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Sarkozy, les référendums, et le recours au peuple : si vous n’avez pas confiance en moi, ayez confiance en vous
©France 2

Pour les mal comprenants

Ce vendredi soir, au JT de France 2, Nicolas Sarkozy a indiqué que s'il remportait la présidence, il organiserait un référendum sur l'internement des fichés S.

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe est le fondateur du cabinet Parménide et président de Triapalio. Il est l'auteur de Faut-il quitter la France ? (Jacob-Duvernet, avril 2012). Son site : www.eric-verhaeghe.fr Il vient de créer un nouveau site : www.lecourrierdesstrateges.fr
 

Diplômé de l'Ena (promotion Copernic) et titulaire d'une maîtrise de philosophie et d'un Dea d'histoire à l'université Paris-I, il est né à Liège en 1968.

 

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Sarkozy n’est jamais aussi percutant, déterminé, charismatique que dans les moments difficiles où tout le monde pronostique son effondrement. Il en a donné une nouvelle preuve au journal de 20 heures de France 2, hier, où il a renversé l’ordre du débat en proposant deux référendums dès les élections législatives de juin 2017 sur la rétention administrative des fichés S et sur le regroupement familial. Qu’on aime ou pas, qu’on le veuille ou pas, l’animal Sarkozy a senti la situation et bousculé ses adversaires par une proposition tonitruante dont tout le monde parle, et qui oblige ses adversaires à prendre position.

Pourra-t-il s’arrêter au milieu de cette voie dans laquelle il vient de s’engouffrer ? Ou a-t-il intérêt à faire son coming-out bonapartiste complet ? La question est ouverte.

Sarkozy bousculé par Buisson

Une ombre planait sur le plateau de France 2 hier: celle du Raspoutine alopécique Patrick Buisson, qui a ouvertement accusé Sarkozy de mentir cyniquement à ses électeurs, en formulant des propositions qu’il n’a aucune intention de réaliser. On a bien senti que l’interview était toute entière organisée autour de ce tabou qu’on ne pouvait violer mais qu’on avait tous en tête.

D’où la proposition de Sarkozy d’organiser un référendum le jour même des législatives, histoire de laisser les Français le sanctionner s’il ne tenait pas parole.

L’influence orbanienne?

Le présentateur a, au passage, glissé une allusion à Viktor Orban, dont nous révélions hier que Nicolas Sarkozy avait recruté un conseiller, Arpad Habony. De fait, face à Juppé dopé par ses tisanes qui lui permettent de conserver le maillot jaune dans les étapes de montagne, Sarkozy pratique la fuite non pas en avant mais vers la droite, en multipliant les propositions qui pourraient convaincre les électeurs du FN de venir le soutenir.

On parlera désormais de la tentation orbanienne de Sarkozy.

Un pari gagnant face au confusionnisme de Juppé?

Chacun appréciera l’orientation. Certains l’appelleront même une dérive. Elle cache en réalité une course à l’élargissement du socle électoral qui plombe la primaire des Républicains. Juppé a d’ailleurs ouvert le premier la boîte de Pandore en proposant aux électeurs de gauche de venir voter. Un candidat de droite désigné avec des voix de gauche? Ce confusionnisme-là appelait la réaction de Sarkozy vers le vote FN.

Reste à savoir si les Républicains survivront à la tension imposée par cette épreuve de tir à la corde écossaise. La distance entre les électeurs centristes et le camp d’en face risque en tout cas de bien s’agrandir à l’issue de la confrontation.

Sarkozy à mi-chemin de son populisme

Sarkozy apparaît toutefois encore à mi-chemin de son populisme, comme s’il voulait bien s’en servir sans l’assumer vraiment. Car, au point où il en est dans sa désignation des élites face au parler vrai du peuple français, il manque une brique essentielle. Comment peut-on critiquer un régime dominé par les élites sans proposer de changer le régime lui-même?

L’organisation d’un référendum sur l’internement des fichés S lui en donnera pourtant l’occasion. L’article 11 de la Constitution compliquera en effet l’organisation de ce référendum…Disons même que Sarkozy aura besoin de réformer la Constitution pour le permettre, ce qui exclut le respect de la date du 18 juin pour tenir le scrutin.

Au lieu d’être le candidat orbaniste du référendum, Sarkozy ne gagnerait-il pas à devenir le candidat de la rupture en proposant de changer le régime tout entier? Le peuple l’attend, et le populisme a (souvent) du bon lorsqu’il est parfaitement assumé.

Splendeur et misère de la primaire des Républicains

Au fond, l’absence de base électorale claire pour cette primaire a du bon. Elle crée une virulente mais saine concurrence entre deux lutteurs qui sont capables du pire comme du meilleur. On se félicite donc que les Républicains n’aient pas posé comme principe simple d’interdire aux électeurs de la primaire de participer aux primaires de la gauche. Cette idée simple et facile à mettre en oeuvre nous aurait évité ces débordements.

Vive le manque d’imagination des crânes d’oeuf qui ont préparé ce scrutin! Et chapeau à l’animal électoral Sarkozy, qui pourrait bien bousculer le système sans s’en rendre compte, comme un chien aveuglé par la piste qu’il suit.

Cet article est également consultable sur le blog d'Eric Verhaeghe

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