Bruce Springsteen vend les droits de ses chansons pour 500 millions de dollars et voilà pourquoi il s’agit d’une très mauvaise nouvelle pour l’industrie musicale<!-- --> | Atlantico.fr
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Bruce Springsteen a cédé les droits de ses chansons et de son catalogue à Sony pour près de 500 millions de dollars.
Bruce Springsteen a cédé les droits de ses chansons et de son catalogue à Sony pour près de 500 millions de dollars.
©JAMIE MCCARTHY / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / GETTY IMAGES VIA AFP

Droits et travers musicaux 

Bruce Springsteen a cédé sa musique à Sony pour près de 500 millions de dollars. Selon la revue "Billboard", le studio Sony vient de signer le plus important rachat d'une œuvre musicale jamais conclu avec un seul artiste.

Pascal Comas

Pascal Comas

Pascal Comas est trader pour son propre compte. Passionné de musique, il collabora avec de grandes maisons de disques à la sortie des albums d'IAM, Massive Attack... Auteur d'un pamphlet intitulé Pensées à Rebrousse-Poil, il fut également co-directeur d'une grosse start-up suédoise.

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Atlantico : Bruce Springsteen serait sur le point de vendre les droits de ses chansons au groupe Sony Music Entertainment pour la somme de 500 millions de dollars. Pour l’heure, ni le chanteur ni Sony n’ont voulu confirmer la transaction. Ces dernières années, plusieurs artistes (Bob Dylan, Dire Straits, Neil Young …) affichant une longue carrière se sont résignés à céder le contrôle de leurs catalogues contre de très généreux contrats proposés par des éditeurs ou des maisons de disques. Comment expliquer un tel engouement ?

Pascal Comas : Plusieurs raisons expliquent cet engouement. Premièrement, je pense que l’arrivée des catalogues de streaming comme Spotify et l’évolution du business de la musique a considérablement changé les niveaux de revenus que les artistes connaissaient auparavant. C’est aujourd’hui une réalité, même pour les artistes mondialement connus. Ils sont donc tentés de trouver de nouvelles sources de revenus et vendre les droits de leurs chansons est une bonne opportunité économique. 

Concernant Bruce Springsteen et d’autres artistes américains, il faut savoir que le timing de cette vente n’est pas le fruit du hasard. L’administration Biden a décidé de voter des taxes importantes sur les plus-values. Ils se dépêchent donc de vendre avant la fin de l’année pour ne pas être surtaxés dans un futur proche. Au passage, c’est assez étonnant pour cet artiste qui a toujours revendiqué des idées très à gauche, ce qui montre qu’il y a souvent un fossé entre les bonnes intentions et la réalité. 

Il y a également une dernière approche liée aux contraintes des droits d’auteur. Certains artistes approchent de leurs vieux jours et veulent encaisser une grosse somme d’argent pour réaliser des investissements ou transmettre un héritage à leurs enfants. Il y a donc la volonté de profiter une dernière fois des fruits de son travail. 

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En quoi le fait que des grands artistes prennent cette décision risque de poser un problème à l'industrie musicale ? 

Les maisons de disque sont intéressées par la finance à court terme. Elles veulent un catalogue bien rempli, avec des noms d’artistes mondialement connus. En termes de private equity et de valorisation, elles peuvent utiliser cette renommée pour effectuer davantage d’acquisitions et de fusions dans le futur. Les maisons de disque sont donc dans une logique financière très forte et finalement assez éloignées d’une quelconque vision artistique. 

L’incitation pour les artistes à produire et être créatifs est de plus en plus réduite. Il faut savoir que bien souvent, la créativité musicale vient des artistes underground. Les plus créatifs ont énormément de mal à vivre et à joindre les deux bouts, surtout en période de Covid avec la réduction du nombre de concerts et d’événements musicaux. Les maisons de disque risquent donc de détruire tout un écosystème.

Que traduisent ces récentes ventes de la santé de l’industrie musicale ? Est-ce les conséquences des nouveaux modes de consommation ?

On peut remarquer qu’il y a de plus en plus de concentrations d’artistes sous une même maison de disques. Il y a également des valorisations fortes des gros groupes comme Universal puisqu'ils accumulent des catalogues qui seront très rentables à l’avenir. A titre d’exemple, c’est ce qu’à fait Disney en rachetant la franchise Star Wars. Les maisons de disque sont dans la même logique. Leur calcul est d’avoir de la matière avec des artistes majeurs pour décliner et avoir des revenus pendant des décennies. 

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Pour l’instant, ces valorisations donnent une impression de bonne santé mais c’est sur un nombre extrêmement réduit et concentré de sociétés. Or, si on veut parler de santé de l’industrie musicale, il faut également aborder la question de la santé des labels beaucoup plus petits. De ce côté là, le paysage est beaucoup plus négatif. Il y a ce dont on parle dans la presse, avec les gros groupes et les grosses fusions, mais également tous les petits artistes qui luttent pour vivre de leurs productions et pour qui il est très dur d’avancer. 

Les nouveaux modes de consommation et les grands groupes comme Spotify ont profondément modifié l’industrie musicale. À mon sens, tous ces changements sont extrêmement négatifs. Les rémunérations des artistes ou des petits labels sont insuffisantes. Pour qu’on ait une industrie musicale florissante d’un point de vue artistique et économique, tous les acteurs, y compris les plus petits, doivent pouvoir vivre. 

Pour retrouver un Thread sur la soudaine vague de ventes de droits d'édition de chansons, cliquez ICI

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