Déflation, Trump, migrants... bienvenue dans un monde qui craque <!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Economie
La planète est au bord du burn-out.
La planète est au bord du burn-out.
©Reuters

Chronique du pot aux roses

Les statistiques économiques chinoises truquées ou encore le manque d'information sur les réelles motivations des migrants qui chaque jour plus nombreux poussent les portes de l'Europe empêchent les politiques de résoudre correctement les problèmes, qui commencent à s'accumuler dangereusement au niveau planétaire.

Google et Yahoo, internet

Serge Federbusch

Serge Federbusch est président d'Aimer Paris et candidat à l'élection municipale de 2020. Il est l'auteur de La marche des lemmings ou la 2e mort de Charlie, et de Nous-Fossoyeurs : le vrai bilan d'un fatal quinquennat, chez Plon.

Voir la bio »

1 - La déflation, c'est maintenant

Le phénomène de yo-yo qui affecte les marchés financiers a atteint des amplitudes extrêmes ces jours derniers. Les "investisseurs" sont drogués aux taux d'intérêt artificiellement bas que fournissent ces étranges dealers que sont devenues les grandes banques centrales. Il a suffit que quelques maxi boursicoteurs jugent soudain que la chute brutale du marché des actions allait contraindre la Fed et la Banque de Chine à maintenir leur politique d'argent facile et le rebond est apparu comme par enchantement. Mais, de la même manière que les arbres ne montent pas jusqu'au ciel, les autorités monétaires ne peuvent maintenir indéfiniment une situation où l'épargne n'est plus rémunérée. Dans un monde où l'ensemble des prix et des taux d'intérêt baisse, il n'est guère étonnant que celui des actions finisse un jour par être touché. La surprise vient plutôt de l'étonnement des commentateurs et de certains opérateurs de marché.

Car la chute de la bourse de Shanghai n'est pas la simple correction d'une exubérance irrationnelle s'étant emparée de ce marché depuis un ou deux ans. Le problème de l'économie chinoise est double et il est devenu planétaire.

D'une part, les statistiques, comme une grande partie de l'économie financière de l'empire du milieu, sont truquées par un parti-état qui veut afficher des bonnes nouvelles afin de tromper les agents économiques et créer ainsi la réalité qu'il souhaite. On ne connaît donc pas précisément la situation réelle de la Chine. Cela peut faire passer les investisseurs de l'euphorie au malaise puis à la panique en un temps très court.

Ce qui est sûr, d'autre part, c'est que l'économie chinoise est extrêmement dépendante des exportations et, malgré certains progrès, peu innovante au regard de la place qu'elle a prise dans les échanges mondiaux. Elle a conquis des parts de marché par la compétitivité-prix sans guère apporter au monde de progrès technique notable. Mais une économie plus inventive implique une société plus libre. Le rattrapage ne peut être qu'économique, il doit être aussi démocratique. Et c'est ici que le rôle du parti-état, longtemps bénéfique à la croissance, devient désormais un obstacle. On va bientôt reconsidérer Tien An Men et les événements de 1989.

Au fond, le grand paradoxe du capitalisme mondial de ces trente dernières années est qu'il reposait trop sur l'efficacité d'une bureaucratie chinoise officiellement communiste qui agissait surtout comme une sorte de super conseil d'administration d'un régime autoritaire. La Chine a servi de gigantesque machine à comprimer les coûts de production. En réaction, les Etats nations qui le pouvaient ont protégé leurs citoyens électeurs en laissant filer les dettes et la création monétaire tout en bénéficiant de cette arrivée massive de produits à bon marché.

Autrefois, les Etats-Unis assuraient à la fois un rôle de promotion des innovations techniques et de relance contra-cyclique quand la demande planétaire flanchait. La Chine ne fait suffisamment ni l'un ni l'autre et c'est cette alternative qui fait défaut. Le yo-yo boursier va donc se poursuivre et le vrai krach n'a pas encore été ressenti.

Il le sera quand les opérateurs de marché réaliseront que les banques centrales ne sont définitivement pas de taille à régler ce déséquilibre.

Du reste, le meilleur indice de la gravité de la situation est que notre Mou-Président national a déclaré s'est déclaré "confiant" avec son sûr instinct économique : "Les autorités chinoises (...) ont les moyens d’agir, et la croissance chinoise, même si elle continue de ralentir, reste à un niveau particulièrement enviable." Il n'en rate décidément pas une !

2 - Une élection ça Trump énormément

Face à cette faillite mondiale des sachants et des puissants, une réaction anti-élitaire monte, c'est bien normal. Sorte de mix à la sauce hamburger de Tapie et de Berlusconi, Donald Trump a parfaitement compris que les donneurs de leçons morales et politiques sont démonétisés comme les billets qu'ils impriment. A des gouvernants manipulateurs, les peuples répondent logiquement par des bras d'honneur et celui qui le fait avec le plus de vigueur est distingué par les électeurs. Bref, le phénomène Trump, sauf accident, ne va pas s'arrêter là. Les héritiers Clinton et Bush ont du souci à se faire.

La France a été pour le moment épargnée par ce genre de percée du fait de la présence de Jean-Marie Le Pen qui incarnait protestation et provocation. Son élimination du paysage politique et la paradoxale normalisation du Front national ouvre un espace encore en jachère dans la vie politique française. Le Jean-Marie socialiste, Le Guen celui-là, rend donc délibérément service au Front national en rappelant son radicalisme perdu et en agitant le spectre de la déportation de quatre millions de musulmans français. Après tout, l'oligarchie française s'est parfaitement accommodée d'un épouvantail qu'elle a fabriqué et qui vaut mieux pour elle qu'un aventurier qui la déstabiliserait vraiment.

3 - Invasion migratoire et péril religieux

Comme pour les statistiques chinoises, un des principaux problèmes de l'arrivée massive d'immigrants qu'affronte en ce moment l'Europe est qu'on ne connaît pas leur situation et leur motivation précises. Les réfugiés fuyant un péril politique imminent sont probablement très minoritaires parmi la masse de ceux qui viennent chercher du travail ou même une simple protection sociale. Nombreux vont jusqu'en Europe occidentale pour ces deux dernières raisons, sinon ils s'arrêteraient en Turquie ou dans des pays du Maghreb. L'Allemagne est prête à en accueillir un grand nombre, le Royaume-Uni commence à saturer et les autres Etats n'en veulent pas. La seule solution serait donc qu'une Europe vraiment unie fasse le tri dans des zones choisies et affectées à cette sale besogne puis repousse ceux qui ne sont là que pour des raisons économiques et qui excèdent les capacités d'absorption choisies par les gouvernements respectifs. Comme rien n'est fait en ce sens, l'Europe se discrédite chaque jour un peu plus.

Cela ouvre un nouveau boulevard pour un discours anti-migratoire à la Trump. Avec ce caractère aggravant en Europe que la plupart de ces clandestins sont musulmans et que la question de leur acceptation à long terme des valeurs laïques n'est pas réglée. Fuir Daech est la motivation d'une seule petite minorité d'entre eux et la quasi totalité des femmes qu'on voit sur les bateaux et convois arrivent voilées.  

Bienvenue dans un monde qui craque !

A lire, du même auteur : "La marche des lemmings… ou la 2e mort de Charlie - Le pouvoir de la manipulation et la manipulation au pouvoir", publié chez Ixelles Editions, 2015. Pour acheter ce livre,cliquez ici.

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !