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Xavier Bertrand : “Si c’est pour créer des impôts, il est hors de question de travailler main dans la main avec qui que ce soit, droite ou gauche”
©Reuters

Enfer fiscal

Xavier Bertrand revient pour Atlantico sur le combat qu'il entend mener contre la création d'un nouvel impôt au profit des régions. L'occasion également d'évoquer l'importance du respect des engagements électoraux à un moment où la défiance vis-à-vis des politiques n'a jamais été aussi forte.

Xavier Bertrand

Xavier Bertrand

Xavier Bertrand est Président de la Région Hauts-de-France et Président de Nous France.

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Atlantico : Vous avez décidé de quitter l’Association des Régions de France (ARF) suite à la création d’une nouvelle taxe collectée sur les ménages et les entreprises. De quoi s’agit-il ? Qui est à l’initiative de ce nouvel impôt ?

Xavier Bertrand : J’ai quitté l’ARF parce que je suis farouchement contre la mise en place d’un nouvel impôt au profit des régions. Pendant la campagne des régionales, tous les candidats de la droite et du centre ont déclaré qu’il n’était pas question d’augmenter les impôts. Je n’ai pas l’intention de faire le contraire après les élections. Je n’ai pas été élu pour lever un nouvel impôt ni pour augmenter les impôts. En France, ce sont les entreprises qui créent les emplois, les politiques ont une spécialité, c’est de créer des impôts, pour moi, il n’en est pas question. A partir du moment où l’ARF et le gouvernement sont d’accord pour créer ce nouvel impôt, je me retire de l’ARF car j’estime que l’ARF ne défend pas les intérêts de ma région, des habitants de la région et des entrepreneurs de la région.

Quant à la responsabilité de cette initiative, nous assistons à un bal des hypocrites : le gouvernement affirme créer ce nouvel impôt à la demande des régions quand ces dernières affirment que c’est le gouvernement qui est à l’origine de cette nouvelle taxe pour financer des nouvelles compétences. Mais peu importe, le résultat est identique : au final, 600 millions d’euros seront pris dans la poche des ménages et des entreprises. Et moi, clairement, je dis niet. 

En quittant l’ARF, je souhaite que l’on se rende compte de ce qui est en train de se préparer au cœur de l’été : la mise en place d’un énième impôt supplémentaire alors que tout le monde dans les discours s’accorde à dire qu’il y a un ras le bol fiscal dans notre pays.

Est-ce que d’autres présidents de région s’opposent à ce nouvel impôt ? Politiquement, comment comptez-vous mener la fronde ?

Christian Estrosi avait indiqué qu’il refusait aussi ce nouvel impôt. A chacun maintenant de dire clairement ce qu’il veut. A partir du moment où ce sujet est maintenant public, j’ai l’intention de saisir l’ensemble des parlementaires de cette question. Je souhaite que le gouvernement et l’ARF renoncent, que les régions renoncent mais j’en appelle aussi aux entrepreneurs et aux ménages à faire part de leur opposition à une telle mesure.

La création d’un nouvel impôt me semble totalement irresponsable. On a  aujourd’hui une croissance que chacun espère mais que l’on ne veut pas voir plombée par la mise en place d’un nouvel impôt. La confiance dans les décideurs et les responsables politiques est aujourd’hui proche de zéro. On a le sentiment que beaucoup considèrent aujourd’hui l’impôt comme étant illégitime, ce qui pose un véritable risque d’effacement du lien. Je préfère me passer à l’échelle de la région d’environ 60 millions d’euros et ne pas les distribuer aux entreprises. Au moins,  je ne les aurai pas pris dans la poche à la fois des entrepreneurs et des propriétaires.

Vous avez déclaré "je ne danse plus au bal des hypocrites". Après les régionales de janvier, vous aviez fait montre d’une volonté de pragmatisme, de faire de la politique autrement, de façon moins partisane. La création de ce nouvel impôt et cette promesse non tenue marquent-elles un coup d’arrêt à cette volonté de travailler main dans la main avec le gouvernement ?

Il y a une hypocrisie qui consiste à se renvoyer la balle. Le gouvernement accuse les régions et inversement. Nous verrons bien quels seront ceux qui auront une action en cohérence avec les discours électoraux et quels sont ceux qui ne tiendront pas leurs promesses. J’avais indiqué que s’il y avait une taxe, il fallait laisser les régions fixer le taux et dans la région des Hauts de France, j’avais dit que ce taux serait à 0. Mais mieux encore est de renoncer à mettre en place une telle taxe.

Si c’est pour créer des impôts, il est hors de question de travailler main dans la main avec qui que ce soit, droite ou gauche. Philippe Richert, président de l’ARF, est quelqu’un que j’estime et qui appartient à ma famille politique. Et pourtant, je romps avec l’ARF. N’allons pas chercher de question de politique partisane dans cette affaire.

J’en appelle simplement au bon sens. Pendant une campagne électorale, on parle beaucoup aux gens et on parle beaucoup des gens mais après les élections, on donne le sentiment que les dossiers sont tellement importants qu’ils deviennent prioritaires par rapport aux gens. Pas pour moi. C’est peut-être ici que se dessine la ligne de fracture entre ceux qui tiennent leurs engagements et ceux qui ne les tiennent pas.

Je connais les contraintes de chacun. La région des Hauts de France n’est pas une région budgétairement riche. Elle est endettée mais je préfère faire des économies sur les dépenses que d’augmenter les impôts. Et pour ne rien vous cacher, je préfère les emplois aux impôts. 

Propos recueillis par Emilia Capitaine

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