Théorie du genre : la schizophrénie de l'UMP <!-- --> | Atlantico.fr
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Jean-François Copé, président actuel de l'UMP
Jean-François Copé, président actuel de l'UMP
©Reuters

Arroseur arrosé

Les députés UMP rivalisent aujourd'hui d'indignation face au projet de loi sur le mariage homosexuel. Pourtant, en 2011, c'est bien le gouvernement UMP qui signait la Convention d’Istanbul, exigeant "l’éradication de toute pratique fondée sur un rôle stéréotypé des femmes et des hommes".

Drieu Godefridi

Drieu Godefridi

Drieu Godefridi est docteur en philosophie (Sorbonne), juriste, et dirigeant d'entreprise. Il est notamment l'auteur de Le GIEC est mort, vive la science ! (Texquis, 2010), La réalité augmentée (Texquis, 2011) et De la violence de genre à la négation du droit (Texquis, 2013).

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 Qui est responsable de l’entrée de la théorie du genre dans le droit français ? 

La théorie du genre soutient que la notion de sexe est culturelle de part en part. Que la distinction des sexes est sans ancrage biologique, donc arbitraire et modulable. Qu’en outre, le modèle hétérosexuel exerce une violence littéralement innommable sur les modèles sexuels et les genres alternatifs. Qu’il est donc temps, et légitime, de "défaire le genre", pour reprendre le titre de l’un des ouvrages de la prêtresse contemporaine du genre, Judith Butler, en éradiquant toute référence au masculin et au féminin, deux genres parmi une sarabande infinie de variations possibles (trans, queer, drag, butch, garou, dyke, fem, etc.)

La majorité socialiste tente ces jours-ci de mettre la théorie du genre en forme de lois (sur le mariage gay, l’éducation des enfants à la violence de genre, la requalification des classes maternelles pour éliminer toute référence à la féminité, la désignation neutre des parents pour ne pas discriminer les parents de même sexe, la procréation médicalement assistée (PMA), la gestation pour autrui (GPA), etc.) A chaque tentative, les parlementaires UMP s’étranglent d’indignation, rivalisant de solennité dans le prophétisme apocalyptique, allant jusqu’à exiger une commission d’enquête parlementaire, "afin que toute la lumière soit faite" (Xavier Breton) sur l’influence de la théorie du genre sur la société française.

La volonté de faire la lumière sur la généalogie législative de cette étonnante théorie est légitime. Toutefois les limiers de l’UMP n’useront guère leurs semelles. Le 11 mai 2011, la France signait en effet la Convention d’Istanbul, qui exige des États signataires l’éradication de toute pratique fondée sur un rôle stéréotypé des femmes et des hommes (article 12). Parce que les mots ont un sens, selon la formule de Nicolas Sarkozy, relisons attentivement cet article, qui impose d’éradiquer toute pratique fondée sur un rôle stéréotypé des femmes et des hommes (Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, signée à Istanbul le 11 mai 2011, qui entrera en vigueur quand dix pays l'auront ratifiée).

Il ne s’agit pas de circonscrire, d’interroger, ou de problématiser, mais d’éradiquer (vocable qui évoque la Sainte Inquisition, le terme élimination ayant été jugé un peu tiède) toute pratique sociale, dans tous les domaines, sans nuance ni exception, ne serait-ce que susceptible d’évoquer la distinction traditionnelle des sexes. Du passé sexuel, faisons table rase pour qu’advienne un monde délivré de l’oppression hétérosexuelle. Bien pâles et hésitantes paraissent les initiatives socialistes dans le domaine du genre, si on les rapporte à la pureté révolutionnaire de la convention signée par la majorité UMP

Il est d’ailleurs à noter que, lorsque la Convention "UMP" sur le genre entrera en vigueur, non seulement les socialistes pourront mais, en toute rigueur juridique, ils devront prendre toute initiative législative de nature à éradiquer la distinction du masculin et du féminin. Car le sacre juridique du genre eut lieu devant le Conseil de l’Europe, dont il est à rappeler que les normes n’ont pas le caractère parfois folklorique, toujours facultatif, des recommandations des Nations Unies. Les conventions du Conseil de l’Europe, qui ont vocation à régir le comportement de huit cent millions de citoyens, sont obligatoires pour leurs signataires, et leur imposent des normes et objectifs soustraits, du fait même, à l’empire du débat démocratique national.

C’est ainsi que l’enquête des fins limiers de l’UMP les conduira, stupéfaits, au 238, rue de Vaugirard (siège de leur parti).

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