Grèves, blocages et violences urbaines : je te fais du mal mais c'est pour ton bien<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
Grèves, blocages et violences urbaines : je te fais du mal mais c'est pour ton bien
©Reuters

BDSM

C'est pourtant simple : en France, lorsqu'il n'y a ni trains ni métros, c'est pour qu'ils roulent mieux. Et la casse dans les rues, c'est pour hâter l'avènement d'une société sans violence.

Hugues Serraf

Hugues Serraf

Hugues Serraf est écrivain et journaliste. Son dernier roman : La vie, au fond, Intervalles, 2022

 

Voir la bio »

Dans les pays "normaux" (cf : à peu près tous les pays du monde qui ne soient pas simultanément bordés par l'Allemagne, la Belgique, le Luxembourg, la Suisse, l'Italie et l'Espagne), lorsqu'on fait grève, qu'on défile dans les rues avec des banderoles ou qu'on dévaste un centre-ville à coups de barres de fer, on le fait ouvertement pour sa pomme.

Oh, ce n'est pas qu'on y soit spécialement égoïste, dans ces pays normaux, ne vous méprenez pas, mais au moins plus franc du collier. Vous êtes employé du métro londonien, par exemple, et vous décidez de lever le pied parce que vous avez envie de plus de ceci ou de moins de cela, eh bien vous le dites : "Je suis en grève parce que je veux gagner plus et bosser moins, ce qui rendrait ma vie plus sympa, et c'est le moyen que j'ai trouvé de faire pression sur mon employeur pour obtenir satisfaction". Mais vous ne passez pas au JT en expliquant que ça vous fait mal au cœur de voir les Londoniens aller bosser à pied, mais que c'est précisément pour défendre leur droit imprescriptible de prendre le métro que vous les en empêchez.

Vous êtes un agriculteur polonais et vous répandez du lisier devant votre ministère de l'agriculture pour protester contre l'interdiction de balancer des déjections porcines où bon vous semble, vous ne racontez pas à la radio que vous êtes les "jardiniers du paysage" et défendez l'art de vivre à la polonaise contre les coups de boutoirs de l'Europe libérale. Vous demandez juste qu'on ne vous gonfle pas quand vous salopez la nature parce que vous avez toujours fait comme ça, que ça vous coûte moins cher et que c'est plus pratique de toute manière.

Vous êtes un un hooligan russe et vous choisissez un beau beau matin d'aller exprimer vos frustrations nihilistes en explosant des vitrines et des distributeurs de billets, vous le justifiez à la limite par la défaite du Spartak Moscou mais vous ne donnez pas d'interviews dans lesquelles vous vous déclarez choqués par l'inversion de la hiérarchie des normes dans l'article II de la loi Travail.

Nos conflits à nous, par comparaison, ne sont jamais dictés par des intérêts catégoriels, les agents de la RATP ne supprimant des métros que pour en améliorer la fréquence et la Poste ne bloquant le courrier que pour en accélérer l'acheminement. Ça ne convainc personne, il y a belle lurette que le type qui doit poser une journée de congé parce qu'il n'y a pas de transports ou d'école pour les enfants a compris que ça n'avait pas grand chose à voir avec ses petites préoccupations prosaïques d'usagers, mais la comédie se poursuit. Et le boss de la CGT a beau censurer la presse nationale au nom de son opposition à la loi El Khomri, le renvoi des TGV au garage de ces derniers jours n'a pas grand chose à voir avec le fameux 49.3.

Quand on vous fait du mal, c'est rarement pour votre bien.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !