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SOS Wauquiez en détresse ? La grogne commence à s’installer dans les rangs LR après une série de sondages calamiteux
©ERIC FEFERBERG / AFP

Quand la colère monte

Le parti de droite est depuis plusieurs mois dans une situation délicate. En cause : des divergences internes, un manque de leadership et des sondages catastrophiques (Laurent Wauquiez est à 8% dans un sondage Ifop du 18 avril).

Bruno Jeudy

Bruno Jeudy

Bruno Jeudy est rédacteur en chef Politique et Économie chez Paris Match. Spécialiste de la droite, il est notamment le co-auteur du livre Le Coup monté, avec Carole Barjon.

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Maxime  Tandonnet

Maxime Tandonnet

Maxime Tandonnet est un haut fonctionnaire français, qui a été conseiller de Nicolas Sarkozy sur les questions relatives à l'immigration, l'intégration des populations d'origine étrangère, ainsi que les sujets relatifs au ministère de l'intérieur.

Il commente l'actualité sur son blog  personnel

 

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Atlantico : Quelles conséquences entraîne ce "décrochage" en interne ? Comment un parti comme LR peut-il affronter cette déroute ?

Maxime Tandonnet : Les causes de cette situation difficile sont multiples. D'abord, elle tiennent au retrait d'une génération de personnalités politique de LR qui n'a pas été remplacée: Nicolas Sarkozy, François Fillon, Alain Juppé... Le vide se fait cruellement sentir. Ensuite, LR subit la conséquence de la recomposition politique. Le président Macron et LREM occupent une place centrale sur l'échiquier politique, à l'image des radicaux-socialistes de jadis, qui séduit la moitié des sympathisants du parti socialiste et la moitié de ceux des Républicains. L'espace de l'équipe dirigeante LR est donc fortement retréci. Entre LREM et le FN, la marge est étroite. Enfin, le plus grave et le plus déterminant tient à l'antipathie des médias envers Laurent Wauquiez. Après une prestation réussie à l'Emission politique en début d'année, le chef des LR a été éreinté, lapidé à la suite de l'enregistrement clandestin de son cours à l'école de commerce de Lyon et de propos tenus en privé. L'occasion était trop belle et nous avons assisté à un lynchage médiatique en bonne et due forme...Passage à tabac, puis effondrement dans les sondages: son compte était bon... Ce décrochage prive LR d'une dynamique interne. Une équipe interne a été désignée pour préparer le "projet", mais pour l'instant, le mouvement est inaudible. Nous ne ressentons aucun effet collectif de mobilisation ou rassemblement autour du leader. Les dirigeants de LR semblent dans l'attentisme et le scepticisme. Le mouvement est pour l'instant privé d'unité, de volonté, d'espérance, "d'envie", comme disait Sarkozy. Oui, il ne faut pas se voiler la face, l'équation politique est extrêmement compliquée.

Bruno Jeudy : Cette crise d’identité qui a débuté bien avant l’élection de Laurent Wauquiez s'est effectivement beaucoup aggravée. Depuis son arrivée à la tête du parti,  il a notamment amplifié les désaccords politiques et idéologiques existants. Ses propos virulents, voire violents contre Macron ont fini par dérouter les dirigeants mais aussi l'électorat. L'épisode de ses propos enregistrés " à son insu" ont évidemment attisé la méfiance en interne. Auparavant déjà, on a pu observer plusieurs types de réactions en interne : ceux qui ont claqué la porte et sont allés chez En Marche, ceux qui sont restés mais gardent leurs distances, ceux comme Valérie Pécresse qui ont choisi de s'opposer de l'intérieur, comme Bruno Rtailleau au Sénat ou encore ceux qui font cavalier seul comme Xavier Bertrand.

Quelles sont les répercussions possibles à court terme et à plus long terme sur la vie de ce parti? Notamment dans la perspective des élections municipales, puis européennes ?

Bruno Jeudy : Le vrai danger sera en effet celui des élections européennes, sujet très compliqué par définition pour LR. La prochaine convention du parti sera consacrée à l'Europe, thème de division entre les europhiles et les eurosceptiques au sein du parti, avec toutefois une entente possible sur la question des frontières. Wauquiez, qui était pro-européen et qui fut Secrétaire d'Etat aux affaires européennes, a clairement abandonné cette ligne. C'est un sujet qui divise la droite depuis toujours et sur lequel Emmanuel Macron a un avantage incontestable. Il est tout à fait en mesure de leur prendre des voix.

De manière plus générale, la stratégie de Laurent Wauquiez qui consiste à prendre l’espace à la droite de la droite n’est pas assez subtile pour fonctionner. Les questions liées à la vie du parti, même au niveau programmatique, ne sont pas prioritaires pour lui. Il a une stratégie de moyen terme et reste focalisé sur les présidentielles 2022 en pensant siphonner les voix du FN même si cela reste peu probable.

Maxime Tandonnet : LR a des atouts importants en profondeur. Les valeurs du camp des républicains, que LR devrait porter, relatives à l'autorité de l'Etat, la maîtrise de l'immigration, la réduction des impôts et de la dette publique, le renouveau de l'école, la lutte contre le communautarisme, sont largement majoritaires dans le pays. Son implantation locale dans les régions, les départements, les communes, reste significative. La position de force du pouvoir macronien et de LREM est fragile. Elle tient à une étrange sublimation médiatique à la radio et à la télévision, à une conjoncture économique internationale favorable, au relatif succès d'un discours autour de "la transformation du pays", qui de fait, relève en grande partie de la mystification. Malgré ce contexte avantageux, les sondages sont en réalité très mitigés pour le pouvoir en place. Bref, les dirigeants actuels sont eux aussi dans une situation de fragilité. Ils misent sur une image providentielle, ultra médiatisée, au risque d'un basculement et d'un rejet viscéral qui peut se produire à tout moment avec l'usure du pouvoir, la lassitude, l'absence de résultats. La question est de savoir si les LR seront alors présents pour offrir une solution  d'alternance crédible aux Français. Il serait absolument suicidaire pour LR de vouloir imiter le succès de M. Macron en cherchant une idole à lui opposer. Les Français, écoeurés par le système du "sauveur providentiel", n'y croiront plus. En outre, les médias ne laisseront pas faire et se déchaîneront une fois de plus contre toute tête susceptible d'émerger du lot. LR doit jouer sur une toute autre carte: non à la guerre des chefs, non à la fuite dans le narcissisme, mais oui à la relance du débat d'idées. LR doit opposer au culte de la personnalité une culture de l'intérêt général, de la vérité, et du bien commun. Pourquoi ne pas réunir ses parlementaires, ses élus régionaux, départementaux et des grandes communes, ses intellectuels, pour mettre en place un parlement de l'alternance? Bref, jouer la République contre l'idolâtrie. Les Français attendent un message de rassemblement et d'unité... Le temps des candidatures viendra, mais avant, il faut reconstruire les fondements de la maison et une crédibilité au service de la France.

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