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2017 : quitte ou double pour la droite et le centre
©LIONEL BONAVENTURE / AFP

Liberté chérie

Le temps manque à la droite et au centre, mais elle doit agir vite si elle veut continuer à jouer un rôle de premier plan sur la scène politique.

Aurélien Véron

Aurélien Véron

Aurélien Véron est président du Parti Libéral Démocrate et auteur du livre Le grand contournement. Il plaide pour passer de l'Etat providence, qu'il juge ruineux et infantilisant, à une société de confiance bâtie sur l'autonomie des citoyens et la liberté. Un projet qui pourrait se concrétiser par un Etat moins dispendieux et recentré sur ses missions régaliennes ; une "flat tax", et l'ouverture des assurances sociales à la concurrence ; le recours systématique aux référendums ; une autonomie totale des écoles ; l'instauration d'un marché encadré du cannabis.

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Dimanche, la France élira sans doute le plus jeune Président de la République de son histoire. Celui-ci aura réussi la performance de menacer le PS de disparition et les Républicains, eux aussi absents du 2nd tour, d’implosion. Emmanuel Macron a raison de se réjouir du nouveau logement de 365 pièces au 55 Rue du Faubourg Saint-Honoré qui l’attend pour un bail d’au moins  5 ans. Mais sait-il où il va et avec qui ? Pas plus que nous sans doute. Il s’adapte en avançant. Offrant au centre et à la droite une occasion unique, la dernière peut-être, de se réinventer.

Dans un bon mois auront lieu les deux derniers tours de ce scrutin dorénavant à 4 temps depuis l’instauration du  quinquennat : les législatives. Emmanuel Macron nous promet du neuf. Il sait néanmoins que des candidats issus de la société civile, ceux qui ont un vrai emploi et une famille à nourrir, manquent le plus souvent d’un ancrage territorial. Le propre du mode de scrutin uninominal à deux tours, c’est de favoriser les implantations locales et de rendre les barons indéboulonnables. Le label Macron ne permettra pas la victoire d’inconnus même s’il leur facilitera la tâche. Il devra par conséquent investir un grand nombre de figures connues, des élus, tout ce que les Français disent rejeter. Ils ont fait une exception dans leur schizophrénie avec Macron qui avait suffisamment reçu de soutiens du « système » pour les rassurer.

La faiblesse du dispositif Macron est de n’avoir pas fait rêver les électeurs autour d’un projet concret de réformes fédérant les citoyens avides de changement. Le succès de son holdup repose sur un alignement miraculeux des planètes et un marketing remarquable. Certes idéal pour lancer un blockbuster, mais trop creux pour mobiliser durablement à ce stade. Faire applaudir Ségolène Royal au premier rang – à côté de Bertrand Delanoë et Jean-Yves Le Drian -  de son dernier congrès relève du - mauvais - buzz, pas d’une ambition de renouvellement et d’émancipation. S’il fait élire des éléphants du PS relabellisés « En Marche » pour s’assurer une majorité, accepteront-ils ce contre quoi ils se sont arcboutés de tout leur poids médiatique jusqu’à ce jour ? N’est-il pas en train de recruter les futurs frondeurs de son camp ?

Reconnaissons-lui l’audace d’avoir lancé un mouvement neuf, d’avoir violé tous les protocoles – et le gouvernement qui l’avait accueilli - en annonçant très tôt sa candidature dés lors que François Hollande ne pouvait pas se représenter. Encore lui fallait-il saisir sa chance. Félicitons-le d’avoir enfin eu la peau d’un PS moribond en proposant une ligne réformatrice social-démocrate toujours rejetée jusqu’ici par une majorité de cadres socialistes accrochés à une forme un peu désuète d’anticapitalisme. Dans les grandes lignes, Emmanuel Macron est bien plus moderne et ouvert au monde que ses partenaires issus du PS. D’ailleurs, lui est à l’aise avec les langues étrangères contrairement à la plupart d’entre eux.

Ne boudons pas notre plaisir d’entendre le futur Président défendre la mondialisation et le libre-échange, l’entreprise et l’esprit d’initiative, les libertés individuelles et l’Etat de droit. Même si ce n’est que pour la façade à ce jour. Combien de candidats peuvent se vanter d’avoir eu ce courage – au point d’exprimer ce message au milieu d’ouvriers hostiles et en colère sans craindre pour sa chemise - dans notre pays où les électeurs ont soutenu à plus de 50% au 1er tour  des lignes démagogiques complètement opposées (de Marine Le Pen à Jean-Luc Mélenchon) ? Poutant, rien ne nous permet de croire qu’il ira loin dans les réformes, d’autant qu’il n’a pas vraiment étalé son jeu jusqu’ici. 

La mutation brutale qu’il impose à l’échiquier politique offre une opportunité rare au centre et à la droite de revoir leurs fondations. Opportunité et surtout nécessité s’ils ne veulent pas connaître le sort du PS. Ringardisés et méprisés, ils peuvent profiter de l’ascension de sa ligne réformatrice – mollement réformatrice mais réformatrice tout de même – pour assumer pleinement les valeurs traditionnelles de la droite moderniste, c’est à dire imprégnée de l’humanisme libéral qui trouve ses racines dans les travaux de Turgot, de Benjamin Constant, d’Alexis de Tocqueville, de Fréderic Bastiat ou de Raymond Aron. Tandis que Macron fait vivre à la gauche son Bad Godesberg salvateur, la droite doit impérativement faire sa mue. Elle doit abandonner sa vieille peau usée teintée de nationalisme, d’autocratisme moral et de dirigisme bureaucratique pour endosser celle du libéralisme authentique, c’est à dire politique, économique et social.

La droite peut faire à nouveau rêver les Français en défendant avec ardeur la liberté dans un monde où celle-ci favorise non seulement l’agilité nécessaire pour répondre aux défis majeurs qui nous attendent, mais aussi le bonheur individuel, fondement des sociétés de confiance. Les révolutions en cours et à venir dans des domaines aussi variés aue les énergies propres et renouvelables, les biotechnologies et le transhumanisme nous promettent des bouleversements qui bénéficieront aux pays ouverts et libres au détriment des contrées fermées sur elles-mêmes, immobiles et défiantes. Reconnaissons à Emmanuel Macron le talent de parvenir à déverrouiller notre société bloquée. La droite doit aller plus loin et apporter l’oxygène dont nos citoyens ont désespérément besoin. Lui veut les aider en les guidant. Elle peut les sauver en les émancipant de l’Etat nounou qui les infantilise depuis des décennies.

Ne pas voter Emmanuel Macron le 7 mai serait bien plus qu’une erreur. Ce serait une faute morale. Un social-démocrate est toujours préférable à la tentation totalitaire, nationaliste et xénophobe Mais ne pas contribuer à reconstruire un centre et une droite ayant le courage et la vision pour refonder notre modèle social le serait tout autant. Pour autant, les périls de plus en plus palpables ont rendu nécessaire l’esprit de coalition parlementaire sur des projets de réforme partagés. Quelle que soit la majorité issue des législatives, droite et centre ne pourront s’enfermer dans une opposition stérile à Emmanuel Macron sans prendre le risque d’une crise bien plus grave demain.

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