Après Fitch, Standard and Poor’s va noter la France ce vendredi, ce qui panique Matignon beaucoup plus que Bercy<!-- --> | Atlantico.fr
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Alors que Fitch a abaissé fin avril la note de la France, les regards sont désormais tournés vers Standard and Poor’s, qui va rendre son verdict le vendredi 2 juin.
Alors que Fitch a abaissé fin avril la note de la France, les regards sont désormais tournés vers Standard and Poor’s, qui va rendre son verdict le vendredi 2 juin.
©Bertrand GUAY / POOL / AFP

Atlantico Business

Après la dégradation infligée par l’agence Fitch, on craignait le pire. Mais il ne s’est rien passé. Vendredi c’est Standard and Poor’s qui rendra son verdict ce qui rend Matignon plus nerveux que Bercy, qui pense que ça ne sera pas la fin du monde.

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre

Jean-Marc Sylvestre a été en charge de l'information économique sur TF1 et LCI jusqu'en 2010 puis sur i>TÉLÉ.

Aujourd'hui éditorialiste sur Atlantico.fr, il présente également une émission sur la chaîne BFM Business.

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Le gouvernement est certes un peu nerveux. Surtout Elisabeth Borne, beaucoup plus visée que Bercy. C’est ce vendredi que Standard and Poor’s va publier la note qu’elle donne à la France et  tout le monde craint que l’agence soit très perplexe quant à la capacité du gouvernement à redresser sa trajectoire budgétaire. Donc le risque d’être à nouveau dégradé est très fort. Il y a deux semaines, c’est Fitch qui avait décidé de baisser  la note financière de la France d’un cran de AA à AA-… Fitch est, avec Standard & Poor's et Moody's, l'une des trois principales agences de notation opérant à l'échelle internationale.

Le métier de cestrois grandes agences est de diagnostiquer une situation économique et d’évaluer les risques que courent les investisseurs. Ces trois agences sont donc très sollicitées par les agents économiques qui doivent lever de la dette et par les investisseurs qui souscrivent ces dettes. Toutes les grandes entreprises internationales et toutes les banques sont clients. Mais les Etats sont eux aussi des acteurs majeurs du marché de la dette, ils guettent donc avec un peu d’inquiétude le verdict des agences, parce qu’ils savent qu’une partie des conditions financières en dépend.

En théorie, la note est un marqueur de confiance. Si la note est médiocre ou mauvaise, les agents économiques considèrent que les risquesexistent, il faut donc se couvrir par des taux plus élevés.

La France fait partie des grands pays industrialisés du monde. Sa note n’est pas mauvaise. Sa cotationen général évolue entre le triple AAA quand ça va très bien (peu d’endettement et très bonnes perspectives de croissance). Et le double AA (quand la dette a augmenté et que les objectifs n’ont pas été atteints. D’où aujourd’hui, un risque d’augmentation des taux d’intérêt, d’où le risque de voir la charge de la dette (paiement des intérêts annuels) s’alourdir. D’où le risque de voir les taux de tous les crédits consentis par les établissements financiers à leurs clients contaminés, (crédits à la consommation, crédits immobiliers, crédits de trésorerie ou d’investissement, leasingetc. pour les entreprises, comme pour les particuliers).

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Actuellement, on ne peut pas dire que l’état des finances publiques de la France soit excellent et que les perspectives soient rassurantes. Débutavril, l’agenceMoody’s n’avait pas bougé. Fin avril, Fitch dégrade la France parce qu’elle considère que la situation politique est vulnérable et que ses perspectives budgétaires ne sont pas sécurisées. Pour beaucoup d’observateurs, le diagnostic de Standard and Poor’s ne sera pas différent.

Sans trop manifester sa mauvaise humeur, à Bercy, Bruno Le Maire, le ministre des Finances rappelle que l’économie résiste bien à tous les soubresauts et que la hausse des taux est beaucoup plus liée à la situation internationale qu’à la situation française. D’ailleurs, au lendemain de l’annonce Fitch, et contrairement à ce que les experts disaient, les marchés financiers n’ont pas bougé. L’indifférence était de mise.

Alors si Standard and Poor’s annonce, elle aussi, une dégradation, on ne voit pas pourquoi ça bougerait. D’autant que depuis Fitch, la reforme sur les retraites est passée. Les signes de redressement ont été donnés et c’est sans doute la raison pour laquelle les marches n’ont pas bougé.

Plus sérieusement, l’agence de notation s’inquiète d’abord des conditions de soutenabilité de la dette publiqueet regarde très précisément le poids de la charge de la dette par rapport au PIB, plus que le montant global de la dette.

Si la dette publique française atteint les 120 % du PIB, ça parait exorbitant, puisquele montant global de la dette est supérieur à 3000 milliards… Si le montant global de la charge financière représente 50 milliards par an, c’est important puisque ça approche le montant des recettes de l’IRPP, mais pour les agences de notation, comme pour les banquiers ça ne représente guère que 2 à 3 % du PIB. C’est donc gérable.

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D’ordinaire, les marchés commencent à s’affoler quand cette charge de la dette touche les 10% (comme en Grèce dans les années de crise).

D’un point de vue purement technique, le jugement des agences dans ce cas-là a doncpeu d’influence.

Sur le plan politique en revanche, ça fait plus désordre. Du côté de Matignon on apparait donc beaucoup plus inquiet en ce début de semaine et ça n’est pas par hasard.

D’abord parce que Fitch a justifié sa mauvaise note par essentiellement l’instabilité de la situation politique puisqu’ il n’y a toujours pas de majorité à l’Assemblée nationale contrairement à ce que voulait obtenir la première ministre, ensuite on sent bien que la colère sociale ne s’est pas calmée et qu’elle est dirigée contre le pouvoir exécutif ce que souligne Fitch. Enfin parce que Matignon souligne que les critiques de l’agence Fitch portent davantage sur la situation politique que sur la situation économique et financière. Or ça n’est pas forcément le rôle premier d’une agence de notation que d’apprécier la politique politicienne d’un pays. Ce n’est pas son premier souci.

Elisabeth Borne craint donc la détérioration de sa crédibilité, elle n’a pas tort sauf que tout est lié. La qualité de la gestion de l’Étatdétermine aussi la crédibilité de la politique économique. On ne peut pas dire que la communication sur la politique économique ait été très cohérente et très stabilisée depuis qu’elle est au pouvoir. Or en macro-économie, la communication sur les ambitions et les résultats est déterminante dans l’application de cette politique économique. Elle impacte le comportement des agents économiques (entreprises et particuliers ) elle pèse aussi sur l’attitude et la confiance des partenaires.

Si le problème français est principalement d’ordre politique ? Elisabeth Borne a raison d’être inquiète.

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