Taxation des contrats courts : qui osera abaisser le couperet qui finirait d’achever la France ? <!-- --> | Atlantico.fr
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Il s’agit de pénaliser le recours aux contrats précaires et d’inciter à l’embauche en CDI.
Il s’agit de pénaliser le recours aux contrats précaires et d’inciter à l’embauche en CDI.
©Flickr/Mark Coggins

Emploi

Les syndicats ont demandé à inscrire dans le projet d’accord sur la sécurisation de l’emploi une taxe sur les contrats courts pour limiter leur recours par les entreprises et les inciter à conclure plus de CDI. Mais le thème divise syndicats et patronat.

Hervé Lambel

Hervé Lambel

Hervé Lambel est candidat à la présidence du Medef et co-fondateur du CERF (Créateurs d'emplois et de richesse en France).

D’une lignée d’entrepreneurs, il est diplômé de l’EPSCI (Essec). Il entre en 2000 à la CGPME, puis fonde en 2003 le CERF, dont il devient Président et porte-parole en 2004. Il fait notamment partie des premiers lanceurs d'alerte sur la crise économique et les problèmes de trésorerie des entreprises. Il est également le créateur d’HLDC, société de service et d’investissement.

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Le grand jour pour le patronat et les syndicats approche, mais ce qui devait faire figure d’accord historique pour une réforme du marché du travail semble en proie à la sclérose : celle du corporatisme typiquement français des partenaires en présence, toujours incapables de travailler ensemble pour le bien de notre économie. Autrement dit, le bien de tous !

Que dire des discussions qui se figent aujourd’hui autour de la taxation des contrats courts ? 

Concrètement, le principe est simple… Mais l’idée ne fleure pas bon la nouveauté ! En l’occurrence, il est facile d’attester que ce n’est pas forcément dans les vieilles marmites qu’on fait les meilleures soupes, contrairement à ce qu’énonce l’adage populaire.

Il s’agit donc de pénaliser le recours aux contrats précaires et d’inciter à l’embauche en CDI. Comment ? En augmentant le montant que les entreprises versent à l’Unedic pour les personnes en CDD ou en intérim. Le pourcentage versé (aujourd’hui à 6,4% du salaire) serait alors d’autant plus grand que le contrat est court. Si les syndicats en font une condition sine qua non à la signature des accords à venir, il convient de s’interroger sur les effets dévastateurs de pareille mesure... Pour des entreprises déjà à bout de souffle, et donc pour les emplois qu’elles maintiennent.

En d’autres termes, et alors que les entreprises françaises sont en panne de compétitivité et de financements, il est de nouveau question de brandir la menace d’une taxe ! Au moment même où le gouvernement semblait pourtant avoir mesuré les enjeux, en proposant notamment le crédit d’impôts emploi compétitivité pour abaisser le coût de travail… Incompréhensible !C’est à se demander si l’intelligence collective a définitivement quitté la France…

Les entreprises manquent de visibilité, de trésorerie, de financements, et souffrent d’un marché du travail beaucoup trop rigide.C’est de flexibilité, d’agilité que ces dernières ont besoin, ne serait-ce que pour s’adapter au contexte économique et à la concurrence. Repenser les règles de licenciement serait en ce sens une progression notable, non pas pour se séparer plus aisément des salariés, mais pour réduire l’aléa judiciaire (près de 40% des défaillances d’entreprises trouvent leur origine dans une condamnation prud’homale, dont l’essentiel relève de problèmes de forme), et donc lever la prise de risque supplémentaire que représente l’embauche, afin, justement, de la faciliter.

Alors certes les contrats précaires sont en hausse constante (comme dans tout le Sud de l’Europe), et cette situation est inacceptable pour les salariés, notamment les plus jeunes. Mais rappelons que la précarité touche aussi la plus grande partie des patrons, qui ne sont pas tous à la tête d’entreprise florissante du CAC 40 ! Rappelons également que l’emploi dépend majoritairement d’eux en France, et que la courbe du chômage ne risque pas de s’inverser avec le recours constant à des politiques de ponction des ressources financières ! 

Les patrons français ne sont donc pas les monstres pour lesquels certains aiment à les faire passer ! Le problème est ailleurs, il réside dans le manque d’activité… Dans un marché du travail biaisé. Et le recours à la hausse aux contrats cours ne témoigne de rien d’autre que cela : d’entreprises dont les lendemains ne font que déchanter. 

Pour les entreprises comme pour les salariés, la situation est donc intenable. Il nous faut refuser ensemble pareille approche. Car en cherchant à résoudre la précarisation des salariés de la sorte, il n’en résultera qu’un nouvel affaiblissement des entreprises, et le problème soulevé ne fera qu’empirer.

En dehors d’une réponse forte, parce qu’attendue par tous les partenaires de la France pour continuer à lui accorder leur confiance, il n’y aura donc pas d’accord historique. La situation des entreprises, donc de l’économie et de l’emploi, continuera de se dégrader parce qu’on ne se sera pas posé la question prioritaire de l’activité.

A l’Etat qui s’est posé comme l’instigateur de ces négociations d’envoyer un message fort, plutôt que de menacer d’abaisser unilatéralement le couperet qui finirait d’achever notre modèle économique. 

Si tel était toutefois le choix des élus politiques, ils devraient alors porter la pleine responsabilité de cet échec économique, car ce n’est pas en traitant les conséquences plutôt que les causes que notre pays pourra s’en sortir. Affaiblis par l’explosion du chômage, des taux d’intérêt et des déficits, c’est alors au peuple de France qu’ils devront rendre des comptes !

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