UE, un conseil restreint pour mieux décider à 28 : l'avis de Corinne Lepage <!-- --> | Atlantico.fr
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Corinne Lepage.
Corinne Lepage.
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Dans un article paru sur Atlantico, Michel Guénaire propose la constitution d’un Conseil européen de six membres, inspiré du Conseil de sécurité des Nations unies, dont l’Allemagne et la France seraient les deux membres permanents. La député européenne Corinne Lepage a souhaité réagir.

Corinne Lepage

Corinne Lepage

Corinne Lepage est avocate, ancien maître de conférences et ancien professeur à Sciences Po (chaire de développement durable).

Ancienne ministre de l'Environnement, ancienne membre de Génération écologie, fondatrice et présidente du parti écologiste Cap21 depuis 1996, cofondatrice et ancienne vice-présidente du Mouvement démocrate jusqu'en mars 2010, elle est députée au Parlement européen de 2009 à 2014. En 2012, elle fonde l’association Essaim et l’année suivante, la coopérative politique du Rassemblement citoyen. En 2014, elle devient présidente du parti LRC - Cap21.

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Dans un article paru sur Atlantico le 17 décembre, Michel Guénaire propose la mise en place d'une forme de conseil de sécurité de six membres pour la gestion de l’Europe dont la France et l’Allemagne seraient les deux membres permanents. Les autres pays seraient représentés dans quatre groupes et participeraient par roulement à ce conseil. La contrepartie serait de faire de la Commission une forme de secrétariat général.

Si cette solution cherche à répondre à un véritable problème, il est en revanche probable qu’elle ne puisse aboutir. On ne peut que partager le constat de Michel Guénaire sur le fait qu’il n’existe pas d’Europe politique et qu’il n’est pas possible d’envisager une transformation des institutions avec 28 membres, tout au moins au niveau de l’exécutif. En effet, sur le plan parlementaire, le nombre d’Etats ne constitue pas un problème majeur dans la mesure où c’est la loi de Hondt qui s’applique. Ainsi, la représentation se fait en fonction du pourcentage de députés par groupes politiques et non en fonction des nationalités ….mêmes si celles-ci ne sont pas tout à fait absentes de la répartition des présidences et vice-présidences.

A lire aussi : Un conseil restreint pour mieux décider à 28 : la proposition qui pourrait tout changer dans l'Union européenne (et la sauver ?)

Il est tout aussi exact que nous sommes au milieu du gué. Si nous voulons que sur le plan international l’Europe puisse réellement peser ,il est indispensable d’aller au-delà des considérations économiques et de permettre à l’Union de parler d’une seule voix, ce qui signifie dépasser le cap de l’inter-étatique que représente le Conseil des Ministres. Or, le poids du Conseil n’a cessé de se renforcer et la codécision- mécanisme faisant intervenir le seul organe élu à savoir le Parlement - n’a de loin pas produit tous les effets escomptés. Nous devons donc changer de braquet et bien évidemment la question du fédéralisme se pose, même si le mot constitue un épouvantail en France.

Pour autant, la solution proposée paraît peu satisfaisante et surtout impraticable. Il suffit d'observer les susceptibilités  nationales pour constater que personne n’acceptera jamais un organisme dans lequel la France et l’Allemagne seraient les seuls à avoir un siège de membre permanent, et les autres Etats devraient se contenter de sièges tournants dans quatre groupes pré- constitués. La Grande-Bretagne bien sûr, mais aussi l’Italie et la Pologne qui compte aujourd’hui plus de 40 millions d’habitants, n'accepteront jamais un système de cette nature. De plus, imaginer que des États concèderaientd’être représentés par un autre mais que ce représentant pourrait être mis en minorité par une majorité simple est tout simplement impossible.

Il n’en demeure pas moins qu’il est indispensable de réfléchir à l’institution qui pourrait répondre à cette nécessité d’une Europe politique. En l’état actuel, un noyau dur à vocation politique pourrait se constituer autour du couple franco-allemand, car c’est évidemment là que se trouve le moteur de l’Europe. Ce dernier n’aurait évidemment pas vocation à accueillir les 28 Etats de  l’Union, au moins au départ. De même que l’euro ne concerne pas tous les Etats de l’Union européenne , cette Europolitique ne concernerait que les Etats signataires du Traité de Rome initial et quelques autres. Ce noyau dur pourrait constituer des institutions propres, comme l’Eurogroupe, lesquelles pourraient ensuite peser au niveau des institutions prévues dans le Traité de Lisbonne. Dans un second temps, ce traité pourrait être modifié, mais les énormes difficultés liées à son accouchement et le traumatisme qui s’en est suivi doit rendre particulièrement prudent.

Car en définitive, le sujet essentiel est bien celui de la démocratie en Europe et des conditions dans lesquelles nos concitoyens pourraient à nouveau se retrouver dans l'idée européenne. La reconquête de la confiance sera laborieuse et se fera non sur des belles paroles mais sur des preuve. Les prochaines élections européennes donneront certainement lieu à des débats houleux , peut-être même violents, remettant en cause le bien-fondé de la construction européenne elle-même. Tous ceux qui sont convaincus que, malgré ses immenses faiblesses, la construction européenne est indispensable devront alors être en capacité de proposer des directions claires, des solutions réalistes. Il s’agira en effet de convaincre nos concitoyens de leur intérêt individuel et collectif à poursuivre cette œuvre essentielle, ce qui signifie les convaincre que la bonne santé de chacun des Etats, voire leur maintien dans la compétition internationale, ne pourra se faire qu’avec une Europe forte et en aucune manière avec une Europe affaiblie.

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