Santé".

Christian de Cacqueray

Christian de Cacqueray

Christian de Cacqueray est le directeur du Service Catholique des funérailles qu’il a créé en 2000 à la demande du Cardinal Jean-Marie Lustiger.

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Atlantico : Plus connu pour ses dispositions sur les paquets de tabac neutres ou l'extension du tiers payant à tous les assurés, le projet de loi "Santé" comprend pourtant un article qui risque fort d'être adopté sans que personne ne s'en rende compte. Vous êtes l'une des rares personnes à s'être dressée contre cet article : de quoi s'agit-il ?

Christian de Cacqueray : Il s’agit d’une mesure visant à interdire la pratique des soins de conservation sur le corps des défunts morts à leur domicile. Cette réforme aura pour conséquence de pénaliser la pratique de la veille du défunt à domicile, qui concerne environ 50 000 personnes par an. En effet, sous couvert d’encadrer cette activité, le gouvernement s’apprête à entraver une liberté essentielle, celle du choix des rites funéraires.

Depuis la fin de la seconde guerre mondiale, nous assistons en France à un nivellement généralisé des pratiques funéraires au profit des lieux techniques d’hyperconcentration de la mort que son les funérariums et les crématoriums. Dans ce contexte, la veillée autour du défunt dans le cadre domestique constitue une richesse rituelle à préserver et non pas à entraver.

Pour quelles raisons le gouvernement a-t-il introduit une telle disposition dans ce projet de loi "Santé" et pour quelle raison n'en a-t-on pour l'instant pas entendu parler ?

À l'origine du projet  il y a le fait que certaines maladies virales entraînent, lorsque le défunt en a été atteint, l'interdiction de la pratique des soins en question. Cet interdit n'est pas justifié dans le cas du VIH et la revendication de le faire supprimer est justifié. Ce qui l'est moins c'est d'appliquer une mesure fortement contraignante à tous. Le gouvernement a imaginé un scénario qui ne résiste pas aux faits. Il dit que les corps devront être emmenés hors des domiciles pour être traités dans des lieux dédiés puis éventuellement ramenés dans les domiciles. Cette procédure est irréaliste. Outre qu'elle ferait au moins tripler les coûts pour les familles, elle entraînerait de forts traumatismes pour les proches.

Le peu de réactions à ce projet tient à l'indifférence qui entoure ces questions, jusqu'au jour où l'on est personnellement concerné. Étant présent sur le terrain auprès des familles, je devrais, si cette réforme était adoptée, en gérer les conséquences pour les personnes en deuil. C'est pourquoi je la combats aujourd'hui tant qu'il en est encore temps.

En quoi l'adoption de cet article s'inscrit-il dans une évolution – qu'on peut juger regrettable – du rapport de l'homme à la mort ?

Nous sommes tous conditionnés par un contexte social qui place la mort hors du champ social. Cette réalité anthropologique a des conséquences importantes sur les comportements : deuils difficiles, morbidité, conduite à risques chez certains jeunes pour qui la mort est plus une réalité virtuelle que réelle. Plus nous rejetons la mort, plus elle règne masquée comme une réalité obscène quant elle est en réalité intrinsèque à la vie.

Comment comptez-vous faire pour attirer l'attention autour de cette interdiction des soins de conservation funéraire au domicile des familles ?

En plaçant résolument ce qui pourrait passer pour une mesure sans importante, à sa vraie place, à savoir parmi les mesures qui, en s'additionnant dénaturent notre civilisation. Il ne s'agit pas pour moi de faire la promotion d'une technique de conservation des corps post mortem plutôt qu'une autre, mais de dire, en tant qu'accompagnant des obsèques, que le devoir des pouvoirs publics est de faciliter la pratique des rites funéraires et non de l'entraver.

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