La France est confrontée à une crise majeure du logement qui est complètement irrationnelle pour un pays à faible densité de population et qui n'a pas de problème de foncier. Cette crise du logement est réglementaire et liée à une mauvaise orientation des flux financiers. Elle est aussi liée à des politiques qui faussent l'ensemble des mécanismes de fixations des prix en France. 

Le blocage des loyers serait négatif car cela accentuerait la pénurie de logements.

Aujourd'hui, il y a de moins en moins de logements sur le marché locatif traditionnel car la fiscalité est lourde, tout comme la réglementation. Les propriétaires préfèrent louer sur du locatif saisonnier qui, étrangement, bénéficie de conditions fiscales plus attractives.

Les loyers diminueraient évidemment la rentabilité des locations traditionnelles qui ont déjà une rentabilité faible et inférieure bien souvent à 3 % ou proche de 1 % dans certaines villes, une fois les impôts payés et les charges déduites. Les propriétaires fonciers qui louent de manière traditionnelle ne sont pas donc des Crésus comme certains voudraient le faire croire. Le gel des loyers ne ferait que réduire l'offre de logements. Cela aboutirait donc à une augmentation des tensions sur le marché de l’immobilier. Cette mesure n'encouragerait pas les propriétaires à améliorer et à entretenir les logements, comme cela a été d'ailleurs constaté avec la loi de 1948 après la Seconde Guerre mondiale. Il y aurait donc une détérioration du parc locatif, toujours au détriment des locataires. Cela n'inciterait pas les investisseurs immobiliers à construire des logements. Il faut beaucoup plus de logements en location traditionnelle. Le gel des loyers n'aurait comme conséquence que de donner plus de pouvoir aux bailleurs sociaux et de transformer le marché immobilier français en un système où le logement social ne serait que la seule solution possible pour se loger convenablement quand on n'est pas propriétaire. Les classes moyennes seraient évidemment exclues de l'immobilier locatif.

Le gel des loyers est une mesure qui est populiste. Cette mesure peut séduire les électeurs. En France, le coût des locations pour de très nombreux ménages est extrêmement élevé. Ce poste de dépenses peut ponctionner 30 à 40 % du budget familial. Toute mesure de gel est relativement populaire. Il y a donc une tentation dans tous les partis politiques d'instituer ce type de mesures. En revanche, les conséquences sont extrêmement lourdes et surtout cela ne règle pas le problème de la pénurie en matière de location.

La progressivité de la CSG et l'augmentation du SMIC : 

Pierre Bentata : La progressivité de la CSG est vraiment une fausse bonne idée car cela devait recréer de l'égalité en faisant contribuer davantage les gens lorsque leurs revenus augmentent. Or, en faisant cela aujourd'hui, cela veut dire que l’on va commencer à taxer des gens qui pour l'instant ne le sont pas du tout. Sous couvert de progressivité, cela va aboutir à sanctionner les classes moyennes et les classes les plus précaires, ce qui est exactement l'inverse de l'objectif annoncé de la proposition du Nouveau Front populaire. Au regard du programme proposé, cela pourrait être combiné avec l'augmentation de l'imposition sur la fortune et une hausse des impôts sur les entreprises. En réalité, avec ces mesures un start-upper, dès qu'il commencera à avoir du succès, il ne pourra plus augmenter les salaires. Il va devoir bloquer ou diminuer les salaires de ses employés avant d'être contraint à se délocaliser. Rien ne fonctionne dans cette mesure alors qu’au départ elle semblait positive. 

Mais la vraie fausse bonne idée dans les programmes économiques des candidats aux législatives est l'augmentation du SMIC. Cette mesure n’est pas cohérente. La façon dont cette mesure est présentée est la partie la plus fascinante.

Les représentants du Nouveau Front populaire ont indiqué que, grâce à la hausse du SMIC, les entreprises vont augmenter leurs carnets de commandes. Il s’agit de l’argument le plus hallucinant que j'ai entendu pendant cette campagne sur le plan économique. Lorsque l'entreprise perd en productivité et perd en compétitivité parce qu'elle est obligée de payer davantage ses salariés et donc de les payer davantage que ce qu'ils créent en valeur dans l'entreprise. Avec cet argent-là et grâce aux consommateurs, les carnets de commande devraient augmenter. Ce scénario est  possible mais à une seule condition. L’entreprise ne peut avoir comme client que ses propres salariés. Le Nouveau Front populaire a une vision de l'entreprise qui marche en circuit fermé. Non seulement le reste du monde n'existe pas mais il n’y a même pas d'autres entreprises. Chaque entreprise ne fonctionne qu’avec l'argent qu'elle donne à ses employés. Cela révèle qu’il n'y a pas d'enrichissement quand vous augmentez le SMIC puisque tout est redonné directement à l'entreprise et en plus, il n'y a pas de valeur dans l’entreprise. L'argent est juste un mécanisme, un objet qui circule et qui ne sert à rien. Si telle est leur vision des choses, les représentants du Nouveau Front populaire n’ont qu'à mettre une vraie révolution qui leur tient à cœur, abolir l'argent.