Vie privée de Florian Philippot : pourquoi les indignés d’aujourd’hui seront probablement les premiers à en faire des tartines sur les liens supposés entre homosexualité et extrême droite<!-- --> | Atlantico.fr
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Florian Philippot.
Florian Philippot.
©Reuters

Faux-cul

Après la révélation de l'orientation sexuelle de Florian Philippot, vice-président du Front national, c'est au tour de Julien Odoul, nouveau conseiller de Marine Le Pen, de susciter la polémique. Dans le viseur médiatique, une chasse aux sorcières autour de l'homosexualité supposée de nombreux membres du parti frontiste.

Christian Combaz

Christian Combaz

Christian Combaz, romancier, longtemps éditorialiste au Figaro, présente un billet vidéo quotidien sur TVLibertés sous le titre "La France de Campagnol" en écho à la publication en 2012 de Gens de campagnol (Flammarion)Il est aussi l'auteur de nombreux ouvrages dont Eloge de l'âge (4 éditions). En avril 2017 au moment de signer le service de presse de son dernier livre "Portrait de Marianne avec un poignard dans le dos", son éditeur lui rend les droits, lui laisse l'à-valoir, et le livre se retrouve meilleure vente pendant trois semaines sur Amazon en édition numérique. Il reparaît en version papier, augmentée de plusieurs chapitres, en juin aux Editions Le Retour aux Sources.

Retrouvez les écrits de Christian Combaz sur son site: http://christiancombaz.com

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La République des coups-bas ayant donné la preuve en plusieurs occasions de son ingéniosité en matière de scandales programmés, on ne peut qu'essayer de deviner pourquoi la vie privée d'un dirigeant de droite vient d'être révélée sans le moindre signe avant-coureur. Non, cela ne signifie pas que personne ne savait, tout le monde savait au contraire, parmi ceux qui sont au courant de tout : les habitués des journaux, des forums sur internet et les friands de potins. Mais le potin en question circulait dans l'indifférence générale depuis deux ans et demi. Il est probable qu'un sondage souterrain, commandé à ce qui reste de la machine de guerre mise en place sous l'ancien président à l'Elysée, a révélé l'ignorance des "vieux militants" quant à la vie privée des énarques de leur parti. Le résultat de ce sondage a sans doute décidé les auteurs du complot à lâcher la meute contre le premier d'entre eux. Le magazine dont il est question est une filiale d'un groupe berlusconien dont il est permis de penser que les intérêts européens, plutôt atlantistes, plutôt ukrainiens, ne coïncident pas avec ceux du Front National. Cette opération présente donc toutes les caractéristiques du coup fourré à visée lointaine mais le plus intéressant est le deuxième volet de l'opération.

A présent que l'indiscrétion initiale a été commise, et que la plupart des journaux ont exprimé leur réprobation au nom du respect de la vie privée, il reste à exploiter le potentiel de la brèche ainsi ouverte. D'abord il faut laisser entendre qu'il y a eu, de la part de la victime de l'indiscrétion, une volonté de dissimuler. Il faut que le militant de base se dise "il cachait bien son jeu, il avait honte, il a essayé de nous abuser", alors qu'en vérité il ne cachait rien du tout mais l'important, comme on dit désormais en météo, c'est le ressenti. Et le ressenti est qu'un personnage bardé de diplômes (premier handicap devant le "vieux militant") passe des week-ends avec un type qui lui ressemble, dans une capitale culturelle lointaine, au lieu d'aller arpenter les marchés de gros à Rungis.

Ensuite et c'est le plus important, cet épisode créé de toutes pièces ouvre un boulevard aux dossiers spéciaux de huit pages sur le thème "l'étrange collusion entre homosexualité et extrême droite". On vient d'exhumer les photos d'un jeune homme pourtant hétéro mais assez bien bâti, qui a posé nu il y a des années pour gagner sa vie en tant qu'étudiant, et qui vient d'entrer au cabinet de Marine Le Pen. On va nous resservir des analyses psychiatriques sur le culte de la force. On va remonter aux homosexuels qui gravitaient autour d'Abel Bonnard pendant l'occupation. On va nous parler de la double vie de Georg Haider, de Pim Fortuyn en Hollande. On va dériver, immanquablement, vers les dizaines de cas où des élus américains très remontés contre le mariage homo ont été arrêtés par la police en pleine indécence dans un bar cuir.

Mais rien sur les maires de grandes villes du Sud qui ont fait carrière avec la rigueur et l'efficacité d'un chef mafieux sous houlette gaulliste. Rien sur les militaires homosexuels médaillés au combat (y compris au GIGN). Rien sur les maréchaux de France, les pilotes de ligne et les chirurgiens homosexuels. Rien surtout sur les innombrables haut-fonctionnaires qui gèrent le pays quotidiennement en partageant leur vie avec un chef de cabinet ou un assistant parlementaire depuis trente ans. Et encore, je ne remonte pas au duc de Vendôme, à Eugène de Savoie et à Frédéric II.

L'objet de la démonstration pour les comploteurs sera donc clair : établir un lien entre orientation sexuelle et choix politiques radicaux, afin de prouver que les idées d'extrême-droite relèvent de la névrose , tout comme leurs moeurs. Oui parce que, figurez-vous, en plus de ce qui précède, la plupart de ceux qui ont lâché la meute sont convaincus qu'il n'y a rien de génétique dans l'homosexualité. Pour eux il s'agit d'une construction mentale et c'est tout , il n'y a rien à chercher du côté de l'hérédité, c'est Freud qui l'a dit. En somme leur club de conjurés est une église laïque avec son dogme intouchable, avec la même casuistique et le même besoin de gouverner les esprits que le catholicisme. Dans un cas on parle de péché, dans l'autre de névrose, et on en sort dans les deux cas par la confession. 

Parallèlement, faire quatre enfants à une femme qu'on n'épouse pas, en choisir une autre sans le lui dire, en choisir une troisième sans le dire aux deux autres, et envoyer douze SMS par jour à celles qu'on abandonne, pour lui répéter tu es la femme de ma vie, épouser un top-model ou une actrice en trois semaines pour être accompagné au G20 , ça , ça n'est ni une névrose ni un péché, et ça vous donne le droit de gouverner un pays pour le mener à la faillite en dix ans.

En bien la grande surprise de l'opération de cornecul dont vient d'être victime Philippot, est que "le vieux militant" FN va peut-être finir par comprendre, à contre-coeur, où est la dignité.

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