TVA sociale : faux débat, vrai boulet<!-- --> | Atlantico.fr
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Le mécanisme dit de "TVA sociale" n’est rien d’autre que la substitution à une baisse de charges salariales d’une hausse de TVA partiellement assise, elle aussi, sur les salaires.
Le mécanisme dit de "TVA sociale" n’est rien d’autre que la substitution à une baisse de charges salariales d’une hausse de TVA partiellement assise, elle aussi, sur les salaires.
©BD Essonne

Taxe

De retour dans la sphère publique suite aux récents débats de la primaire de la droite et du centre, la TVA sociale souffre d'une image bien souvent biaisée. Eclairage.

Victor Fouquet

Victor Fouquet

Victor Fouquet est doctorant en droit économique et fiscal à la Sorbonne, auteur de La Pensée libérale de l'impôt - Anthologie (Libréchange, 2016).

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De rapport en rapport, d’élection en élection, la récurrente controverse autour de la "TVA sociale" s’est imposée comme l’une des plus brûlantes du débat fiscal. Ces jours-ci, c’est la proposition de François Fillon de contrebalancer une baisse de cotisations sociales par une hausse de deux points du taux (normal comme intermédiaire) de TVA qui a ravivé, de Jean-Luc Mélenchon à Marine Le Pen, les objections les plus courantes contre "le plus injuste des impôts".

L’injustice de la TVA – fût-elle "sociale" – tiendrait d’abord à son caractère proportionnel, auquel il est reproché de ne pas distinguer entre "riches" et "pauvres", et de faire ainsi obstacle à la redistribution et à l’égalisation des richesses, en dissonance donc avec l’objectif dévolu à l’impôt progressif dans les théories socialistes. Que la critique de l’impôt proportionnel soit sur ce fondement aussi largement répandue montre d’ailleurs que, si elle s’effrite en différents domaines, la domination intellectuelle de la gauche prévaut toujours en matière fiscale. Car c’est bien la progressivité qui, appliquée notamment à l’impôt sur le revenu, pénalise injustement la prospérité des personnes les plus dynamiques – et à travers elle la prospérité de tous – en même temps qu’elle protège les fortunes acquises au détriment de celles en voie de formation. Résultat : loin de réduire les inégalités de revenus, l’impôt progressif pérennise les inégalités existantes. Ce premier grief contre la TVA, a fortiori sociale, mériterait d’être plus énergiquement combattu par une droite enfin capable de renouer avec une conception singulière et éthique de la fiscalité.

De façon corrélative mais peut-être plus significative encore, on prête habituellement à l’augmentation de la TVA un effet ricochet inflationniste sur le prix des biens et des marchandises, au préjudice des plus modestes et de leur pouvoir d’achat. Cette objection est, là encore, très largement infondée. Croire que producteurs et entrepreneurs puissent, de façon synchrone et mécanique, répercuter sur leurs prix de vente l’intégralité d’une hausse de TVA est illusoire. Les prix monétaires dépendent toujours de l’état du marché, c’est-à-dire de l’ajustement permanent entre l’offre et la demande, de sorte que les vendeurs sont tenus d’adapter leurs prix de vente à la faculté qu’a le consommateur de payer la somme finale du bien. Sachant, autrement dit, que la consommation est susceptible de diminuer à mesure que le prix augmente, le vendeur ne peut librement répercuter la hausse de TVA sur le seul consommateur. Il s’ensuit que le relèvement du taux de TVA est nécessairement répercuté, dans des proportions qu’il est impossible d’évaluer précisément, sur les facteurs de production et donc les revenus que peut distribuer l’entreprise à ses cocontractants, en particulier ses salariés.

Double déduction logique : la TVA est bien davantage un impôt sur le revenu qu’un impôt sur la consommation ; et, à bien y regarder, le mécanisme dit de "TVA sociale" n’est rien d’autre que la substitution à une baisse de charges salariales d’une hausse de TVA partiellement assise, elle aussi, sur les salaires – ce qui annihile le principal bienfait que l’on en attend, à savoir un gain de compétitivité relié à l’allègement escompté du coût du travail.

Bref, la TVA sociale n’est ni "l’impôt du pauvre" que fustige par démagogie la gauche jusqu’au Front national, ni le moyen fiscal miracle du retour de la croissance et du financement durable de la Sécurité sociale. Chiffrer à l’euro près, comme certains le font parfois, l’impact d’une hausse de TVA sur la pression fiscale des ménages n’a pas le moindre fondement logique. Reste que le discours électoralement démagogique a, sur ce sujet du moins, toutes les chances de prospérer auprès des couches populaires. Là est peut-être tout le danger pour le candidat de la droite à l’élection présidentielle…

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