Polémique : l'Allemagne en plein débat sur la réimpression du "Mein Kampf" d'Hitler<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Europe
Aujourd’hui, seuls les éditeurs étrangers, propriétaires des droits avant 1945, ont l’autorisation de publier le manifeste.
Aujourd’hui, seuls les éditeurs étrangers, propriétaires des droits avant 1945, ont l’autorisation de publier le manifeste.
©Reuters

Petit livre brun

Polémique outre-Rhin : sous la pression publique et judiciaire, l’éditeur anglais Peter Mc Gee a finalement décidé de ne pas publier des extraits de l'ouvrage en Allemagne.

Son annonce a provoqué une vive polémique. L’éditeur britannique Peter McGee a déclaré un peu plus tôt ce mois-ci qu’il comptait publier des extraits de Mein Kampf  (le livre-programme d'Hitler publié en 1925) sous forme d’extraits annotés dans une brochure d’une dizaine de pages en supplément de son magazine historique Zeitungszeugen (lien en allemand). Cette annonce avait suscité l’ire de l’Etat de Bavière qui possède les droits du livre. Depuis 1945, le land refuse toute réimpression en Allemagne, sauf dans le cadre de travaux universitaires.

Aujourd’hui, seuls les éditeurs étrangers, propriétaires des droits avant 1945, ont l’autorisation de publier le manifeste. En France, les Nouvelles éditions latines possèdent les droits depuis 1934. Le livre peut être vendu, mais ne peut figurer en libre-accès dans les librairies.

Pourtant, le texte est disponible sur de nombreux sites web et des exemplaires de l'ouvrage circulent dans les librairies d'occasion allemandes. L’historien Ian Kershawestime que depuis la Seconde Guerre Mondiale, 70 millions exemplaires ont été écoulés dans le reste du monde. Et Hitler fait encore vendre. En 2009, la version manga du brulot s'écoule à plus de 45 000 exemplaires au Japon, comme le raconte alors Libération.

"Ouvrage de piètre qualité et confus"

Pour l’éditeur, il s’agissait d’une volonté d’information. Il souhaitait montrer que derrière la "bible diabolique" du nazisme se cache un "ouvrage de piètre qualité et confus". "Lisez-le, faites-vous votre propre avis, afin qu'on puisse enfin enterrer le mythe Mein Kampf", enjoint l’éditeur.

Peter McGee a tout de même renoncé à son projet, face aux menaces de poursuites judiciaires du land de Bavière. "Nous ne lèverons pas l'interdiction, car elle pourrait faire le jeu de l'extrême droite", a déclaré un porte-parole du gouvernement bavarois.

Un avis que tempère l’historien Marc Ferro dans une interview sur le site du Plus du Nouvel Observateur. Il explique que "l’interdiction et la censure ne sont pas des options face à ce type de publications, car elles n’ont que des conséquences négatives. A savoir susciter, encore un peu plus, des curiosités et donner du grain à moudre à ceux qui s’estiment privés de liberté d’expression." Pour lui, il est essentiel que soit mis en œuvre "un important dispositif d’encadrement" établi par un "spécialiste ou un historien compétent."

Antoine Vitkine, auteur du documentaire"Mein Kampf, c'était écrit", estime dans Le Point qu’"il ne faut pas traiter ce texte comme un objet magique ou sacré, il n'est aujourd'hui que le témoignage d'un moment historique. La bataille se joue en amont, par un travail de mémoire et par l'éducation des citoyens sur ce qu'a été le nazisme."

"Commentaires pédagogiques d'historiens"

En Allemagne, Dieter Graumann, le président du Conseil central des Juifs d’Allemagne a déclaré ne pas être contre le projet. "Le mieux ce serait qu'il n'y ait pas de publication mais s'il doit y en avoir une alors il faut qu'elle soit assortie de commentaires pédagogiques d'historiens", a-t-il précisé à l’AFP.

Dans un édito publié dans The Local, le journaliste Moises Mendoza estime que le livre devrait être publié. "L’Allemagne connait son histoire douloureuse et les Allemands veulent y être confrontés", écrit-il.

Un souhait qui devrait se réaliser. Le 31 décembre 2015, 70 ans après la mort d'Hitler, les droits de l'ouvrage tomberont dans le domaine public. Le livre pourra alors être réédité partout dans le monde, Allemagne comprise.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !