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Arabie saoudite : nettoyage de printemps ?
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Complot

Trois princes saoudiens, des militaires et des dignitaires soupçonnés de complot pour renverser le prince héritier Mohammed ben Salmane, ont été arrêtés sur fond de rumeurs sur la santé du roi.

Alain Rodier

Alain Rodier

Alain Rodier, ancien officier supérieur au sein des services de renseignement français, est directeur adjoint du Centre français de recherche sur le renseignement (CF2R). Il est particulièrement chargé de suivre le terrorisme d’origine islamique et la criminalité organisée.

Son dernier livre : Face à face Téhéran - Riyad. Vers la guerre ?, Histoire et collections, 2018.

 

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ATLANTICO: Il convient de rester extrêmement prudent sur les informations qui circulent à propos de l’Arabie saoudite ces derniers jours d’autant que nombre de fausses nouvelles ont été diffusées comme la mort de roi Salmane ben Abdelaziz Al Saoud (né le 31 décembre 1935) - même s’il est de notoriété publique qu’il n’est pas en bonne santé -. À l’heure où sont écrites ces lignes, aucune déclaration officielle n’est venue confirmer la nouvelle de l’arrestation de trois princes mais aussi de dizaines de membres des forces de sécurité pour "trahison". Ainsi, Mohammed ben Salmane ben Abdelaziz Al Saoud (MBS, 34 ans), prince héritier et vice-Premier ministre depuis le 21 juin 2017 aurait fait arrêter vendredi 6 mars trois membres de la famille royale.

Ahmed bin Abdulaziz Al Saoud, le plus jeune frère out de même 78 ans au compteur du roi Salmane (la lignée dite des « Soudairi »), ancien ministre de l’intérieur qui est connu pour s’être opposé à MBS, en particulier au sujet de la guerre menée par Riyad au Yémen.

Mohamed Ben Nayef Al Saoud, un neveu du roi, ancien ministre de l’intérieur, prince héritier et ex vice-Premier ministre. Bien qu’ayant été une figure de l’anti-terrorisme saoudien, il avait été démis de ses fonctions le 21 juin 2017 sur ordre du roi Salmane.  Pour le récompenser pour sa participation à la lutte anti-terroriste internationale, le président François Hollande l’avait fait Grand Officier de la Légion d’Honneur en 2016. Le 28 août 2009, Abul Khair, un membre d’Al-Qaida dans la Péninsule Arabique (AQPA) avait tenté de l’assassiner avec ce qui avait été appelé un "suppositoire explosif". Khair avait été éparpillé en soixante-dix morceaux mais Ben Nayef s’en était sorti avec juste une légère commotion auditive !

. Nawaf bin Nayef Al Saoud, le plus jeune demi-frère du prince Nayef et ancien chef du renseignement militaire.

. Nayef bin Ahmed, un des fils d'Ahmed bin Abdulaziz Al Saoud qui a occupé des fonctions de responsabilités dans l'armée.

 MBS avait déjà procédé à une épuration - sous prétexte de lutte contre la corruption - en 2017 en assignant à résidence des princes, des hommes d’affaires, des hauts fonctionnaires, des docteurs de la Foi, des intellectuels, etc.

Mais les arrestations de vendredi pour "trahison" en liaison avec des puissances étrangères - dont curieusement les États-Unis -  constituent le franchissement d’un nouveau cap extrêmement dangereux pour lui. La fermeture samedi des frontières avec les Émirats Arabes Unis (EAU), le Koweït et le Bahreïn (seuls les camions de ravitaillement sont autorisés à passer) pour cause de risque de propagation du coronavirus semble être un prétexte bien approprié…

L’Arabie traverse actuellement une crise politico-économique de première importance. La baisse des cours du pétrole (en partie par la faute de Moscou qui ne s'est pas entendu avec l'OPEP vendredi si bien que le Brent à chuté autour de 31-32$ le baril, la fermeture - même temporaire - en raison de coronavirus des lieux saints de la Mecque et de Médine, le déficit budgétaire abyssal dû pour partie à l’acquisition d’armements nécessaires à la poursuite de la guerre au Yémen, provoquent une crise de confiance aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur du royaume. Elle est amplifiée par les conséquences de l’assassinat du journaliste Jamal Khashoggi le 2 octobre 2018 à Istanbul,  et beaucoup plus encore, par le fait que les installations vitales du régime (aéroports, installations pétrolières, etc.) semblent être à portée des missiles et drones yéménites houthis (et/ou des iraniens) sans que le régime ni ses alliés américains n’y puissent quelque chose.

MBS prépare indubitablement la relève de son père écartant tous ceux qui peuvent lui faire de l’ombre mais l’implication de Washington dans le "complot" dénoncé laisse dubitatif. Est-ce que MBS soupçonnait le président Donald Trump - ou des membres de son administration, les regards se tournent immédiatement vers la CIA qui entretient des relations privilégiées avec Mohamed Ben Nayef Al Saoud - de jouer une autre carte que sa personne, ou est-ce juste un signe d'avertissement ? Il est rapporté que les principaux ont été libérés dimanche (à confirmer). Il n'en reste pas moins que cette action est un avertissemnt à l'intérieur et à l'extérieur pour démontrer qui est le "maître" au royaume (avant le sommet du G20 qui doit avoir lieu à Riyad en novembre 2020).

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