Quand la tête de mort s’offre des yeux de poupée, quand le capitaine Nemo s’offre du bon temps et quand le la se lit lo : c’est l’actualité des montres de ce printemps

WILLIAM L. 1985: Le « style panda » pour faire chic sans le choc du prix…

Jeune marque française née voici moins de trois ans sur les réseaux de sociofinancement, William L. 1985 a su rester aussi indépendanteque créative. La marque s’inspire des chronographes de l’âge d’or (années cinquante et soixante), sans chercher à se fournir en Suisse pour faire chic puisqu’il s’agit d’avoir le plaisir du style sans le souci du prix. D’où les collections de l’année, dans ce style « panda » qui bat des records pour les montres de collection vendues aux enchères et avec ce bracelet en acier dont les maillons rappellent les icônes de cet âge d’or. À moins de 190 euros le boîtier en acier de type chronographe en 40 mm, avec un mouvement à quartz largement suffisant pour afficher la date, le jour de la semaine et un compteur vingt-quatre heures. Une montre sans souci, idéale pour partir en vacances sans rien sacrifier de son allure…

HUBLOT: Une minute par ci, trente secondes par là…

Attention, ovni horloger ! Signée Hublot, cette montre MP-09 Tourbillon Bi-Axis renoue avec la tradition des concept watches ultra-créatives des années 2000, quand les horlogers suisses se sentaient appelés à toutes les audaces mécaniques et à tous les frissons rupturistes. La crise est venue depuis calmer ces ardeurs, mais est-ce un hasard si les marques les plus ardemment innovantes sont aussi les plus triomphantes commercialement ? Hublot s’offre donc son premier tourbillon double axe (double rotation sur lui-même : une minute dans un sens, trente secondes dans l’autre), dans un boîtier qui met cette giration en valeur sous une spectaculaire « bulle » de verre saphir à 6 h. Les heures et les minutes sont décentrées et cernées par un affichage très original de la date en deux demi-cercles. Le tout avec un mouvement mécanique développé en interne pour proposer cinq jours de réserve de marche (comptez 49 mm pour ce boîtier hors normes, dont le prix est lui aussi hors normes !)…

MONTFORT: Le grand air frais des alpages…

Marque inconnue, mais grosses ambitions d’une équipe de copains suisses passionnés de montres – une passion assez répandue entre les lacs et les alpages de la Confédération. Le nom même de la marque – « Montfort », comme le Mont-Fort des Alpes valaisannes – sent bon la montagne ! L’idée était de développer une montre authentiquement Swiss Made, mais à des prix authentiquement raisonnables pour des détails de finition authentiquement originaux, comme le cadran texturé en trois dimensions de la James (comme Bond), qui évoque les « clous de Paris » de la décoration horlogère traditionnelle. Une première souscription sur Kickstarter a permis de lever près de 250 000 euros, ce qui n’est pas rien pour des inconnus ! L’acier des boîtiers (44 mm) a été « durci » pour résister aux rayures, le mouvement automatique est de belle provenance et les bracelets ont été étudiés pour pouvoir y loger une puce de paiement sans contact. Intelligemment dessinées, avec assez d’angles et de courbes bien maîtrisées pour séduire les nouvelles générations, les premières collections de Montfort arrivent sur le marché : souscrites à moins de 1 000 euros, elles sont désormais facturées au double de ce prix – ce qui reste une bonne affaire pour la bienfacture dont elles témoignent…

ICE-WATCH: La Lo qui donne le la…

La marque aux 15 millions de montres vendues, pour un total de 1 770 références, a la politesse, et même la délicatesse, de ne jamais nous laisser tomber avant l’été. Ice-Watch sait renouveler ses collections pour préserver la tranquillité horlogère de nos vacances : pour briller au soleil, ce sera cette année la série Ice Lo, brillantes, pailletées, givrées, granitées, étincelantes par la couleur de leurs cadrans dégradés. « Lo » comme qui voussavez à Hollywood. Avec le blanc du bracelet en silicone qui avale en douceur le boîtier, ce sera la montre-fraîcheur de l’été – minimaliste et contemporaine, mais tout de même très élégante. En 34 mm, c’est très féminin, mais, en 40 mm, les garçons pourront se laisser tenter par certaines couleurs (vif argent, turquoise, bleu, rose ou doré). Une « Lo » qui donne le « la »…

BOMBERG: Un crâne qui baisse les yeux pour piloter une « Harley »…

Comme sur les poupées de notre enfance, les yeux de cette tête de mort – un symbole « rebelle »de plus en plus embourgeoisé chez les « bobos » – s’ouvrent et se ferment au rythme des mouvements du poignet. C’est à la fois fascinant et déroutant, ce regard inscrit dans un crâne donnant une forme de vie à ce Memento Mori contemporain, capable de donner l’heure (petit compteur décentré) en même temps que des émotions fortes. Cette Skull Rider est évidemment recommandée au guidon d’une Harley-Davidson, évidemment « customisée » : les purs et durs la fixeront même sur le guidon, la maison Bomberg ayant prévu un porte-montre spécial pour cet objet du temps pas comme les autres, qu’on peut également porter comme une montre de poche, grâce à un astucieux système de verrouillage à baïonnette : les maillons de la chaîne au bout de laquelle la montre sera attachée sont tout aussi évidemment des têtes de mort et ce « chapelet » de crâne doit impérativement pendre hors de la poche du jeans – évidemment râpé – où on rangera la montre. Comme quoi les « rebelles » sont soumis à une étiquette aussi rigoureuse que celle de la cour de Louis XIV racontée par Saint-Simon…

RJ-ROMAIN JEROME: On a retrouvé la montre du capitaine Nemo…

Imaginée par la manufacture suisse RJ-Romain Jerome, cette montreThe Deep Blue Octopus est un vrai manuel de littérature, qui nous raconte la pieuvre des Travailleurs de la mer de Victor Hugo (premier écrivain, semble-t-il, à avoir parlé de « pieuvre ») aussi bien que la pieuvre géante de Vingt mille lieues sous les mers de Jules Verne – celle qui en voulait au capitaine Nemo – ou le kraken des sagas scandinaves. On vient donc de retrouver un nid de ces pieuvres sur les rives du lac de Genève : on les trouve au dos de la montre, sur les deux couronnes de remontage et sur le cadran, avec leurs huit tentacules, au milieu de « bulles » océaniques qui évoque aussi l’exosquelette d’un oursin (la nuit, ces « bulles » sont luminescentes : image en haut de la page). Notez bien ce chiffre huit [qu’on sait « magique » pour les Asiatiques] : cette montre est étanche à 888 pieds (270 m), avec huit vis sur le flanc du boîtier, huit vis sur le fond et huit rivets sur chaque couronne. Même le boîtier de 47 mm est né dans les grands fonds et flirte avec les géants des mers : la lunette crantée et « oxydée » autour du cadran contient des fragments d’acier provenant de la coque du Titanic et récupérées lors de la première expédition sur l’épave. Pourquoi deux couronnes symétriques, à trois heures et à neuf heures ? À neuf heures, c’est pour remonter la montre et la mettre à l’heure. À trois heures, la couronne permet de débrayer la lunette tournante intérieure (la ronde graduée des minutes) pour calculer le temps écoulé à partir du repère lumineux associé au « 60 » (quand on le place sur l’aiguille des minutes)…

• LE QUOTIDIEN DES MONTRES

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