Trois jeunes armés ont fait irruption dans un pavillon de Créteil dans le but de cambrioler la famille.
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La France a peur
Braquage et viol à domicile à Créteil : drame isolé ou symptôme d’une violence grandissante ?
Trois jeunes armés ont fait irruption dans un pavillon de Créteil dans le but de cambrioler la famille. Ils ont proféré des insultes antisémites et ont violé la petite amie du fils aîné.
Xavier Raufer
Xavier Raufer est un criminologue français, directeur des études au Département de recherches sur les menaces criminelles contemporaines à l'Université Paris II, et auteur de nombreux ouvrages sur le sujet. Dernier en date: La criminalité organisée dans le chaos mondial : mafias, triades, cartels, clans. Il est directeur d'études, pôle sécurité-défense-criminologie du Conservatoire National des Arts et Métiers.
Atlantico : Lundi 1er décembre, trois jeunes armés ont fait irruption au domicile d'une famille de confession juive de Créteil en réclamant des sommes d'argent importantes. Ces derniers pensaient en effet que le benjamin de la famille était responsable d'un magasin Redskin à paris alors que ce dernier n'est que vendeur. Peut-on considérer qu'il s'agit d'un acte isolé, ou ce type de cambriolage violent est-il en augmentation ?
Xavier Raufer : La vie des criminels du genre prédateur, et ceux-ci semblent bien entrer dans cette catégorie, est gouvernée par une loi simplette : l'effet de déplacement. C'est une loi criminologique à peu près sans exception connue : quand le pillage, le braquage, etc. devient trop difficile, s'agissant d'une cible A, le prédateur se déplace vers une cible B.
Si les banques sont trop efficacement blindées, le bandit va braquer les commerces de proximité, car c'est plus facile. Si la police ou la gendarmerie arrivent désormais mieux à interdire les braquages de commerces, il est aisé de comprendre que le braqueur va suivre les commerçants jusqu'à leur domicile, là où ils sont sans défense. De même pour les voitures : si l'électronique les protège mieux, le "maillon faible" devient le conducteur, qu'il suffit d'assaillir pour lui voler ses clés. Ainsi un meilleur contrôle des atteintes aux biens conduit-il souvent à des atteintes aux personnes.
Le crime auquel vous faites allusion (vol a main armée... viol... etc.) entre clairement dans cette catégorie. Pour le reste, soyons prudents : ce qu'on sait à présent du crime relève-t-il de la supposition ? Ou s'agit-il d'aveux suite à une interpellation ? Impossible de trancher pour l'instant.
Idem pour l'aspect communautaire de l'agression. Les assaillants avaient-ils un motif particulier d'antisémitisme ? Dans le genre, "je suis musulman, les Israéliens tuent nos frères en Palestine, donc je les 'venge' en m'en prenant à des Juifs, forcément sionistes" ? Tout cela demande à être vérifié.
Bien sûr, de tels 'effets d'aubaine' (pardon pour cette formule brutale) peuvent exister, on l'a vu avec le calvaire d'Ilan Halimi. Mais une préméditation, des préparatifs en vue de... Tout cela exige enquête. De tels jeunes prédateurs sont certes brutaux, et parfois terriblement - mais souvent pas très malins, plutôt impulsifs.
Les agresseurs ont, après avoir dérobé des objets de valeurs et de l'argent liquide, violé la petite amie du fils aîné qui était présente. Faut-il y voir une nouvelle forme de violence empreinte d'antisémitisme ?
Si la dimension communautaire se confirme, oui, il faudra voir dans le viol l'expression d'une volonté de souiller, d'humilier, de remporter une 'victoire' symbolique sur le corps d'une 'ennemie'. Si cela est prouvé, la dimension antisémite sera alors claire - et devra être considérée comme circonstance aggravante d'un cas déjà grave, car criminel.
Le niveau de violence lors des cambriolage a-t-il toujours été aussi élevé ?
Ce qui augmente, ce sont les violences aux personnes, que ce soit dans le cas d'un cambriolage, d'un vol avec violence, etc. Voici un rappel de ce que j'ai écrit le mois dernier dans "Atlantico" à ce propos :
Violences contre les personnes : (vols avec violence ou à main armée, viols, coups et blessures, règlements de comptes entre malfaiteurs, etc.). Ces chiffres reflètent les seules affaires connues des services officiels, ce que vit la population étant bien pire encore.
De juin 2013 à mai 2014, ces violences augmentent dans 87 des 96 départements métropolitains : + 3,8 à l'échelle nationale. A la fin du 1er semestre 2014, la barre des 500 000 cas connus de violences aux personnes est franchie.
Départements vivant une croissance à deux chiffres de ces violences (1e trimestre 2014 sur les mêmes mois en 2013) : Côte-d'Or, + 34% ; Ille-et-Vilaine, + 28% ; Gironde, Sarthe, +22% ; Eure-et-Loir, + 20% ; Haut-Rhin, + 18% ; Pyrénées orien orientales, Marne, + 17% ; Charente maritime, Oise, + 16% ; Indre-et-Loire, + 15% ; Yvelines, Isère, + 14% ; Var, + 13% ; Rhône, Bas-Rhin, Haute-Garonne, + 12%.
Comment expliquer que certains territoires soient plus en proie à ce genre de comportements ? Comment faire en sorte de les endiguer ?
La justice sous Madame Taubira est si laxiste que les bandits juvéniles, pas toujours très malins, on l'a vu, pensent avoir une copine à la Chancellerie et sont, pour nombre d'entre eux, en proie à un vrai délire d'impunité. La police et la gendarmerie font bien leur boulot, mais la justice incarcère de moins en moins des jeunes violents, sous prétexte que ce sont des "victimes de la société" et autres sornettes. Et bien sûr, cet effet d'impunité est d'autant plus fort que ces jeunes sont entre eux, dans les cités-Ghettos de la périphérie des villes, grandes ou moyennes. Endiguer ces phénomènes ? Enfantin : il suffit d'appliquer le Code pénal - ce que la Chancellerie fait toujours moins, au nom de sa doctrine, la "culture de l'excuse".
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